ENTRE LE DÉBUT des années 1960 et la décennie 1990, l'homme occidentalisé a perdu près de deux heures de sommeil quotidien, dont la durée est passée de 8 h 30 à 6 h 30-6 h 45, selon des études anglo-saxonnes. Les loisirs, la télévision, l'Internet et les temps de transport qui s'allongent ont perturbé les rythmes biologiques. Dans ces conditions, la sieste n'est pas un luxe. Il ne s'agit pas de minutes volées à l'activité professionnelle ou à d'autres tâches. Les médecins spécialistes la considèrent comme «un moyen de gérer sa vigilance pour se recharger physiquement, évacuer son stress, et, donc, améliorer ses capacités et son état de bien-être». Il ne faut «plus avoir avoir honte d'être somnolent». Quinze minutes de répit pour la santé, ça ne coûte rien, et ça rapporte.
Pour la 7e Journée nationale du sommeil, le 28 mars, la population est invitée à se mettre en RTS, récupération de temps de sommeil, entre 13 h 45 et 14 heures, et, surtout, à en prendre l'habitude chaque jour si cela lui convient.
Au volant, 30 min de « récup » ou un double café.
Sur les routes, un accident sur quatre est lié à la somnolence. Or il existe des comportements préventifs à adopter avant de sortir la voiture du garage. Une enquête du Réseau (national) éveil, sommeil, attention, transport (Resat), publiée en juin 2006 dans la revue américaine « Annals of Internal Medicine », en témoigne. Financée par le ministère des Transports, elle porte sur 12 automobilistes observés sur autoroute, assistés chacun d'un copilote chargé de consigner les franchissements de ligne jaune. On les a fait conduire durant 4 périodes de 2 heures dans les conditions suivantes : de jour ; et de nuit, entre 3 heures et 5 heures, soit après avoir bu un décaféiné (placebo), soit après un double café (200 mg de caféine), soit après une sieste de 30 minutes. La nuit, 75 % des conducteurs sous café (double expresso) et 66 % des automobilistes qui font un somme de 30 minutes conduisent «comme pendant la journée». «La caféine est un moyen d'éveil très puissant; quant à la sieste, elle annule la pression du sommeil chez les personnes l'ayant diminué de manière drastique», commente pour « le Quotidien » le Pr Pierre Philip, chargé de la branche sommeil du Resat pour le Centre national de la recherche scientifique et la faculté de médecine de Bordeaux, le volet attention relevant de l'Institut national de recherche et d'étude sur les transports et leur sécurité (Inrets). A chacun de savoir dans quelle catégorie il se place. Pour les uns, la dose de café «assez forte» fera l'affaire, sachant que la sieste «les plonge dans un état vaseux» ; pour les autres, la sieste vaut «un coup de fouet» que les 200 mg de caféine ne sauraient leur procurer.
On a su développer des politiques de prévention visant à réduire les accidents routiers dus à l'alcool et à la vitesse, il serait temps de mettre en application ce que l'on sait en matière de somnolence et de récupération par la sieste et le café, laisse entendre le Pr Philip, coordonnateur, avec le Pr Jaques Paty, de la Clinique du sommeil (1975) du CHU de Bordeaux. > PHILIPPE ROY
Quarante centres du sommeil ou structures assimilées ouvrent leurs portes à cette occasion. Informations sur le site : www.institut-sommeil-vigilance.org.
Les Français sont fatigués
Un Français sur trois est fatigué et cette fatigue est souvent liée au manque de sommeil, selon une enquête réalisée par TNS Healthcare* pour l'Institut national du sommeil et de la vigilance, à l'occasion de la Journée du sommeil. Ainsi, 53 % des Français déclarent « avoir éprouvé le besoin de s'allonger la journée pour se reposer », au cours des six derniers mois ; 17 % sont somnolents et s'endorment dans de multiples circonstances. Le manque de sommeil est cité comme première cause de fatigue par 38 % des personnes interrogées, et par 45 % des personnes fatiguées et 48 % des individus somnolents. Il est suivi par les conditions de travail.
Pour les Français somnolents ou fatigués, le début d'après-midi serait le moment où la fatigue est la plus grande, alors que c'est la soirée qui est le moment où la fatigue se fait le plus sentir pour l'ensemble des personnes interrogées. L'irritabilité et le manque d'énergie sont cités comme conséquences principales de la fatigue, respectivement par 30 et 29 % des personnes interrogées. Plus d'un Français sur quatre (28 %) déclare souffrir d'au moins un trouble du sommeil, une proportion identique à celle de l'enquête réalisée en 2006. Seulement 19 % d'entre eux sont pris en charge. Le trouble majeur est l'insomnie (18 %), tandis que 5 % déclarent souffrir du syndrome des jambes sans repos et 5 % du syndrome d'apnée du sommeil.
* Enquête réalisée par téléphone en février auprès d'un échantillon représentatif de 1 012 personnes de 15 ans et plus.
Quand Bordeaux s'éveille
Dans la métropole aquitaine, la 7e Journée nationale du sommeil donnera lieu à diverses manifestations, à l'initiative de la faculté, de l'Association girondine pour la prévention du handicap dû aux troubles du sommeil et de la vigilance et au Réseau de prise en charge des pathologies du sommeil et de la vigilance*. Le 28 mars, un colloque « Sommeil et accidentologie ; longues veillées, journées gâchées »(Prs Paty et Philip) se tiendra, de 15 heures à 19 heures, à l'université Victor-Segalen-Bordeaux-II. Un atelier et une conférence auront lieu de 14 h 30 à 17 h 30, à la polyclinique du Tondu. La Maison des associations santé sommeil sera inaugurée au Pavillon de la Mutualité, à 10 h 30, puis, place de la Victoire, aura lieu de 13h 45 à 14 heures une sieste pour soutenir les actions sur la santé au travail. De son côté, l'université Victor-Segalen propose jusqu'au 30 mars à l'exposition « Dormir et vivre, remettre les pendules à l'heure ».
* Tél. 05.57.57.10.10 et 06.63.96.75.53.
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