* Dernier des grands prix de l’automne, le prix Interallié a été décerné à Irène Frain pour « Un crime sans importance » (Seuil), qui figurait dans les sélections du Goncourt, du Renaudot et de l’Académie française. Toujours très suivie au long de sa quarantaine d’ouvrages, la lauréate, 70 ans, revient sur le décès de sa sœur aînée, il y a deux ans, quelques jours après avoir été agressée dans son pavillon de banlieue ; elle redonne vie à cette femme discrète de laquelle elle s’était éloignée et s’interroge sur l’inaction de la police et de la justice autant que sur le silence de sa famille.
* Le Goncourt des Lycéens est revenu à Djaïli Amadou Amal, originaire du Grand Nord Cameroun, pour « les Impatientes » (Emmanuelle Collas), finaliste du Goncourt. Ce livre polyphonique relie les destins tragiques d’une jeune fille de 17 ans arrachée à son amour pour être mariée à un homme riche, de la première épouse de ce dernier, et de la sœur de la jeune fille donnée à un cousin. Un roman universel né de l'expérience de l'auteure, puisque Djaïli Amadou Amal a été mariée de force à 17 ans au Sahel. Déjà lauréate du prix de la Meilleure Auteure africaine et du prix Orange du livre en Afrique 2019, elle est publiée pour la première fois en France.
* Le prix Femina des Lycéens a distingué Laurent Petitmangin pour son premier roman « Ce qu’il faut de nuit » (La Manufacture de livres), l’histoire d’un père qui élève seul ses deux fils. Ce roman d’hommes en devenir est une œuvre d’amour et d’interrogation lorsqu’un enfant s’éloigne des valeurs qu’on lui a transmises. L’auteur est lorrain, travaille chez Air France et écrit depuis une dizaine d’années.
* Le Renaudot des Lycéens a été décerné à Jean-René Van der Plaetsen pour « le Métier de mourir » (Grasset). Déjà distingué par plusieurs prix, dont l’Interallié en 2017 (« la Nostalgie de l’honneur »), l’auteur nous transporte dans un avant-poste dans le sud du Liban, en 1985, quand arrive un jeune Français idéaliste ; il va se confronter avec le groupe d’hommes chargés de protéger la frontière d'Israël des attaques du Hezbollah, dont un officier au lourd passé.
* Le prix Jean Giono a récompensé Franck Bouysse pour « Buveurs de vent » (Albin Michel), un récit singulier et puissant, à l’instar de ses précédents romans. Sorte de western de nos montagnes, l’histoire est celle de trois frères et sœur aux aspirations pures, qui grandissent tant bien que mal sous la férule d’un père brutal et d’une mère bigote, tandis qu’eux-mêmes, comme toutes les familles de la vallée, vivent sous la coupe d’un riche et tyrannique propriétaire.
Finalistes
* Finaliste du prix Goncourt, le philosophe et traducteur Maël Renouard, ex-plume de François Fillon, retrace dans « l'Historiographe du Royaume » (Grasset) l’histoire du Maroc, du protectorat à l'indépendance et jusqu’à l’ascension d’Hassan II au trône. Ancien condisciple du prince, devenu conseiller au cabinet du ministre de l’Éducation nationale, le narrateur est écarté sans raison par le jeune nouveau roi, avant d’être rappelé sept ans plus tard à la cour et nommé historiographe du royaume. Une histoire de grâces et de disgrâces, d’attrait et de fascination pour le pouvoir en même temps que de méfiance, de crainte et de félonies, racontée dans une langue très recherchée.
* Miguel Bonnefoy, qui est né en 1986 à Paris et a grandi au Venezuela et au Portugal, a – presque –- séduit les membres de l’Académie française avec ses talents de conteur. Après « le Voyage d’Octavio », finaliste du Goncourt du premier roman en 2015 puis « Sucre noir », finaliste du Femina, « Héritage » (Rivages) est une saga fastueuse qui mêle les trajectoires intimes à la grande histoire sur quatre générations, des coteaux du Jura ravagés par le phylloxéra à la terre chilienne, où renaîtra l’héritage familial, en passant par les geôles de Pinochet ou les tranchées de la Somme.
* Les jurés de l’Interallié sont – presque – tombés sous le charme du personnage mis en scène par Jean-Paul Enthoven dans « Ce qui plaisait à Blanche » (Grasset), une femme à la beauté absolue, aristocrate et veuve, aussi riche que cultivée. Une femme fatale que le narrateur, un éditeur épicurien, déchiffrera entre Capri, Paris et Rome, à travers le manuscrit écrit par l’amant de Blanche vingt ans plus tôt.
* Sélectionné pour les prix Femina, Médicis et Renaudot, « Une piscine dans le désert » (JC Lattès) est le quatrième ouvrage de Diane Mazloum, après « l’Âge d’or », couronné par le prix France-Liban en 2018. Une femme venue se reposer dans le village du sud Liban où habite son oncle, aux confins de la Syrie et d’Israël, et un homme qui a fait le voyage du Canada pour vendre le terrain familial et découvre le pays de ses aïeux, se rencontrent et apprennent à se connaître autour de la piscine qu’elle a fait construire illégalement sur le terrain inoccupé.
* Si l’unanimité s’est faite d’emblée dans le cercle du Renaudot, il n’en a pas été de même chez les Médicis, où Éric Reinhardt a – presque – remporté la majorité des suffrages avec « Comédies françaises » (Gallimard). Ce roman d’une grande richesse a pour héros posthume – l’auteur le fait mourir dès le début – un journaliste qui enquêtait sur la naissance d’Internet ; qui aurait pu, qui aurait dû être français et non américain, si un industriel bien en cour n’avait pas fait capoter les recherches de l’ingénieur visionnaire. Cet ingénieur informatique s’appelle Louis Pouzin, ses travaux portaient sur le datagramme, l’industriel omnipotent est le patron de la Compagnie Générale d’Électricité Amboise Roux et le président qui a enterré le projet Valéry Giscard d’Estaing.