Parce que les honoraires généralistes sont « sinistrés » (la consultation vaut 115 F depuis avril 1998 et la visite est à 135 F dans la plupart des villes depuis 1994) et que « les conditions d'exercice de la médecine de famille connaissent une dégradation préoccupante », l'Union des nationale des omnipraticiens français (UNOF), majoritaire, a décidé de lancer une série d'actions de contestation avec une revendication unique : des honoraires « décents ».
Cette initiative n'est pas lancée au hasard du calendrier : le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2002 (PLFSS) est présenté en Conseil des ministres aujourd'hui même et il sera examiné par les députés du 23 au 26 octobre.
Dès aujourd'hui, l'UNOF invite les médecins à « ne plus effectuer de visite à 135 F ».
Concrètement, à l'exception des situations où la visite à domicile est « manifestement justifiée », soit en raison de l'état clinique du patient (invalidité) soit parce que la réglementation en vigueur le prévoit (visite dans le cadre du maintien à domicile des personnes âgées), les médecins généralistes sont appelés à ne répondre aux visites à domicile « que dans l'urgence ». Cela concerne les visites à la demande explicite du Centre 15 ou à la demande « expresse et motivée » des patients, ce qui donne lieu dans les deux cas à une majoration forfaitaire d'urgence (voir encadré). Dans tous les autres cas - c'est-à-dire pour les visites dites « de confort », l'UNOF invite les médecins soit à se déplacer en demandant une majoration tarifaire pour exigence particulière du patient (DE), soit à demander au patient de venir au cabinet. « Il est inadmissible et extrêmement choquant que les généralistes se déplacent pour 20 F (c'est-à-dire la différence entre le tarif de la visite et celui de la consultation) », résume le Dr Michel Chassang, président de l'UNOF, qui dénonce le « scandale » et souhaiterait que le tarif de la visite soit porté à 30 euros (197 F).
Dans le même registre, le syndicat appelle les médecins généralistes à utiliser « largement » la procédure du dépassement exceptionnel d'honoraires (DE), non seulement pour les visites mais aussi pour les consultations, notamment pour « les actes réalisés en dehors des heures d'ouverture habituelle du cabinet ». Cette double consigne syndicale immédiate (sur les visites et le « DE ») n'est toutefois que le premier étage de la fusée.
pour le C à 20 euros
D'ores et déjà, l'UNOF a déposé un préavis de « grève illimitée » des gardes de nuit (de 20 h à 8 h), à compter du 15 novembre 2001. Une consigne d'autant plus grave (c'est la première fois que ce mot d'ordre est lancé) qu'elle intervient dans un contexte de regain de tension dans les services d'urgence des hôpitaux et dans les cliniques. « Le répondeur du médecin dirigera les patients vers les centres 15 », déclare le Dr Chassang. Au niveau départemental, l'Ordre sera systématiquement informé et les préfets devraient, en cas de besoin, réquisitionner un certain nombre de médecins généralistes pour assurer les tours de garde. « Si on nous annonce dans le mois qui vient que la valeur de la consultation de base (le C) est immédiatement portée à 20 euros (131 F au lieu de 115 F à l'heure actuelle) , on lèvera ce préavis », précise le président de l'UNOF. En revanche, si le gouvernement ne fait aucun geste, l'UNOF envisage de durcir le mouvement en étendant l'appel à la grève des gardes « aux week-ends et jours fériés ».
D'autres organisations de généralistes donneront-elles les mêmes consignes ? Fait significatif, le Syndicat des médecins libéraux (SML) a mis à l'ordre du jour de sa prochaine assemblée générale, le 20 octobre, l'hypothèse d'une grève des gardes de nuit. Quant à la structure d'urgentistes « SOS médecins », elle n'exclut pas non plus cette éventualité qu'elle examinera en assemblée générale le 18 octobre. Si « SOS-Médecins », qui assure la permanence des soins de nuit dans près de 80 % des zones urbaines, décidait de s'associer au préavis de grève des gardes, le mouvement prendrait évidemment une autre ampleur.
L'UNOF se défend aujourd'hui de vouloir « prendre la population en otage ». Dans une lettre adressée à Elisabeth Guigou, le Dr Chassang évoque « le désarroi d'une profession à laquelle notre société doit beaucoup ».
Visites : les différents tarifs
Considéré depuis plusieurs années comme sous-évalué, le tarif de la visite (110 F + indemnités de déplacement) a obtenu quelques coups de pouce financiers ces derniers mois. Mais les majorations octroyées correspondent à des situations très précises.
La première, d'un montant de 125 F, correspond à la « visite d'urgence » dans la mesure où elle interrompt les consultations du médecin et l'oblige à quitter immédiatement son cabinet (à la demande du centre 15 ou à la demande « expresse et motivée » du patient). La cotation de cette visite d'urgence est donc de V (110 F) + MU (125 F) + ID (25 F ou 35 F selon les villes). La valeur de l'indemnité de déplacement (ID) varie en effet légèrement d'une agglomération à l'autre. A Paris, Lyon et Marseille, elle est de 35 F contre 25 F dans les autres villes ou communes non agglomérées. Au total la valeur de cette visite d'urgence est donc de 260 ou 270 F.
La seconde majoration, d'un montant de 60 F, rémunère la visite à des personnes de plus de 75 ans en affection de longue durée (ALD). Il s'agit d'une majoration de maintien à domicile (MMD). Le tarif total de la visite est alors de 195 ou 205 F.
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