Au CHU de Toulouse, le versement des primes exceptionnelles en récompense de la mobilisation pendant la crise sanitaire laisse un goût amer à certains soignants.
En Haute-Garonne – département qui ne figure pas parmi les plus touchés par le Covid-19 – la prime maximale (1 500 euros) n'est pas généralisée mais 40 % des effectifs physiques peuvent quand même en bénéficier à l’appréciation de la direction de l’établissement, selon un décret sur les modalités d'attribution des primes publié mi-mai (puis étendu en juin). Les autres personnels touchent seulement 500 euros s’ils ont été présents 30 jours minimum du 1er mars au 30 avril. Voilà pour le schéma.
Deux poids, deux mesures
Mais la colère est montée dans les couloirs du CHU toulousain. En début de semaine, la CGT a révélé que cinq hauts cadres de direction – dont le DRH, son adjointe et le directeur des soins – bénéficieront de ce bonus maximum de 1 500 euros, un scandale pour certains syndicats de personnels.
« Nous avions demandé que l’ensemble des agents investis dans cette crise touchent 1 500 euros, ce qui a été refusé par la direction », assure Pauline Salingue, déléguée CGT et secrétaire au CHSCT de l’hôpital. Mais, ajoute-t-elle, « nous avons découvert de source sûre que des cadres de la DRH toucheront bien le montant maximal, quand des soignants et des personnels techniques, eux, ne toucheront que 500 euros, c’est scandaleux ». « Je ne dis pas que ces cadres administratifs n'ont rien fait pendant la crise, je dis simplement que la direction a fait le choix de s’attribuer elle-même cette prime maximum, sans se préoccuper des soignants qui ont été en première ligne et la méritent…», martèle la syndicaliste.
1 500 euros pour 34 % du personnel du CHU dès juin
Face à la colère montante, la direction du CHU s'est employée à jouer la transparence. Sur la méthode d'abord : « Avant d’arriver à une répartition (de la prime de 1 500 euros), nous avons beaucoup concerté avec les médecins chefs de pôle, les cadres supérieurs de pôles et cadres de santé de l’établissement, la CME, le comité technique, le directoire et les organisations syndicales dont seulement une sur les quatre représentées au CHU a accepté de débattre », a justifié Marc Penaud, directeur général du CHU mercredi 17 juin devant la presse.
Verdict ? Le CHU a élaboré des critères « maison » qui aboutissent aux chiffres suivants : sur les 15 350 personnels du CHU, exactement 12 940 sont éligibles à une prime selon les critères de présence du décret (les autres étant absents plus de 30 jours durant la crise sanitaire). Sur ces bénéficiaires, 4 432 personnes, soit « 34 % du personnel » toucheront 1 500 euros pour la paye de juin. « Parmi ces derniers, 78,5 % sont des soignants, 15 % des personnels techniques et 6,5 % des administratifs. Et finalement, seuls 5 cadres de direction sur 42 toucheront 1 500 euros. Moi-même et mes adjoints ne la toucherons pas… », souligne le directeur.
La direction de l’hôpital a prévu un ajustement au mois de juillet pour que les personnels des unités de soins de longue durée et les internes puissent également bénéficier de la prime maximum (permettant d'arriver au taux de 40 % des effectifs).
Au SAMU, un médecin sur deux renoncera à sa prime
Le CHU toulousain dit avoir beaucoup échangé avec ses homologues avant d’arrêter les critères d’attribution. « Des critères volontairement bas, pour que le plus grand nombre de soignants puissent y accéder », défend Marc Penaud. Sont éligibles les agents qui ont travaillé 38,30 heures (soit une semaine) dans une unité Covid ayant accueilli des patients pendant 45 jours d’hospitalisation.
Pour certains médecins chefs de service du CHU, le sentiment d’injustice des syndicats est déplacé. « Dès le départ, laisser les directeurs d’hôpitaux se débrouiller avec ce décret extrêmement vague et plafonné à 40 % des effectifs, était assez foireux et je vous assure que la décision a été prise de la façon la plus collégiale possible », recadre le Pr Vincent Bounes, chef du SAMU 31. « Il ne faut pas se tromper de cible, juge-t-il. Les gros salaires à l’hôpital restent les PU-PH et non les cadres de direction. D’ailleurs à ce jour, de nombreux médecins ont annoncé qu’ils renonceront à leur prime et feront des dons à des associations. Dans mon service au SAMU, ce sera le cas d’un médecin sur deux. »
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