L ES parents des enfants fréquentant l'école maternelle Franklin-Roosevelt de Vincennes (Val-de-Marne) sont sur le qui-vive. L'hospitalisation, en février dernier, d'un enfant scolarisé en petite section de maternelle pour une tumeur de la parotide vient ranimer leurs inquiétudes puisqu'il s'agit du quatrième cas de cancer détecté, en six ans, chez ces élèves.
Inaugurée en septembre 1989, l'école maternelle est construite sur le site d'une ancienne usine Kodak qui fabriquait des pellicules pour photo et cinéma, et dont la fermeture remonte à 1986.
Les deux premiers cas diagnostiqués, en 1995 et l'année suivante, étaient une leucémie et un cancer des testicules. C'est à partir du troisième cas, une autre leucémie découverte en 1999, que l'alerte a été donnée. La direction départementale des Affaires sanitaires et sociales (DDASS), avec l'appui méthodologique de l'Institut national de veille sanitaire (INVS), élabore un rapport - à partir d'analyses du sol et de l'atmosphère du lieu en question - dont les conclusions sont approuvées, en juin 2000, par un comité d'experts composé de trois épidémiologistes, d'un pédiatre spécialisé en cancérologie et d'un toxicologue.
La radioactivité n'est pas en cause
Les experts confirment alors que « les enfants ne sont pas soumis à une exposition environnementale plus élevée que celle qui a été mesurée dans le cadre d'une étude effectuée en 1992 par le laboratoire d'hygiène de la Ville de Paris concernant les écoles de la région parisienne ». Par ailleurs, disent-ils, « il n'a pas été mis en évidence de surexposition à des produits actuellement connus comme potentiellement cancérigènes, liée ou non à l'activité industrielle antérieure ». En outre, selon eux, la durée brève de séjour des trois enfants malades dans l'école « rend peu vraisemblable l'hypothèse d'une cause liée à l'environnement scolaire ». Enfin, s'ils reconnaissent que les deux types de maladie (leucémie et tumeur des testicules) sont rares, ils précisent toutefois que leurs caractéristiques anatomopathologiques ainsi que l'âge de survenue des trois cas sont classiques.
Henri Pezerat, ancien chercheur en toxicologie au CNRS, exprime malgré tout des doutes quant à la méthodologie retenue par les auteurs du rapport : des analyses effectués par un laboratoire indépendant révèlent la présence de cadmium 109, un élément radioactif artificiel.
En réponse, la préfecture du Val-de-Marne décide d'effectuer de nouvelles investigations environnementales et épidémiologiques par l'INERIS (Institut national de l'environnement industriel et des risques) et l'OPRI (Office de protection contre les rayonnements ionisants). « Je suis incapable de dire s'il existe ou non un lien entre les pathologies développées par les enfants et les facteurs environnementaux, assure le président de l'OPRI, Jean-François Lacronique. En revanche, ce que je peux dire, c'est que la radioactivité du site ne peut être invoquée. La terre de l'école étant suspectée de pollution, nous avons effectué neuf prélèvements (dont deux en dehors de l'établissement scolaire) de terre affleurante afin d'en vérifier la radioactivité. » Or, aucune trace de cadmium 109 n'est enregistrée. « Il est extrêmement facile de se tromper dans les dosages, explique Jean-François Lacronique, et de confondre l'activité du cadmium 109 avec la radioactivité naturelle, qui n'est d'ailleurs pas plus élevée dans cette école qu'ailleurs en Ile-de-France », confirme-t-il.
Le problème de la radioactivité réglé, reste celui de la présence de produits toxiques potentiellement cancérigènes (phorone, isophorone, et phtalates notamment). « Cette affaire est probablement le fait du hasard, estime Henri Pezerat, mais il faut faire quelques recherches complémentaires. » Ce que promet la préfecture. Car la découverte du quatrième cas de cancer, cette année, a accru la suspicion.
En attendant les résultats de ces analyses complémentaires (dont les résultats seront communiqués d'ici à quatre semaines) la préfecture indique que « la confrontation du registre national des leucémies avec la liste des 975 élèves ayant fréquenté l'école depuis son ouverture, n'a pas permis de retrouver d'autres cas de leucémies hormis les deux déjà identifiés ».
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