Un travail expérimental sur le virus de l'immunodéficience féline (VIF) pourrait fournir des éléments de compréhension de la démence accompagnant les infections par le VIH. Michael Podell et coll. (Ohio, Etats-Unis) viennent de montrer que dans des cellules infectées par le VIF, la multiplication virale peut être quinze fois plus importante lorsque la préparation est mise au contact de méthamphétamine.
Au cours de l'expérimentation, les cellules ont été soumises à ce traitement pendant deux semaines. Ce qui correspond, selon les auteurs, à une exposition du même ordre que la concentration plasmatique d'un utilisateur régulier. Si les travaux, publiés par le « Journal of Neurovirology », se confirment, ils permettraient d'appréhender le mécanisme par lequel les lentivirus (VIH, VIF...) peuvent coloniser le cerveau.
Cette multiplication virale n'est pas le seul constat des chercheurs. Ils ont mis en évidence que, pour pouvoir infecter une cellule nerveuse, le virus doit se lier à un type particulier de lymphocyte ou de cellule immune. Une fois l'infection cellulaire réalisée, le virus mute et peut se passer de cette association pour se multiplier.
Un rôle clé dans l'immunité
Les chercheurs ont focalisé leur attention sur les astrocytes. Ces cellules qui représentent quelque 50 % du cerveau ont longtemps été considérées comme d'un intérêt mineur. En découvrant qu'elles pouvaient être infectées par le VIF ou le VIH, les scientifiques ont suggéré que l'infection restait quiescente. Des travaux récents ont réhabilité les astrocytes. Ils seraient parmi les cellules cérébrales les plus importantes et semblent jouer un rôle clé dans l'immunité. Les chercheurs américains ont mis en évidence qu'un récepteur sur la membrane de la cellule nerveuse autorise l'entrée du virus. Ce récepteur baptisé CXCR4 est utilisé à la fois par les VIH et VIF tant sur les astrocytes que sur les cellules immunes. Il se pourrait que CXCR4 soit le récepteur principal pour tous les lentivirus sur les astrocytes.
Une fois à l'intérieur de la cellule nerveuse, le virus se multiplie très rapidement grâce à une mutation, indépendante de la présence de la cellule mononuclée sanguine qui a permis l'entrée dans l'astrocyte. La nouvelle souche virale semble totalement indépendante de toute interaction avec le système immunitaire. « Ce qui veut dire que toute drogue qui tendrait à interférer ou à influencer le système immunitaire ne devrait avoir absolument aucune activité sur l'infection des astrocytes », explique M. Podell. D'où la surprise lorsque les chercheurs ont constaté l'ampleur de la multiplication virale après adjonction de méthamphétamine aux cellules infectées.
Les auteurs analysent maintenant les données obtenues à partir de travaux sur un modèle félin (chat). Si elles corroborent les résultats expérimentaux, M. Podell et son équipe pourront tenter de décrypter les mécanismes précis contrôlant l'infection des astrocytes par le VIF.
Le VIF est l'un des principaux substituts du VIH en laboratoire, car il est proche du virus humain. Il autorise des expérimentations s'accordant avec les critères de sûreté et d'éthique.
« Journal of Neurovirology », juin 2002
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