Malgré des réunions bilatérales « cordiales » qui ont eu lieu toute la semaine dernière, les cinq syndicats de médecins libéraux joints par « Le Quotidien » – la FMF, le SML, la CSMF, MG France et Le BLOC – ont campé sur leurs positions.
À moins de quatre mois de leurs élections professionnelles décisives, ils refusent en l'état de signer un éventuel avenant 9 à la convention médicale avec la CNAM (portant sur les soins non programmés, les visites gériatriques, les spécialités et le numérique). Dévoilé lors de l'ultime séance de négociation, l'investissement total de 549 millions d'euros – un « paquet ambitieux de mesures » selon Thomas Fatome, DG de l'Assurance-maladie – reste « très insuffisant » pour les représentants syndicaux au regard des besoins et des enjeux d'attractivité du secteur libéral.
Travailler mieux
Rappelant l'effort financier « justifié » du gouvernement pour l'hôpital, les libéraux aspirent à une forme d'équité avec leurs confrères hospitaliers. Les accords salariaux du Ségur se chiffrent à plus de 8 milliards d'euros par an dès 2021 pour l'hôpital et concerneront près de deux millions de personnes dans les établissements et en EHPAD.
Pour la CSMF, seul centrale à avoir quitté la table des négociations avant la fin des discussions, « les sommes sur la table sont inacceptables et très déséquilibrées entre généralistes et spécialistes », analyse son président Jean-Paul Ortiz. « Les médecins ne demandent pas de gagner plus mais de travailler mieux avec un meilleur environnement », renchérit le néphrologue. Même détermination au SML où nulle signature ne sera possible sans augmentation massive de l'enveloppe. « J'ai demandé deux milliards d'euros pour la médecine de ville. Si on veut inciter les jeunes médecins à s'installer, il faut y mettre des moyens », soutient le Dr Philippe Vermesch, président du SML.
MG France réclame des investissements supplémentaires pour ne pas donner aux généralistes le sentiment de « saupoudrage ». « Le système de santé est malade. On a mis des milliards sur l'hôpital et on néglige l'ambulatoire avec des soignants indispensables », regrette aussi le Dr Philippe Cuq, coprésident du BLOC.
Système illisible et complexe
Pour les syndicats, l'avenant 9 manque à la fois de souffle et de lisibilité.
C'est le cas pour la prise en charge des soins non programmés où la rémunération de 85 euros par heure pour les médecins régulateurs libéraux est jugée « peu attractive ». Même critique pour les effecteurs des consultations non programmées : les syndicats appellent la caisse à abandonner les forfaits trimestriels progressifs à l'activité jugés « illisibles » au profit d'un système « simple » avec une rémunération majorée pour chaque acte réalisé.
Sur les visites gériatriques, le dispositif est jugé également trop complexe et pas assez ambitieux pour doper les soins à domicile. « Il y a plusieurs tarifs, des effets de seuil. Les médecins ne vont pas s’y retrouver », avance le Dr Jacques Battistoni, président de MG France. La FMF préconise « un tarif unique à 70 euros, soit une visite longue pour tous les patients complexes », suggère le Dr Corinne Le Sauder, présidente du syndicat.
Le SOS des pédiatres
Même goût de trop peu pour les cliniciens au bas de l'échelle des revenus (pédiatres, psychiatres, neurologues, gynécologues médicaux, endocrinologues, rhumatologues). Le Syndicat national des pédiatres français (SNPF) a alerté la semaine dernière sur le risque de disparition programmée de cette spécialité libérale.
Quant aux spécialités sur plateaux techniques lourds, l'évolution des contrats de modération tarifaire (OPTAM et OPTAM-CO) est jugée loin du compte pour faire face à l'évolution du coût de la pratique. « On voudrait une majoration de +8 % sur le taux K, la caisse propose +1 % », signale le Dr Philippe Cuq.
Alors que la CNAM espérait une signature en décembre, comment va-t-elle sortir de l'impasse ? Constat de blocage, prolongations des groupes de travail, nouveaux arbitrages financiers : la balle est désormais revenue dans le camp du gouvernement, qui présentait volontiers ce round libéral comme le « Ségur ambulatoire ».