De notre correspondante à New York
Lorsqu'il fut identifié en 1995, on pensait que c'était un nouveau virus d'hépatite. De la famille des flavivirus et apparenté au virus de l'hépatite C, il fut nommé virus GB-C ou virus de l'hépatite G, mais il est apparu par la suite qu'il ne cause pas d'hépatite. En fait, on ne lui connaît à ce jour aucune maladie associée.
Depuis trois ans, des rapports surprenants ont fait état d'une association entre l'infection à VGB-C et une meilleure survie chez les séropositifs au VIH. Deux nouvelles études publiées cette semaine dans le « NEJM » confirment cette association.
Xiang (université d'Iowa) et coll. ont évalué prospectivement 362 patients infectés par le VIH, entre 1988 et 2000, dans un hôpital de l'Iowa. Ils ont recherché chez chacun la présence d'une virémie VGB-C, puis ont suivi la cohorte pendant quatre ans en moyenne.
Un taux de mortalité 3,7 fois plus élevé
La co-infection VGB-C, trouvée chez 40 % de leurs patients VIH+, est associée à une meilleure survie. Ainsi, durant le suivi, seulement 28 % des patients co-infectés (41/144) sont décédés, contre 56 % des non-co-infectés (123/218). Après ajustement pour divers facteurs (traitement de l'infection à VIH, taux initial des CD4, âge, sexe, ethnie, mode de transmission du VIH), le taux de mortalité se révèle 3,7 fois plus élevé chez les patients non co-infectés (IC 95 % : 2,5 à 5,4).
De surcroît, dans un modèle de co-infection en culture cellulaire, les chercheurs montrent que l'infection VGB-C inhibe la réplication du VIH dans les cellules mononucléées du sang périphérique. L'infection VGB-C n'altère pas l'expression des récepteurs de surface pour le VIH (CD4, CXCR4, CCR5), ce qui suggère que l'inhibition de la réplication du VIH intervient après entrée du virus dans la cellule hôte.
Tillmann (Hanovre, Allemagne) et coll. ont suivi prospectivement, à partir de 1993, 197 patients VIH+. Parmi eux, 17 % avaient une virémie VGB-C (infection en cours), 57 % avaient des anticorps anti-E2 (infection ancienne) et 26 % étaient indemnes de VGB-C.
Des charges virales corrélées inversement
Ils ont constaté que la virémie VGB-C est associée à une meilleure survie, une progression plus lente vers le SIDA, avec une survie plus longue par la suite. L'association persiste après ajustement pour des facteurs tels que l'âge et le taux des CD4, ainsi que les années de traitement antirétroviral hautement actif. Une infection VGB-C ancienne s'accompagne d'une survie intermédiaire. Les investigateurs ont aussi observé une virémie VIH plus basse chez les patients infectés par le VGB-C et une charge virale VGB-C corrélée inversement à celle du VIH, mais pas avec le taux des CD4.
« Il est possible que l'infection à VGB-C soit un marqueur de la présence d'autres facteurs qui entraînent une progression plus lente de l'infection à VIH », notent les investigateurs, « mais nous pensons que cet effet résulte probablement d'une inhibition de la réplication du VIH par le VGB-C ». Si tel est le cas, l'identification du mécanisme pourrait déboucher sur de nouvelles approches thérapeutiques.
« De nombreuses questions restent à résoudre », déclarent Stosor et Wolinsky (université de Chicago) dans un éditorial. « Il est beaucoup trop tôt pour suggérer d'explorer l'inoculation intentionnelle du VGB-C chez les patients VIH+ comme approche thérapeutique », ajoutent-ils. De plus, on ignore les conséquences à long terme d'une infection persistante par le VGB-C, en particulier chez des sujets au système immunitaire affaibli.
« New England Journal of Medicine », 6 septembre 2001, pp. 707, 715 et 761
Une apparente bénignité
L'infection à VGB-C apparemment bénigne, qui se transmet par voie parentérale, est assez fréquente dans le monde, plus particulièrement chez les personnes infectées par le VIH et le VHC. Environ 1 à 2 % des donneurs de sang et jusqu'à 35 % des patients VIH infectés ont une virémie VGB-C. Un pourcentage encore plus élevé de sujets ont des anticorps dirigés contre la protéine d'enveloppe E2 (anti-E2) du VGB-C, ce qui laisse supposer que la plupart guérissent spontanément.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature