Réactivité
Chez les patients en rémission de leur dépression est constatée une réactivité cognitive au moment précis où ils ressentent de la tristesse ; leur perception du monde s'assimile alors à la perception d'un sujet déprimé. La Mbct, nouvelle stratégie thérapeutique, est proposée dans ces situations comme stratégie de gestion du stress.
Dans les années 1990, le Pr Kabat-Zinn introduit le concept de « mindfulness » qu'il utilise en médecine psychosomatique. Il définit la pleine conscience comme l'attention particulière portée sur un objet au moment présent et sans émettre aucun jugement.
Ainsi, le maintien de l'attention sur un objet qui a été intentionnellement choisi pour son côté agréable permet de se dégager d'expériences désagréables. Contrairement à la démarche cognitive traditionnelle, le patient ne combat pas son discours intérieur dépressif, négatif, pour obtenir une analyse plus rationnelle de la situation. Ici, tout au contraire, le patient reste en contact avec ses pensées et les accepte.
Pour le patient en rémission totale
La thérapie de pleine conscience n'est pas indiquée chez les mêmes patients que la thérapie cognitive traditionnelle qui s'effectue, elle, en période dépressive, y compris si le patient est hospitalisé. La Mbct est réservée aux patients en rémission totale de l'épisode dépressif précédent et est contre-indiquée chez les patients aux idéations suicidaires, ayant une dépression bipolaire, une dépression avec addictions (alcool…) ou trouble grave de la personnalité.
Mbct est une démarche de prévention qui est enseignée sur huit semaines, puis au cours de six stages de rappel dans les mois suivants.
Les sujets ont à effectuer des tâches journalières à domicile avec l'aide d'un support enregistré ou écrit. Cette démarche se veut psychoéducative, apprentissage d'un outil que le patient peut utiliser seul pour réduire la probabilité de ses récidives dépressives.
Mbct a pour objectif d'aider le patient à repérer plus clairement ses modes de pensée. Cela suppose un entraînement régulier aux méthodes du « mindfulness », reposant sur des exercices de méditation, dont le but est d'apprendre au patient à repérer le moment où son humeur s'effondre.
Casser le lien
Cela permet de casser le lien existant entre l'humeur négative et la pensée négative secondaire. Le patient développe alors la capacité à se désengager de cette humeur triste, source de pensées négatives, mais aussi de stress associé.
Bon nombre de patients expliquent que cela apprend à être dans le moment présent sans avoir besoin de ressasser des idées concernant le passé ou encore le futur. Quand l'esprit vagabonde, on le ramène à un point central : l'apprentissage se fait alors en ramenant l'esprit soit à un point du corps (« body scan »), soit en ramenant au souffle (observation de l'inspiration et de l'expiration). Il s'effectue une prise de conscience que ce vagabondage de l'esprit ouvre la porte aux pensées et aux sentiments négatifs.
Gérer les mouvements de l'humeur
Gérer les mouvements de l'humeur est l'objectif de la deuxième partie du stage, de la cinquième à la huitième semaine.
Le patient poursuit ensuite sa démarche, y compris dans les périodes où il se sent mieux et au-delà.
Le mindfulness diffère des méthodes de méditation classique parce qu'il s'intègre dans un modèle psychologique de la dépression et de la vulnérabilité dépressogène.
Cette méthode a fait l'objet d'études contrôlées aux résultats encourageants, surtout chez le sujet ayant connu plus de trois récidives dépressives. Cette efficacité soulève différentes hypothèses : les ex-déprimés en rémission ruminent-ils moins ? Si tel est le cas, est-ce parce qu'ils développent des habiletés métacognitives ? Parce qu'ils pratiquent « mindfulness » plus régulièrement ? Notre compréhension aujourd'hui de ces mécanismes reste rudimentaire ; c'est pourquoi d'autres explorations sont nécessaires.
On ne peut pas prédire au départ quel aspect de la Mbct sera le plus utile pour le participant.
Pour reprendre la métaphore du jardinier qui effectue ses semis : pas plus qu'un autre, il ne sait combien de temps ils mettront pour germer, et cet événement n'est d'ailleurs pas sous son contrôle.
L'instructeur de la Mbct a déjà fait l'expérience de cette pratique puisqu'il s'est entraîné plusieurs mois avant d'instruire un petit groupe de patients, et poursuit quotidiennement ce cheminement.
Pour en savoir plus:
Z. V. Segal, J. M. G. Williams, J. D. Teasdale. Mindfulness-Based Cognitive Therapy for Depression : a New Approach to Preventing Relapse. The Guilford Press, New York, 2001.
Z. Segal, Mg Williams, J. D. Teasdale, Thérapie cognitive basée sur la pleine conscience pour la dépression, Ed. De Boeck, « Carrefour des psychothérapies », 2006.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature