A L'IMAGE des hommes, certains arbres et arbustes se plaisent à voyager, surtout quand on leur offre de bonnes conditions d'hébergement. Niché au cœur du Loiret, à Nogent-sur-Vernisson (20 km au sud de Montargis), l'Arboretum national des Barres regroupe, sur 50 hectares, tous les attributs d'une bonne maison d'hôtes : grande diversité de sols, sableux, limoneux sur argiles à silex et calcaires. Le climat oscille entre la tendance océanique du Val-de-Loire et celle plus continentale de l'est du bassin parisien. La pluviométrie, 700 mm en moyenne annuelle, finit de faciliter l'acclimatation d'espèces originaires du monde entier et permet le développement de collections botaniques.
Depuis 130 ans, 8 500 arbres et arbustes, souvent rares et insolites, ont été introduits à l'Arboretum des Barres, faisant du site l'une des plus riches collections de végétaux ligneux d'Europe et l'une des dix premières d'Europe. Il est composé de trois collections botaniques. La Collection géographique (les arbres sont agencés selon leur origine géographique) est la plus ancienne. Créée en 1873, elle regroupe sur 9 hectares les sujets les plus âgés (plus que centenaires) et les plus spectaculaires. On y croise des séquoias de Californie, géants de 30 à 50 mètres, un immense hêtre pourpre, qui vire au fil des mois du vert à l'orange cuivré, un impressionnant ginkgo biloba ou encore un érable à peau de serpent. Il y a aussi l'étrange araucaria, cet arbre chilien recouvert de feuilles triangulaires si piquantes qu'aucun animal ne peut l'escalader, d'où son surnom de « désespoir des singes ».
La Collection systématique, où les arbres sont disposés selon leur place dans la classification botanique, s'étend sur 11 hectares. Entre les glycines, magnolias, rhododendrons et autres chèvrefeuilles, on y découvre le davidia ou « arbre aux mouchoirs », qui se couvre en mai d'innombrables bractées blanches ressemblant à des mouchoirs ou à des nénuphars. On peut sentir l'arbre à caramel dont les feuilles exhalent des senteurs de pain d'épice.
La Collection ornementale, enfin, comprend tous les arbres et arbustes insolites : hêtres tortueux, charmes à feuilles de chêne, cèdres et séquoias pleureurs ou genévriers rampants.
Un précurseur de la génétique.
C'est au passionné Philippe-André de Vilmorin que l'on doit l'Arboretum des Barres. Considéré comme le précurseur de la génétique, Philippe-André de Vilmorin acquiert le domaine des Barres (283 ha) pour en faire un condensé de peuplements d'arbres. Il se consacre essentiellement aux pins (Pinus sylvestres, laricio, pinaster), susceptibles de fournir des bois de mâture, et aux chênes américains. A sa mort, en 1862, l'administration forestière implante alors une pépinière centrale ainsi qu'une école de sylviculture.
Aujourd'hui, l'ensemble du domaine des Barres est géré par l'Ecole nationale du génie rural des eaux et des forêts (Engref), qui a la charge de son entretien et de sa valorisation à des fins scientifiques, pédagogiques, économiques et touristiques. L'Engref apporte fréquemment son concours à des études portant sur l'identification ou la classification botanique d'espèces ligneuses. Ces études sont conduites soit directement par l'Arboretum, soit en collaboration avec d'autres partenaires scientifiques privés et publics comme l'Institut national de la recherche agronomique (Inra), le Centre national de recherche scientifique (Cnrs) ou l'Office national des forêts (ONF).
Au fil des ans, l'Arboretum a permis de mieux cerner le comportement et l'adaptation d'espèces introduites : certaines ont été largement diffusées dans les parcs et jardins, alors que d'autres ont fait l'objet de production de pieds mères destinés aux horticulteurs et professionnels. Pour faire face à l'appauvrissement de ses collections dû au vieillissement naturel ou à des excès climatiques, l'Arboretum introduit chaque année de nouveaux arbres ou arbustes à partir de sources génétiques le plus souvent sauvages.
Ce conservatoire génétique a parallèlement fait apparaître une grande diversité des espèces vivantes associées. Malgré certains facteurs défavorables comme la fréquentation touristique ou l'absence de lisières et de buissons, l'Arboretum rassemble un nombre très élevé d'espèces d'oiseaux forestiers et d'insectes. Par ailleurs, il est devenu indispensable aux amateurs de champignons : on y compte environ 400 espèces, dont certaines sont très rares en France.
Education à l'environnement.
Autrefois réservé aux seuls spécialistes, l'Arboretum des Barres, qui reçoit aujourd'hui plus de 20 000 visiteurs par an, est devenu un site touristique et pédagogique en matière d'éducation à l'environnement. « La nature t'appelle ; apprends à observer », disait Voltaire. Les animateurs de l'Association de découverte et d'initiation à l'arbre et à la forêt (Adiaf), chargée de l'accueil du public, s'emploie à faire découvrir « l'extraordinaire diversité du végétal » grâce à des approches pédagogiques « ludiques et sensorielles » développées notamment en direction du jeune public (près de 5 000 scolaires par an). L'association propose notamment, pour les 7 à 77 ans, de « l'accrobranche » pour prendre de la hauteur et grimper jusqu'à 40 mètres dans des séquoias.
« Au contact de l'arbre, vous apprendrez à le connaître et à le respecter, précise l'association. Vous pourrez alors grimper en toute confiance dans des arbres de différentes tailles et à toutes les hauteurs » et ressentir l'ivresse des cimes. Chiche.
Arboretum national des Barres, 45290 Nogent-sur-Vernisson, tél. 02.38.97.62.21, www.coeur-de-france.com/arboretum-des-barres.html.
Les plantes médicinales de l'arboretum des Barres
• Eucommia ulmoides (Eucommiacée) : c'est l'arbre à latex le plus rustique en climat tempéré. Cette espèce est employée en Chine pour lutter contre certains types de cancers.
• Piptanthus nepalensis : arbuste himalayen de la famille des leguminosae à feuilles persistantes et à fleurs jaunes. Il est cultivé à grande échelle au Texas pour ses qualités anticancéreuses.
• Tripterygium wilfordii : arbuste sarmenteux originaire du sud de la Chine, du Japon, du nord du Myanmar et de Taïwan.
Il produit de jolis fruits rouges et renferme aussi des substances antitumorales.
• Magnolia officinalis : magnolia macrophylle originaire du sud de la Chine et n'existant plus qu'en culture et en jardins
botaniques. Son écorce était pelée pour la pharmacopée locale.
• Cornus officinalis : arbuste originaire du Japon et de la Corée. Il possède une superbe écorce qui s'exfolie en plaques orangées et de gros fruits rouges comestibles. Ses qualités sont appréciées par la pharmacopée traditionnelle asiatique.
• Ginkgo biloba ou arbre aux 40 écus : originaire de Chine où il survit depuis le tertiaire, c'est une espèce primitive qui est en voie de disparition dans son milieu naturel. Planté par les moines bouddhistes autour des temples en Chine puis au Japon, il est introduit en Europe en 1727. Depuis quelques décennies, son utilisation comme arbre urbain a fortement augmenté grâce à sa résistance exceptionnelle à la pollution. Il est aussi cultivé, de manière industrielle, pour ses vertus médicinales et cosmétiques.
Ushuaïa prête main forte aux arboretums
Au lendemain des tempêtes de décembre 1999, la marque d'hygiène et de soins Ushuaïa a décidé de s'engager aux côtés de l'Office national des forêts (ONF) pour créer un réseau de forêts préservées, représentatives de la biodiversité forestière : les arboretums. Après avoir restauré et enrichi en nouvelles essences les arboretums de la Jonchère (Limousin) en 2001, 2002 et 2003, de Ripaille (Rhône-Alpes) en 2002 et 2003, Ushuaïa sera à nouveau partenaire de l'ONF en 2004 pour restaurer et reboiser l'arboretum de Pezanin (Saône-et-Loire), qui possède l'une des plus belles collections d'essences forestières de France. Selon les premières estimations de l'ONF, trois années seront nécessaires pour tout restaurer.
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