Les conditions de mise en œuvre du pass sanitaire auprès de certains patients inquiètent des soignants qui redoutent des difficultés accrues d'accès aux soins ou l'isolement de certains malades. Le projet de loi anti-Covid, qui a été adopté définitivement le 25 juillet par le Parlement, prévoit en effet l'obligation du pass sanitaire pour les patients non urgents ou les visiteurs dans les établissements de santé et maisons de retraite. Déjà appliqué dans les lieux culturels et de loisirs depuis le 21 juillet, le pass sanitaire doit être étendu le 9 août. Entre-temps, le Conseil constitutionnel doit rendre jeudi sa décision sur la loi.
L'Ordre et les psychiatres alertent
À quelques jours de cette échéance, préalable à la promulgation de la nouvelle loi, l'Ordre des médecins s'inquiète "vivement des conditions de la mise en œuvre" du pass sanitaire dans les établissements de santé "qui ne doit pas priver des patients de soins".
"Comment accepter que des personnes ayant besoin de soins et qui s'adressent à l'hôpital puissent être refoulées parce qu'elles n'ont pas de pass sanitaire ?" s'interrogeaient pour leur part quelques jours avant des professionnels du monde de la psychiatrie dans une lettre ouverte adressée vendredi au premier ministre Jean Castex. "Plutôt qu'éloigner des patients des services de soins, il serait plus adapté, et fortement nécessaire, de favoriser les accompagnements vers les lieux de vaccination pour les patients les plus démunis sur le plan psychologique", suggèrent les signataires parmi lesquels figurent notamment l'Union syndicale de la psychiatrie, le syndicat des psychiatres des hôpitaux ou encore la Fédération nationale des associations d'usagers en psychiatrie.
De son côté, le Syndicat National des Médecins Hospitaliers (SNMH FO) avait invité jeudi à refuser "ces obstacles supplémentaires à la prise en charge des patients !" Et avant même le vote de la loi, le Collège des gynécologues avait demandé que "la prise en charge des grossesses puisse se poursuivre dans les conditions habituellement requises".
Au même moment, les directeurs d'Ehpad de l'AD-PA appelaient "à considérer les établissements pour personnes âgées comme des lieux de résidence et ainsi garantir aux personnes âgées qui y résident la possibilité de maintenir les liens familiaux, sociaux, relationnels… qui sont les leurs dans les mêmes conditions que pour tout Français".
La SFAP demande une exception en soins palliatifs
Enfin, les acteurs des soins palliatifs réclament de la souplesse pour les visites aux patients en fin de vie. Évoquant des précédents fâcheux avec restrictions drastiques de visites lors du premier confinement, pour des patients "qui sont morts seuls" et pour leur famille, la Société Française d’Accompagnement et de soins palliatifs (SFAP) insiste "sur l’importance de la présence des proches auprès des patients en fin de vie ou très gravement malades".
"Il ne faut pas que l’obligation de présentation du pass sanitaire, légitime par ailleurs dans un souci de protection de tous et particulièrement des plus fragiles, ne vienne de nouveau empêcher la présence des proches auprès des patients en fin de vie," insiste la SFAP. "En soins palliatifs et en fin de vie en général, le maintien du lien est essentiel, pour les malades et pour leurs proches," insiste la SFAP. Et de réclamer aux pouvoirs publics un régime particulier à ce type de services : "Pour cette raison, les situations de patients en soins palliatifs doivent constituer des exceptions au principe d’obligation de présentation du pass sanitaire pour se rendre auprès d’un proche à l’hôpital."