Voilà une étude qui bat en brèche quelques idées reçues : le fait d'avoir exercé au SAMU, en réanimation ou aux urgences en pleine pandémie Covid-19 n'est pas un facteur de risque d'anxiété supplémentaire chez les étudiants en médecine, suggère une étude menée par la faculté de médecine de Strasbourg et l'université de Genève, publiée dans le journal « Internal and Emergency Medicine ».
Depuis 2018, le centre de formation et de recherche en pédagogie des sciences de la santé (fac de médecine de Strasbourg) et l’unité de recherche en éducation médicale de Genève, ont lancé une vaste étude pour mesurer l'évolution de l'anxiété chez les étudiants en médecine. En 2020, ils se sont concentrés sur la mobilisation des carabins lors du premier confinement du printemps. À la suite de l'annulation de stages, de nombreux jeunes médecins ont été réorientés vers des services de réanimation, des urgences ou du SAMU, sur la base du volontariat. Les chercheurs ont souhaité explorer le vécu des étudiants en médecine pendant la crise sanitaire et l’impact psychologique.
En tout, 1 165 étudiants de premier et second cycle (de la 2e à 6e année)* ont répondu. Parmi eux, 481 ont choisi d'épauler des professionnels dans leurs services face à la crise (684 ont décidé de ne pas s'engager). Ils ont été affectés dans onze hôpitaux alsaciens, région durement frappée par le Covid-19. La moitié des étudiants mobilisés (243) travaillaient en première ligne (SAMU, réa et urgences), l'autre moitié (238 étudiants) dans des unités Covid.
Anxiété modérée
Les chercheurs se sont appuyés sur l'échelle STAI-A (20 items abordés) pour étudier le niveau d'anxiété des étudiants en médecine. Un score en dessous de 55 désigne une anxiété modérée. Entre 55 et 65, elle est élevée. Au-delà de 66, elle est sévère et nécessite une prise en charge psychologique.
Au total, sur les 1 165 étudiants ayant répondu, 901 présentent une anxiété modérée, 178 une anxiété élevée et 86 sévère. En comparant ces données avec celles de l'enquête menée au printemps 2018, l'équipe observe que le taux d'anxiété global des étudiants a certes augmenté mais en suivant la courbe de la population générale. « Nous avons constaté que la cohorte 2020 était plus anxieuse que la cohorte 2018. Le nombre d'étudiants souffrant d'une anxiété élevée a augmenté de 14 % et de 7 % chez ceux présentant une anxiété sévère. Mais ces taux ne diffèrent pas de ceux mesurés en population générale dans le contexte du Covid-19 », notent les auteurs. Et d'ajouter : « L’impact de la pandémie sur le bien-être des étudiants est réel, mais il n’est pas aussi important qu’on pourrait spontanément le penser ».
Mais surtout, les résultats affinés montrent que les étudiants ayant exercé en première ligne ou dans des unités Covid affichent un taux d'anxiété similaire aux jeunes interrogés en 2018, principalement « non-pathologique (faible à modéré) ». À l’inverse, l'anxiété est plus marquée chez les carabins qui n'ont pas été mobilisés pendant le premier confinement.
Compétences acquises
Les futurs médecins ont pu tirer un bénéfice direct de leur engagement dans les services Covid. Interrogés sur cette expérience professionnelle, deux tiers des étudiants volontaires ont déclaré avoir développé de nouvelles compétences. Un sur six déclare avoir été influencé par cette séquence dans le choix de sa future spécialité. In fine, ils ont perçu cette expérience comme « modérément positive ».
L'équipe de chercheurs émet l'hypothèse que le fait de se porter volontaire en temps de crise sanitaire dans un poste hospitalier relève « de stratégies actives d’adaptation (stratégies de coping) ». Dans cet engagement, l'étudiant voit surtout une opportunité d'apprentissage qui « limiterait l’anxiété ». Les chercheurs concluent qu'il n'y a pas d'obstacles à la mobilisation active des étudiants tant que « leur implication est volontaire » et que « les encadrants restent vigilants face au risque d'épuisement professionnel ».
* Étude menée auprès de 1 180 étudiants du premier et second cycle entre le 7 et 17 mai 2020 par un questionnaire en ligne. Parmi les répondants, 531 étaient en 2e et 3e année, 471 en 4e et 5e année et 163 en 6e année.
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