Verra-t-on disparaître le 15, le 17 et le 18 au profit d'un numéro unique d'urgences ? C'est ce qui semble ressortir du rapport interministériel que s'est procuré Hospimedia. Déposé mi-octobre avenue de Ségur et place Beauvau, ce document cosigné par les inspections générales des affaires sociales (IGAS) et de l'administration (IGA), donne quatre scénarios pour moderniser et clarifier un service public français de prise en charge des appels d'urgence « construit au fil du temps et sans conception d'ensemble ».
Et celui qui semble séduire le plus les inspecteurs consiste à généraliser le 112, concrétisant ainsi le fameux numéro unique qui divise tant les représentants du secteur.
Ni fusion, ni cloisonnement
Parmi les quatre solutions proposées, deux sont évacuées rapidement par les auteurs du rapport car jugées inadaptées aux enjeux, présentant des risques ou ne permettant pas « d'envisager une véritable amélioration du service rendu à la population ».
Le premier, qui consisterait à mettre en place un numéro « secours » (fusion du 17 et du 18) et un « numéro unique santé », est vu comme un cloisonnement des différentes organisations qui compliquerait la réponse aux urgences.
Le second, qui vise à fusionner autour du 112 les plateformes des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) et celles des SAMU, a lui été écarté en raison de « la forte réticence du monde de la santé » qui voit d'un mauvais œil pour ses établissements la mutualisation des ressources en urgentistes qu'impliquerait ce dispositif. En outre, le rapport estime que cette option aurait conduit à « de forts points de crispation quant au lieu retenu pour la localisation de la plateforme » et qu'il aurait été compliqué, une fois la fusion exécutée, d'y intégrer, même à terme, les services du 17, dans la perspective d'un numéro unique général.
Sur cette base, la mission interministérielle envisage un troisième scénario qui consisterait à maintenir les numéros existants (15, 17, 18 et 112) à condition de mettre en œuvre un « vigoureux plan d'action visant à prévenir les risques identifiés et à parvenir à une réelle amélioration du service rendu à la population ». Les auteurs du rapport se défendent ici de proposer le statu quo et insistent sur la nécessité, si cette solution est choisie, de réactualiser les référentiels, de garantir « rapidement et totalement » l'interopérabilité des systèmes d'information entre SAMU et SDIS et d'améliorer la formation des opérateurs. En parallèle de ce troisième scénario, il est recommandé d'étendre le 116 117 à l'ensemble du territoire pour la prise en charge des soins non programmés, hors horaires de permanence des soins ambulatoires. Cette généralisation devrait s'accompagner d'une large campagne d'information aux usagers afin de limiter efficacement le recours au 15.
Plateformes supra-régionales
Mais le scénario que semble in fine retenir la mission est sans doute le plus révolutionnaire. Il consiste à faire du 112 le numéro unique des urgences. Le rapport propose ainsi la création de plateformes de premier niveau, à l'échelle supra régionale, chargées de recevoir les appels pour les transmettre ensuite vers le service d'urgences le plus compétent. Cette mission de tri est intitulée « débruitage/orientation ». Il est également préconisé de donner à ces plateformes le pouvoir de déclencher des « départs-réflexes » afin de ne pas dégrader la réponse aux urgences vitales. Surtout, comme dans le scénario précédent, la mise en place d'un tel système devra s'accompagner du déploiement France entière du 116 117, numéro cher aux médecins libéraux (toujours pour les soins non programmés).
Le niveau territorial, correspondant aux sept grandes zones de défense et sécurité, serait retenu « pour des raisons d'échelle d'une part, et de cohérence avec les compétences en matière de sécurité d'autre part ». Les chiffres avancés estiment entre 5,7 millions (hypothèse basse) et 7,1 millions (hypothèse haute), le nombre moyen d'appels reçus chaque année par plateforme. Enfin, le pilotage de ces plateformes serait assuré par une structure ad hoc, interministérielle, et dont la gouvernance serait mixte, « associant l'État et les collectivités territoriales ».
Comme il n'existe pas de scénario parfait, la mission pointe malgré tout certaines faiblesses de ce dernier schéma. Elle met en garde contre la faible connaissance du 112 par la population et le risque de renoncement aux soins du fait des liens présumés entre les secours sanitaires et la police ou la gendarmerie. La plus forte vulnérabilité du système en cas de saturation, de dysfonctionnement ou d'attaque informatique est également signalée.
Le SAMU se frotte les mains
Contacté par « le Quotidien », le Dr François Braun, président de SAMU-Urgences de France (SUDF), ne cache pas sa satisfaction devant les conclusions du rapport. « Nous avons toujours fait savoir que si 112 il devait y avoir, il devait être supra-départemental et agnostique [sans dépendre d'un ministère source] », rappelle l'urgentiste messin.
Seul bémol, le patron du SAMU s'oppose à l'autorisation de déclenchement de moyens accordée aux plateformes. Selon lui, si l'appel est redirigé très rapidement, il n'y a aucun risque supplémentaire pour les patients, même en cas d'urgence vitale. « Il n'y a pas d'urgence à 20 secondes, tout peut attendre 45 secondes sans influence sur la survie », affirme le Dr Braun. Reste à l'exécutif de trancher.
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