Il s'agissait d'une mesure phare de Ma Santé 2022, grande réforme santé du quinquennat, annoncée en grande pompe en septembre 2018 par le président de la République. La création « en urgence » de 400 postes de généralistes salariés ou a exercice mixte dans les zones sous-denses devait permettre de lutter contre la désertification médicale. « Je fais le pari que cette mesure exceptionnelle sera attractive parce que nous constatons que les jeunes générations sont davantage en demande d'un exercice collectif, parfois salarié », affirmait alors Emmanuel Macron.
Déployée par les Agences régionales de santé, la mesure se décline en deux volets complémentaires : d'une part le recrutement, pour deux ans, de 200 médecins généralistes en exercice partagé entre l’hôpital et la ville et d'autre part celui de 200 généralistes salariés. Dans le premier cas, il s’agit de soutenir la diversification des formes d’exercice en proposant un statut d'assistant partagé. Dans le second, une garantie financière est apportée aux employeurs d’un médecin généraliste en zone sous-dense, pour les deux premières années d’embauche.
Démarrage poussif
La mesure n'a pas, pour l'heure, rencontré un franc succès. Un premier bilan de la mise en œuvre de la mesure, dévoilé en septembre dernier, faisait état de 60 postes « pourvus » ou « en passe de l’être » (effectif revu à 80 récemment), permettant à « 38 000 personnes » de retrouver un médecin traitant, précisait alors la Direction générale de l'offre de soins (DGOS, ministère de la Santé). La lenteur avec laquelle les instructions ont été communiquées à l'administration et la mobilisation très hétérogène des ARS, selon les régions, indépendamment de la motivation des candidats, peuvent expliquer le démarrage poussif du recrutement. Un nouveau point d’étape est programmé dans les prochaines semaines qui permettra de mesurer si l'offre a davantage séduit les dernières semaines.
L'exercice partagé déjà expérimenté
Dans la pratique, plusieurs territoires n’ont pas attendu cette mesure pour déployer des dispositifs similaires. En Saône-et-Loire, un médecin généraliste « assistant partagé », le Dr Florian Ronez, est entré en fonction dès la fin de son internat, début novembre. Il partage sa pratique entre le service d’Hospitalisation à Domicile (HAD) du CH de Mâcon et le premier Centre de santé départemental créé en France, qui dispose de plusieurs antennes sur le territoire. « C’est une bonne entrée en matière, après mes différents stages à l’hôpital », commente le jeune praticien, qui est déjà devenu le médecin traitant de patients du Centre de santé.
Rémunéré un peu plus de 3 000 euros (hors astreintes), le Dr Florian Ronez apparaît satisfait de la formule. « Le volume horaire n’est pas excessif, même si je fais un peu plus de 39 heures hebdomadaires, souligne-t-il. Mais surtout, le modèle du Centre départemental est un bon outil de coordination des professionnels de santé. Des temps de réunion et d’échanges sont régulièrement organisés entre les professionnels du Centre. Cette collaboration est plus compliquée en libéral. »
Le salariat, solution de la dernière chance ?
Une initiative similaire est développée en Vendée, où un premier centre de santé doit ouvrir en janvier à Sainte-Hermine et un second à Moutiers-les-Mauxfaits d’ici à la fin du premier trimestre 2020. L’idée est de salarier des médecins généralistes, en renfort des libéraux installés. Venu du Maine-et-Loire où il a exercé en libéral dans une zone rurale pendant de nombreuses années, le Dr Bruno Charrier a été recruté pour coordonner la mise en œuvre de l’initiative vendéenne. Arrivé « au bout du bout » dans sa pratique libérale, il a franchi le pas avec l’envie de « retrouver du temps médical » et de « travailler en équipe ». D’ici l’ouverture du centre, sa mission est de « convaincre trois équivalents temps plein de s’installer ici plus qu’ailleurs », explique-t-il. Ces généralistes seront également maîtres de stage et leurs rémunérations s’échelonneront de 4 000 à 6 000 euros selon leur expérience. Loin d’une formule miracle, le Dr Bruno Charrier évoque « une solution pragmatique » qui offre aux médecins l’opportunité de se « consacrer pleinement à la médecine ».
Le salariat apparaît pour les territoires en manque de médecins comme la solution de la dernière chance. Pour preuve, le Centre-Val-de-Loire est devenu la première région à annoncer son intention de recruter dans les cinq ans 150 médecins salariés pour faire tourner une trentaine de centres de santé.
E. B.
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