Plus de la moitié des personnes infectées par le VIH sont en âge de procréer.
Avec les traitements permettant de contenir le virus et de diminuer la transmission materno-foetale, le désir d'avoir des enfants chez ces patients est devenu une demande légitime. L'aide médicale à la procréation vient au secours des couples séropositifs ou sérodiscordants (où l'un des partenaires seulement est porteur de l'infection).
Une étude publiée dans le journal « Human Reproduction », signée par une équipe française (Jeanine Ohl et coll., centre d'AMP de Strasbourg), a été menée en s'intéressant à 57 couples chez qui un partenaire au moins était séropositif et efficacement contrôlé sur le plan virologique (47 hommes de 10 femmes). Les spécialistes voulaient mesurer l'efficacité reproductive de l'AMP dans ces cas particuliers ainsi que le risque de transmission de l'infection.
Deux profils très distincts
Deux profils très distincts se dessinent selon que l'infection atteint l'homme ou la femme : l'efficacité des manuvres d'AMP paraît bien meilleure lorsque l'homme est séropositif que dans le cas où il s'agit de la femme. Près d'un tiers des 39 couples où l'homme est séropositif sont devenus parents. On enregistre 14 naissances chez 12 couples dans cette situation et aucune des femmes n'a été infectée.
Dans les cas où l'homme est infecté, le protocole adopté consiste en un lavage de sperme en utilisant deux méthodes successives, qui permettent une décontamination et une isolation des spermatozoïdes. Le sperme est ensuite testé virologiquement. Puis trois types de techniques d'AMP peuvent être appliquées selon les indications : insémination intra-utérine, fécondation in vitro (FIV) et injection intracytoplasmique de spermatozoïde (ICSI). Au cours des deux dernières techniques, les embryons sont transférés à J3 après recueil d'ovocytes qui suit le protocole de stimulation ovarienne par analogues de la GnRH et FSH recombinante.
Chez les couples où l'homme est séropositif, 49 tentatives ont été réalisées par FIV ou ICSI et 5 inséminations intra-utérines (plusieurs tentatives ont pu être réalisées pour un couple).
Chez les 10 couples où la femme est séropositive, ont été réalisées trois injections intra-utérines et 12 FIV ou ICSI. Les résultats sont dans ce cas de figure décevants : une seule femme est devenue enceinte (le taux de grossesses par rapport aux embryons transférés est de 9,1 %).
Concernant l'efficacité des techniques, on note qu'aucune grossesse n'est survenue après les huit tentatives par injection intra-utérine ; et que l'ICSI apparaît la méthode la plus efficace, avec près de la moitié des transferts d'embryons réalisés (48,8 %). En dépit du coût élevé de l'ICSI, l'efficacité de cette technique se révèle plus rentable car elle évite les tests répétés et coûteux du sperme et les stimulation ovariennes multiples.
« Human Reproduction », 2003, vol. 18, n° 6, pp. 1244-1249.
Déception chez la femme
Pour l'équipe du Dr Ohl, les résultats décevants chez les femmes sont inattendus. Une explication est que les hommes inclus dans l'étude n'ont pas de problème de fertilité, contrairement aux femmes. Ces dernières sont significativement plus âgées. Certaines avaient attendu longtemps un traitement, qui n'était devenu possible qu'à la suite des modifications de la législation française intervenues il y a deux ans.
Un décret (paru au « J.O. » le 15 mai 2001) autorise de traiter par AMP les couples sérodiscordants où la femme est séropositive (les règles diffèrent d'un pays à l'autre et peu acceptent de traiter les femmes infectées).
Intervient probablement aussi le fait que les femmes infectées par le VIH ont un taux d'infections génitales multiplié par dix, ce qui grève leur potentiel reproductif.
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