LE DERNIER RAPPORT de la Cour des comptes sur la Sécurité sociale (« le Quotidien » d'hier et Quotimed.com) a porté un nouveau coup à la politique conventionnelle en s'en prenant à la fois à l'assurance-maladie, aux médecins libéraux et au gouvernement jugé trop interventionniste et imprudent en la matière.
Les magistrats de la rue Cambon ont en effet analysé les causes du dépassement de l'ONDAM (objectif de dépenses) à hauteur de 3 milliards d'euros en 2007, année marquée par un plan de redressement réclamé pour la première fois par le comité d'alerte. Non seulement les sous-objectifs de dépenses ont été fixés de manière «artificielle», estime la Cour (avec un ONDAM «trop volontariste pour les soins de ville et trop laxiste pour les soins hospitaliers»), mais rien n'a été fait pour éviter de dépasser l'ONDAM, celui-ci étant «déconnecté des négociations conventionnelles» avec les professions de santé. «Les marges de manoeuvre des partenaires conventionnels ont été excessives, faute d'encadrement préalable par l'ONDAM et d'un suivi rigoureux a posteriori », affirme le rapport. Ainsi, «l'État approuve les accords sans toujours en connaître l'impact financier, a déploré Philippe Séguin, premier président de la Cour des comptes. Parfois même, il intervient dans le domaine des partenaires conventionnels pour inciter les caisses à accorder des majorations d'honoraires. Dans ces conditions, il ne faut pas s'étonner que l'ONDAM ne soit pas respecté».
En fait, le gouvernement n'a pas attendu la parution du rapport de la Cour des comptes pour s'inspirer des recommandations de celle-ci et justifier certaines mesures de son projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2009.
La Cour des comptes se garde bien cependant de préconiser un retour à la maîtrise comptable. Le système des lettres clés flottantes était «inopérant et juridiquement contesté», a rappelé Rolande Ruellan, présidente de chambre, lors d'une conférence de presse.
« Acharnement ».
Quoi qu'il en soit, le leader de la Confédération des syndicats médicaux français (CSMF) a violemment réagi au verdict de la Cour des comptes. Interrogé par l'AFP, le Dr Michel Chassang a dénoncé le «véritable acharnement» de la Cour des comptes contre les médecins libéraux. Le rapport contient, selon lui, des «âneries» sur la réalité des revalorisations tarifaires et s'inscrit en droite ligne des multiples «mesures répressives à l'encontre des seuls médecins libéraux», prises ou envisagées en ce moment par le gouvernement et l'assurance-maladie.
Du côté de MG France, «premier syndicat de médecins généralistes», on affirme «faire face au dérapage des dépenses de santé confirmé par la Cour des comptes». Dans son communiqué, MG-France rappelle ses propositions pour sortir de cette «spirale» qui creuse le déficit, majore les prélèvements sociaux et aboutit à une «diminution de la prise en charge». Le syndicat préconise de «développer des protocoles de prise en charge des patients en fonction des pathologies, (de) réguler le flux d'entrée et de sortie des hôpitaux, (et de) renforcer le premier niveau de recours aux soins sur l'ensemble du territoire».
La Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) a elle aussi plaidé non coupable dans la foulée en défendant son bilan conventionnel, chiffres à l'appui. Elle souligne que les revalorisations tarifaires «ont connu une évolution très modérée», avec une «hausse tarifaire moyenne annuelle de 1,3%/an» sur la période 2004-2008. Quant à la maîtrise médicalisée des dépenses, elle a permis, selon la CNAM, d'engranger «1,4milliard d'euros d'économies sur la période 2005-2007». Une façon de présenter la politique conventionnelle sous un autre angle de vue.
> AGNÈS BOURGUIGNON
Pour consulter le rapport 2008 de la Cour des comptes sur la Sécurité sociale : http://www.ccomptes.fr/CC/ Sommaire-20.html.
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