Le 9 juin 1975, le premier bébé est né à la maternité de Sarlat, en Dordogne. Cinquante ans plus tard, pour marquer le coup, le comité de défense de l’hôpital et de la maternité s’est réuni symboliquement devant l’hôpital Jean-Leclaire, en présence de Jacqueline Delbos, qui y avait donc donné naissance à une petite Carole aujourd’hui quinquagénaire… Fermée depuis de longs mois faute d’une équipe obstétricale complète concomitamment (gynécologue-obstétricien, pédiatre, anesthésiste), la maternité traverse une zone de turbulences. Pour accoucher, les femmes doivent aller dans les hôpitaux de Périgueux, Bergerac, Brive ou même Cahors. Et demain, qu’en sera-t-il ? Localement, l’avenir de la structure divise.
9 % de taux de vacance de postes médicaux
En 2023 déjà, le service de gynécologie-obstétrique n’avait assuré qu’un service minimum durant 138 jours, en raison de la fermeture du plateau technique, faisant alors fonction de centre périnatal de proximité. Une « situation hybride, qui questionne l’avenir de la maternité », résume un rapport publié en mai par la chambre régionale des comptes d’Occitanie. Les sages y décrivent des « tensions permanentes » dans les effectifs, avec un taux de vacance de postes médicaux de « 9 % ». La maternité de Sarlat de niveau 1 est passée largement sous le seuil des 250 naissances en 2023 (154), soit une baisse de 38 % sur la période 2019-2023. Une activité très en dessous du seuil réglementaire de 300 accouchements annuels, qui menace un établissement de fermeture.
Dans ce contexte d’une maternité en perte de vitesse, faute de plateau technique opérationnel, l’hôpital de Sarlat a déposé un renouvellement d’autorisation d’activité… tout en menant une réflexion pour mobiliser autrement les personnels en cas de fermeture du plateau technique, dans le cadre d’un centre périnatal de proximité. L’ARS a validé à cet effet un « plan rose maternité » de l’établissement, qui décrit l’organisation dérogatoire (provisoire ?) permettant d’« assurer la continuité de la prise en charge des femmes enceintes, des accouchées et des nouveau-nés à la maternité en cas de carence partielle ou totale de médecins », explique la chambre régionale des comptes.
Cette unité nommée KOALA – reposant notamment sur une équipe de sages-femmes et des auxiliaires de puériculture – vise aussi à « endiguer le taux de fuite des parturientes » qui, devant le fonctionnement aléatoire du bloc obstétrical, font le choix d’un suivi dans une autre maternité, considérée comme plus sécurisante. En attendant le renfort de médecins et la reprise éventuelle de l’activité du plateau obstétrical, ce dispositif porté par les équipes de la maternité renforce l’accompagnement des femmes enceintes pré et post-accouchement.
Le maintien « illusoire » des petites structures ?
Mais ce fonctionnement hybride reste fortement questionné par la chambre des comptes, à la lumière de plusieurs autres rapports d’expertise : celui de la Cour des comptes sur la périnatalité (mai 2024) qui précise que « cette dérogation prévue en 1998 est aujourd’hui moins justifiée ». Ensuite celui de l’Académie de médecine (février 2023) qui qualifie d’« illusoire » le maintien de petites structures, au regard des contraintes de ressources humaines et des enjeux de la sécurité des soins. Enfin, une mission flash des députés Philippe Juvin et Anne Bergantz sur la mortalité infantile évoquait la « désorganisation des services dans de nombreuses petites maternités, devenues peu attractives pour les professionnels de santé ». « Le maintien à tout prix des très petites maternités pose évidemment la question de la sécurité de la mère et de l’enfant », pouvait-on lire.
De son côté, le comité de défense de l’hôpital public et de la maternité de Sarlat s’interroge sur « la non-durabilité du centre périnatal de proximité » proposant plutôt « une meilleure répartition des médecins au sein du GHT avec des temps de consultations plus longs pour réduire un temps d‘attente inacceptable ».
La question de l’avenir des petites maternités et de l’organisation de la périnatalité est revenue à l’ordre du jour ces dernières semaines, avec la proposition de loi du groupe Liot (adoptée en première lecture), qui entend imposer un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternité, au grand dam d’une partie de la communauté médicale.
La France se classait en 2022 au 23ᵉ rang sur les 27 États de l’Union européenne en termes de mortalité infantile, en recul depuis une trentaine d’années.
Réforme des EVC : les Padhue restent sur leur faim
Régularisation des Padhue : le gouvernement tient ses promesses, voici ce qui va changer
Conflit entre la CFDT et les cliniques sur les revalorisations de salaires : coup d’envoi d’une longue procédure
L’hospitalisation à domicile poursuit sa croissance, la Fnehad mise sur la jeune génération médicale