Difficile de parler de kleptomanie quand les seules publications dont on dispose sont des séries limitées d'expertises psychiatriques imposées après arrestation pour vol. La majorité des kleptomanes n'est pas surprise en flagrant délit ou bien ils payent ce qu'ils ont volé aux agents de sécurité, ce qui leur permet de continuer à voler sans en informer spontanément leur entourage ou leur médecin.
D'après les seules expertises donc, la kleptomanie se définit dans la classification américaine des maladies mentales (DSM IV) comme un trouble du contrôle des impulsions avec :
- impossibilité de résister à voler des objets inutiles (objet dérobé ni pour un usage personnel ni pour la valeur commerciale) ;
- sensation croissante d'excitation avant de commettre le vol puis de plaisir, soulagement, au moment de l'acte.
La définition précise, par ailleurs, que le vol n'est pas perpétré en réaction à la colère ou avec l'aide d'autrui et qu'il n'obéit pas à des idées délirantes. De plus, il ne peut pas systématiquement s'expliquer par une conduite antisociale, un trouble des conduites ou un épisode maniaque.
Distinguer, la principale difficulté
Pour les psychiatres consultés à la suite d'une procédure judiciaire, la principale difficulté consiste à distinguer les « vrais voleurs » des kleptomanes qui, d'après une série anglo-saxonne, seraient en cause dans 25 % des arrestations pour vol ; d'autant que certaines personnes tentent de se disculper en affirmant qu'elles sont kleptomanes. L'absence de préparation du vol et le caractère inutile des objets dérobés plaident en leur faveur.
Dans les séries publiées, on retrouve une prédominance féminine, avec un âge moyen inférieur à celui des hommes (35 versus 50 ans) qui pourrait résulter d'un biais de recrutement, les femmes étant plus souvent soumises à une expertise psychiatrique.
La plupart des kleptomanes éprouvent un important sentiment de culpabilité avant ou après le vol et avouent une forme de dépendance proche de celle de l'alcool. Beaucoup souffrent d'un trouble du comportement alimentaire (24 % des boulimiques ont des pulsions kleptomaniaques) ou de dépression ; le vol agirait alors de façon bénéfique sur les symptômes. La « consolation contradépressive » est d'ailleurs la principale cause avancée pour expliquer la kleptomanie. Les autres causes seraient les troubles de la personnalité avec un faible niveau de socialisation, les tendances à l'évitement de la monotonie, les conduites à risque, les désinhibitions. Les psychanalystes y voient les conséquences d'un sentiment d'abandon dans l'enfance et surtout la satisfaction d'une pulsion sexuelle.
Quant au traitement, s'il y a lieu d'en prescrire un, il fait appel aux thérapies comportementales centrées sur le vol. Les antidépresseurs sérotoninergiques auraient également un effet bénéfique.
Entretiens de Bichat 2001, N. Feuché, M. Lejoyeux, J. Adès, hôpital Louis-Mourier, Colombes.
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