Alors que la Haute Autorité de santé vient de publier ses premières recommandations pour aider les professionnels à ajuster leurs pratiques aux demandes des femmes à faible risque obstétrical, « Le Monde » présente un état des lieux de l'accouchement en France.
Les taux d'épisiotomie sont extrêmement disparates en France selon les maternités, révèle le quotidien du soir, qui s'est associé à la Fédération française des réseaux de santé en périnatalité (FFRSP) pour publier les chiffres de 425 maternités en 2016 (soit 82 % des établissements) - alors que l'enquête nationale périnatale (ENP 2016) ne rentre pas dans ce degré de précision. Le moteur de recherche du « Monde » permet même de retrouver ces indicateurs maternité par maternité.
En 2016, 157 000 épisiotomies ont été pratiquées en France, soit 20 % des 785 000 naissances, une moyenne nationale qui s'élève à 35 % pour les primipares, et fond à 10 % pour les accouchements suivants. Globalement, la tendance est à la diminution, puisque le taux était de 50,9 % en 1998, 47 % en 2002, et de 26,8 % en 2010. En 2005, le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) recommandait un usage restrictif de ce geste, en dessous des 30 %.
Mais les écarts varient de 0,3 % au centre hospitalier de Besançon, jusqu'à 45 % à la clinique des Emailleurs de Limoges.
Les Décodeurs ont calculé les taux d'épisiotomie par région, à partir des données du programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI). Ils sont les plus élevés en Ile-de-France (21,4 %) et dans le Centre-Val de Loire (20,9 %) et les plus faibles en Bourgogne-France-Comté (9 %) et en Guadeloupe (6,7 %), Guyane (3,7 %), et Mayotte (4,2 %). Ils avoisinent les 17 % en Auvergne-Rhone Alpes, Hauts-de-France, et Occitanie, les 18 % en Bretagne et Normande, et les 19 % en Nouvelle Aquitaine et Pays de la Loire. À noter, les données manquent en Provence-Alpes-Côte d'Azur et en Corse, les réseaux de santé en périnatalité ayant refusé de les transmettre.
Les Décodeurs ont aussi mis en lumière les taux de césariennes : de 15,72 % en Bourgogne-Franche-Comté, à 22,46 % en Ile-de-France, pour une moyenne nationale de 20,2 %, stable depuis 2010, comme le montrait l'ENP.
Décalage public/privé
Le recours à l'épisiotomie est plus important dans les cliniques privés. Elles ne sont que 25 % en France, mais sont surreprésentées (43 %) parmi les 39 maternités qui dépassent le seuil de 30 %. Le taux d'épisiotomie y monte à 31,07 % pour le premier enfant, vs 29,88 % dans le public, et à 10,23 % pour les accouchements suivants, vs 7,80 %.
De même, on observe davantage de césariennes dans le privé (22,13 %, et jusqu'à 51 % à l'hôpital américain de Neuilly) que dans le public (19,5 %), et davantage de péridurales (86,58 % vs 77,37 %).
Les raisons avancées sont multiples. L'organisation du travail est en cause : « Quand on manque de personnel, une épisiotomie peut faire gagner un petit peu de temps », dit au « Monde » Sophie Guillaume, présidente du Collège national des sages-femmes. Les cultures des praticiens expliqueraient aussi les différences entre les pratiques.
« La décision reste à l'entière appréciation du praticien dans le cadre de la prise en charge de sa patiente », confirme le groupe Ramsay GDS au « Monde », groupe dont les quatre cliniques de l'Ouest parisien dépassent 30 % de césariennes.
À l'Hôpital américain de Paris, le Dr Amina Yamgnane, responsable de la maternité, justifie auprès du « Monde » le taux de 51 % de césarienne par l’âge élevé des mères, la demande des femmes (dans 9 % des cas) et la volonté d’éviter des « accouchements acrobatiques par voie basse » qui augmenteraient les transferts néonataux.
Les inégalités d'accès aux soins jouent aussi, avec des taux de césariennes élevés qui sont liés à la précarité, à des grossesses peu suivies, des cas d'hypertension, ou le manque de sages-femmes pour réaliser des accouchements physiologiques.
En revanche, la taille des maternités, si elle augmente le recours à la péridurale, influe peu sur les taux de césarienne et d'épisiotomie.
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