Les indicateurs financiers du centre hospitalier de Dieppe (Seine-Maritime) sont « particulièrement préoccupants », assène la chambre régionale des comptes Normandie qui a examiné la gestion de l’hôpital pour les exercices 2017 à 2021. Une situation inquiétante qui nécessite « une vigoureuse action de restauration des capacités financières de l’hôpital dans le cadre d’un plan de redressement pluriannuel », précise son rapport.
En une cinquantaine de pages, celui-ci épingle l’établissement qui serait pris dans un processus de « cavalerie » financière et de « fuite en avant ». Malgré une hausse importante des dotations de l’ARS, les déficits d’exploitation n’ont cessé de s’aggraver. Quant à la capacité d’autofinancement (CAF) brute et à la CAF nette, elles se sont « significativement dégradées » durant la période contrôlée.
Creusement du déficit
Le rapport précise que le déficit s’est creusé entre 2017 et 2021 (de -3,4 à -7,5 millions d'euros), soit une progression de près de 120 %. Malgré une hausse d’activité jusqu’en 2019, les recettes ont progressé plus lentement (+ 24 %) que les dépenses (+ 26,5 %). Au point que le CH remplit désormais l’un des trois critères – déficit supérieur à 2 % des produits du compte principal, CAF nette inférieure à 2 % des produits du compte principal, insuffisance d’autofinancement – justifiant un plan de redressement financier (article D6143-39 du code de la santé publique).
Le niveau « d’impasse financière » est d’autant plus préoccupant que les allocations de l’ARS (compensation des pertes d’activité) doivent cesser à compter de 2023. Or, en raison du déficit chronique de l’établissement, son fonctionnement courant « n’est plus assuré que par le recours massif aux lignes de trésorerie », alerte la chambre régionale des comptes Normandie. Faute d’être soldées, elles exposent le CH à « de potentiels refus de financement pour l’avenir et, par voie de conséquence, à une incapacité à pouvoir continuer d’honorer ses dettes », met en garde le rapport.
Avenir sombre
Malgré un léger désendettement – l’encours de dettes est passé 42,1 à 37,4 millions d’euros entre 2017 et 2021 – les résultats déficitaires ont conduit à une détérioration du ratio d’indépendance financière de l’établissement. Si bien que la durée apparente de remboursement est passée de 5,5 ans en 2017 à 164 ans en 2021 !
L’avenir s’annonce sombre pour le CH, condamné à dégager des déficits annuels (entre 1 et 2,4 millions d’euros) pour la période 2022-2026, estime la chambre. En dépit d'emprunts massifs (respectivement 9 millions, 2,7 millions et 4 millions d'euros la première, quatrième et dernière année), la CAF nette devrait demeurer négative jusqu’en 2023.
Cerise sur le gâteau : la trésorerie nette devrait être « constamment négative », tandis que la variation du fonds de roulement sera « négative sur trois des cinq années » du plan global de financement pluriannuel (PGFP), projette le rapport.
Turnover permanent du management
Côté gouvernance, le pilotage stratégique de l’établissement apparaît « particulièrement défaillant », en l’absence de tout projet d’établissement (transformation de l’offre de soins) et de suivi opérationnel des contrats pluriannuels d’objectifs, depuis 2017. Quant aux diverses instances du CH et du GHT, elles ont été quasiment mises en sommeil pendant la crise sanitaire, ce qui a « fait obstacle à la bonne implication de la communauté médicale et non médicale dans les projets et la vie institutionnelle ».
« L’instabilité chronique » de l’équipe de direction a contribué aux difficultés d’organisation des instances et de pilotage des démarches de projets. Le rapport rappelle que la fonction de chef d’établissement a été occupée successivement par quatre directeurs en titre ou par intérim, entre début 2017 et fin 2021. D’autre part, six directeurs des ressources humaines (ou faisant fonction) et quatre directeurs des finances se sont succédé en l’espace de quatre ans.
Recommandations
Pour sortir de cette impasse financière, l’établissement a besoin de « retrouver de la stabilité et de la continuité dans ses équipes de direction », considère la chambre. Cela passera par un « fonctionnement effectif » des instances délibératives et consultatives du CH et du GHT, mais aussi par la structuration du fonctionnement des pôles d’activité.
Il faudra également définir, en concertation avec l’ARS, une « trajectoire pluriannuelle de réduction des déficits » pour faciliter le retour à l’équilibre financier. Le rapport recommande de structurer des filières de soins pour « renforcer la capacité du CH à attirer des patients et ajuster son offre capacitaire à son activité ». Mais aussi d’optimiser la chaîne de facturation, en partenariat avec le trésorier.
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