Les intentions de la ministre de la Santé Geneviève Darrieussecq n’ont semble-t-il pas pleinement convaincu les représentants d’Unicancer, la fédération des centres de lutte contre le cancer (regroupant 18 CLCC), qui a fêté ses 60 ans les 13 et 14 novembre.
De fait, lors de son discours à la convention nationale d’Unicancer, la ministre de la Santé s’est contentée d’afficher ses priorités, sans annonces concrètes. Elle entend certes renforcer la prévention, lutter contre les cancers de mauvais pronostic, améliorer la qualité de vie et limiter les séquelles ou encore assurer l’égalité d’accès aux progrès médicaux pour tous. Elle souhaite aussi poursuivre la politique de son prédécesseur, Frédéric Valletoux, en matière de lutte contre le papillomavirus avec la vaccination au collège. Pour réduire les inégalités territoriales de santé, l’accès aux soins dans les zones géographiques isolées est une autre priorité affichée.
Si la déléguée générale d’Unicancer, Sophie Beaupère, partage ces vœux, elle rappelle surtout « la dure réalité financière » actuelle pour de nombreux centres. Comme d’autres fédérations hospitalières, elle met en avant la demande d’une « loi de santé pluriannuelle », gage de visibilité, ou au minimum un protocole dédié pour les CLCC.
Ondam établissements : des crédits insuffisants ?
Sur ce plan, le sous-objectif de dépenses d’assurance-maladie (Ondam) des établissements de santé, fixé en hausse de 3,1 % pour 2025, ne rassure pas Unicancer car, comme l’avait déjà expliqué la Fédération hospitalière de France (FHF), cette enveloppe sera largement rabotée par l’augmentation programmée du taux de cotisation des employeurs hospitaliers à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL).
Résultat, le taux « véritable » de progression des crédits ne serait que de 2 % alors que les besoins estimés du secteur sont au minimum du double. En 2022 et 2023, l’activité des longs séjours a progressé de 15 % et de 6 % respectivement. Selon la fédération, le risque est que l’évolution des tarifs d’hospitalisation des établissements soit inférieure à celle de l’année précédente, et ce dans un contexte de fortes tensions liées à l’inflation et à cette progression de l’activité des CLCC, connexe à l’augmentation de l’incidence des cancers.
La moitié des centres déficitaires
Ce contexte aboutit à une situation financière fragilisée des centres de lutte contre le cancer. En 2023, la plupart d’entre eux étaient encore à l’équilibre, avec toutefois cinq centres déficitaires. Mais en 2024, la situation s’est dégradée, avec la moitié des centres en déficit, en moyenne d’un million d’euros. Les difficultés risquent d’empirer car la fédération n’espère pas la restitution des crédits mis en réserve cette année (gel prudentiel) à cause du dynamisme de son activité.
L’attractivité des CLCC est un autre sujet prioritaire. Depuis la crise Covid, il y a davantage de postes vacants et d’absentéisme, et donc de tensions sur tous les postes infirmiers (Iade, Ibode et infirmières de nuit). La semaine de quatre jours est « en réflexion » pour attirer des personnels médicaux et paramédicaux.
Écarts de rémunération qui pénalisent
La fidélisation des personnels médicaux est une autre difficulté. L’activité des CLCC étant entièrement tournée vers le service public hospitalier, les centres sont parfois pénalisés par les activités libérales autorisées dans les CHU pour leurs praticiens, ce qui aboutit à des écarts importants de rémunération. « De notre côté, il existe un engagement très fort d’avoir une activité exclusivement publique. Mais ce choix pose un grave problème qu’il va falloir résoudre », argumente le Pr Jean-Yves Blay, président d’Unicancer. Il pointe ainsi des différences de rémunération allant du double au triple, une situation jugée « injuste ». Dernière iniquité citée par Sophie Beaupère : les écarts de rémunération (environ 3 %) entre les personnels de leurs établissements et ceux des hôpitaux publics en raison du rattrapage insuffisant des mesures salariales « Ségur » et « Guérini » (point d’indice).
Chimiothérapies orales, expérimentation réussie
Le point d’accord avec la ministre de la Santé porte sur le soutien aux innovations en cours. La fédération Unicancer expérimente avec succès des financements dérogatoires au forfait du type « article 51 » sur la prise en charge des chimiothérapies orales, avant généralisation éventuelle. Une autre expérimentation article 51 doit bientôt démarrer avec l’Institut Curie sur la prévention des personnes à haut risque de cancer.
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