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Coma : prise en charge de la première heure

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Publié le 05/11/2024
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La Société française de médecine d’urgence (SFMU) a fait le point, avec ses Journées thématiques interactives, sur la gestion de la première heure des urgences vitales. Parmi les six ateliers, retour sur une situation fréquente : le coma chez l’adulte.

Chaque minute compte pour les neurones du patient

Chaque minute compte pour les neurones du patient
Crédit photo : BURGER/PHANIE

Les Journées thématiques interactives 2024 (JTI, 16-18 octobre, Rennes) ont connu un grand succès avec près de 400 participants. Six ateliers sur la gestion de la première heure de l’urgence vitale ont été organisés (traumatisé grave ; détresse respiratoire aiguë ; coma ; pathologies circonstancielles ; état de choc ; de la régulation au déchocage), permettant de débattre avec les experts et de faire le point sur l’état actuel des connaissances. L’atelier sur le coma, notamment, a donné lieu à de nombreux échanges avec les experts : Mélanie Roussel (Rouen), Richard Macrez (Caen), Emeline Delon (Nîmes).

Le coma est un état d’altération profonde de la conscience, caractérisé par l’absence d’éveil (yeux fermés) et l’absence de réponse aux stimulations (verbales, tactiles, nociceptives). Un des principaux mécanismes physiopathologiques sous-jacents est un dysfonctionnement de la substance réticulée activatrice ascendante (Sraa), qui joue un rôle central dans le maintien de l’éveil et qui peut être causé par des lésions directes ou des souffrances diffuses affectant cette région.

Des causes très variées

Les causes du coma sont très nombreuses. Elles peuvent être structurelles (un tiers des cas) et toucher les deux hémisphères (AVC massif, traumatisme crânien). Il peut aussi s’agir de lésions du tronc cérébral qui altèrent la Sraa, entraînant un coma par absence de stimulation du cortex (AVC du tronc cérébral, tumeurs cérébrales compressives).

Dans deux tiers des cas, le coma a une origine systémique, qui peut être métabolique (hypoglycémie), toxique (médicaments, drogues), infectieuse (méningite, encéphalite), endocrinienne, neurologique (épilepsie).

Il convient d’identifier rapidement la cause sous-jacente pour instaurer le traitement approprié.

Identifier et réguler

En régulation, la première question à poser est de savoir si le patient respire, afin d’éliminer un arrêt cardiaque. Chez un inconscient qui respire, il faut alors rechercher le contexte, avec un interrogatoire précis : antécédents (diabète) ? toxiques, alcool ? anomalies neurologiques (perte d’urine, mouvements anormaux) ?

L’état du patient est évalué à distance selon le protocole ABCDE :

A - Airway : vérifier la libération des voies aériennes ;

B - Breathing : vérifier si le patient respire spontanément ou non ;

C - Circulation : vérifier l’état hémodynamique ;

D - Disability : vérifier l’état neurologique, notamment grâce à l’échelle Four (fondée sur la réponse oculaire et motrice, les réflexes du tronc et la respiration) ou au score de Glasgow (fondé sur l’ouverture des yeux, la réponse motrice et la réponse verbale) ;

E - Exposure/Environnement : recherche de blessure, contrôle de la glycémie capillaire.

Enfin, on donnera les instructions immédiates : manœuvre de secours (PLS, couvrir le patient) et surveiller sa respiration le temps de l’arrivée des secours.

Évaluer et réévaluer

Lors de la prise en charge hospitalière, le temps de triage doit être réduit au maximum ; French est l’échelle de tri la plus utilisée.

Les premières minutes de l’évaluation d’un patient dans le coma sont primordiales et la surveillance est essentielle : il faut constamment le réévaluer car son état est fluctuant. En salle d’accueil des urgences vitales (Sauv), il faut déshabiller le patient pour surveiller l’évolution clinique, le monitorer (scope, bilan entrée/sortie, niveau de conscience), le conditionner selon la profondeur du coma (ventilation à débit variable [VAV], intubation orotrachéale [IOT] si nécessaire) et réaliser les bilans prescrits. Les soins de nursing, notamment soins de bouche et de protection oculaire, sont nécessaires.

Une imagerie cérébrale doit être réalisée sans délai

Il ne faut pas perdre de temps pour évaluer les signes d’urgence vitale et neurologique, rechercher des signes de causes lésionnelles et réaliser une imagerie cérébrale sans délai. Si la TDM est insuffisante, l’IRM ou le scanner injecté permet une visualisation du système vasculaire et peut mettre en évidence l’occlusion de l’artère basilaire. Une ponction lombaire doit être réalisée dans l’heure qui suit l’admission dans le cadre du coma inexpliqué. Elle n’est pas contre-indiquée en cas de troubles de conscience isolés.

Les toxidromes sont recherchés selon les paramètres vitaux, la fonction respiratoire, la température corporelle, l’évaluation pupillaire, les bruits hydroaériques et la diaphorèse. Une recherche toxicologique peut être effectuée, avec quatre cas de figure :

• intoxication confirmée et toxique identifié : pas de dosage sauf s’il y a un intérêt pour le traitement ou le pronostic ;

• intoxication confirmée mais symptômes discordants : quantification de la substance potentielle ;

• intoxication confirmée mais toxique inconnu : screening basé sur les toxidromes ciblant les substances courantes ;

• intoxication non confirmée et symptômes sévères : analyse toxicologique large.

Intubation, la fin d’un dogme ?

Classiquement, le seuil de Glasgow < 9 nécessite une intubation pour protéger les voies aériennes, éviter l’inhalation, la pneumonie et réduire la mortalité.

Cependant, une étude récente (publiée dans le Jama) montre que les patients comateux avec suspicion d’intoxication aiguë et Glasgow < 9 non intubés ne font pas plus de complications que les patients intubés. Cette stratégie est associée à une réduction de la mortalité, de la durée de séjour en réanimation ou à l’hôpital, et des effets secondaires.

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D’après un entretien avec le Pr Nicolas Peschanski (Rennes)

Dr Christine Fallet

Source : Le Quotidien du Médecin