Promesse de campagne d'Emmanuel Macron, le service sanitaire de trois mois pour les étudiants en santé prend forme. C'est à Angers que les ministres de la Santé et de l'Enseignement supérieur, Agnès Buzyn et Frédérique Vidal, ont détaillé ce lundi cette réforme carrément présentée comme « une première en Europe ».
Dès la rentrée 2018, quelque 47 000 étudiants en santé par an (médecine, pharmacie, odontologie, maïeutique, kinésithérapie et soins infirmiers) seront concernés par ce dispositif à la faveur d'un module de trois mois inclus dans les maquettes de formation (obligatoire pour l'obtention du diplôme). Ce service sanitaire sera ensuite généralisé à d'autres filières santé à partir de la rentrée universitaire 2019 : orthophonistes, ergothérapeutes, psychomotriciens, audioprothésistes, diététiciens ou encore manipulateurs d'électroradiologie.
En pratique, les étudiants conduiront des missions de prévention dans les écoles, les entreprises, les maisons de retraite et autres « lieux de vie », le plus souvent sous forme collective, précise le gouvernement. Agnès Buzyn a expliqué que ces étudiants deviendront des « ambassadeurs de santé » mais rappelé que le service sanitaire n'a pas vocation à se substituer aux acteurs déjà impliqués dans la prévention ni à pallier les difficultés rencontrées dans les déserts médicaux.
Favoriser l'autonomie et l'engagement des étudiants
La réforme s'appuie sur les recommandations du Pr Loïc Vaillant, PU-PH en dermatologie, président de l'Université confédérale Léonard de Vinci et pilote de la mission sur le service sanitaire, qui a rendu – également ce lundi – sa copie d'une centaine de pages, au terme de six mois de concertation et d'auditions.
Les objectifs sont affichés : sensibiliser tous les futurs professionnels de santé aux enjeux de la prévention primaire ; assurer des actions de prévention et de promotion de la santé auprès de publics variés (écoles, collèges, lycées, universités, EHPAD, lieux de privation de liberté, établissements médico-sociaux, etc.) ; lutter contre les inégalités territoriales et sociales en santé ; favoriser l'autonomie des étudiants et renforcer leur engagement ; enfin encourager l'interprofessionalité par des projets communs.
Nutrition, addictions, vie affective et sexuelle
Pour les interventions de prévention, quelques thématiques « prioritaires » de santé publique ont été retenues : l'activité physique et sportive, les addictions (tabac, alcool et drogues), la nutrition ainsi que la vie affective et sexuelle. D'autres s'ajouteront comme la sensibilisation à la vaccination, certains dépistages, les troubles du sommeil, les écrans, l'hygiène bucco-dentaire ou les gestes qui sauvent.
Un jeune sur quatre fumant quotidiennement en 2017, une obésité qui touche 3,5 % des enfants, 80% d'adultes sédentaires : « La fréquence des comportements à risque reste élevée en France », particulièrement chez les jeunes et parmi les publics les plus fragiles socialement, relèvent les deux ministres.
Concrètement, au cours du service sanitaire, trois phases ont été arrêtées par le gouvernement, toujours sur la base du rapport Vaillant : formation théorique et pratique des étudiants à la prévention ; intervention auprès du public identifié ; débriefing et évaluation auprès du référent service sanitaire.
Frais de déplacement : 130 euros par mois par étudiant ?
Le service sanitaire sera étalé sur trois mois « de manière continue ou discontinue », en fonction des plannings des facultés, sans rallonger les études. Il se substituera à des activités pédagogiques ou à des stages existants. Dans son rapport, le Pr Vaillant suggère d'inclure le service sanitaire lors du premier cycle des étudiants en médecine en troisième année. Toutefois, il n'exclut pas sa tenue au cours du second cycle, à la faveur de la réforme prochaine. Quant aux lieux à privilégier, le rapport Vaillant place les écoles, collèges et lycées en tête de liste car leur nombre et répartition facilitent l'accueil des étudiants en santé.
Côté financier, les associations d'étudiants en santé se sont positionnées d'emblée pour bénéficier au minimum d'indemnités kilométriques compensatoires. « La réalisation du service sanitaire ne doit pas créer de charges supplémentaires », insiste Yanis Merad, président de l'Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF). Sur ce point, les jeunes ont été entendus. « Les frais de déplacement seront pris en charge par l'État », ont confirmé ce lundi les deux ministères. Les hypothèses de calcul du Pr Vaillant tablent sur une indemnité de transport de 130 euros pour un mois. Un forfait d'aide aux transports ou d'hébergement de 200 euros fait partie des propositions (lors d'actions dans des zones géographiques éloignées).
Aucune autre gratification n'est prévue. Néanmoins dans une configuration où le service sanitaire remplacerait le stage hospitalier d'un étudiant, Frédérique Vidal a précisé qu'une rémunération serait envisagée.
Territoires précurseurs
Dès ce mois de mars, le service sanitaire sera expérimenté à Angers, Clermont-Ferrand, Caen et Dunkerque. Coup d'envoi dans quelques jours : les étudiants volontaires suivront une formation à la prévention, puis enchaîneront en avril et mai avec des actions de prévention primaire dans des classes de lycéens. En juin, une évaluation sera réalisée avant le déploiement à grande échelle à la rentrée.
Plusieurs textes réglementaires sont attendus sur le service sanitaire pour préciser les terrains de stages agréés, les modalités d'encadrement ou encore les indemnités.
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