La Chine prend conscience des risques de dissémination du VIH lié à l'homo-bisexualité masculine. Par l'intermédiaire d'une étude publiée dans le « Lancet », une première donnée chiffrée évalue cette population à 3,1 % des hommes séropositifs. Il faut dire que les Nations unies, voici un an, avaient averti les autorités chinoises d'une catastrophe prévisible liée à l'infection et que, six mois plus tôt (en décembre 2001), alors que la Chine annonçait 30 736 séropositifs, les Nations unies les estimaient plutôt entre 800 000 et 1,5 million.
L'équipe sino-californienne de Kyung Hee-choi (Pékin) et coll. s'est donc inquiétée du rôle de vecteur du virus des hommes homo- et bisexuels dans la population générale. Ces médecins ont évalué à la fois la prévalence de l'infection et le niveau de risque dû au comportement de ces sujets.
Prévalence faible, mais significative
De septembre 2001 à janvier 2002, ils ont enrôlé les participants potentiels dans des « réseaux sociaux informels », ainsi que dans des bars, des parcs et des établissements de bains réputés pour leur fréquentation. Sur 501 personnes pressenties, 481 (âge moyen : 27 ans) ont pu être évaluées. Il s'agissait de répondre à un questionnaire et de subir un prélèvement de la muqueuse buccale, à la recherche du VIH. En cas de positivité, une biologie confirmait le diagnostic de l'infection.
Chez 15 personnes (3,1 %), le dépistage est revenu positif. La prévalence du VIH, expliquent les auteurs, est donc faible, mais significative. La suite de l'analyse statistique les inquiète davantage. En tout, 238 (49 %) participants révèlent avoir eu des rapports anaux non protégés avec des hommes au cours des six derniers mois. De plus, 107 sujets (22 %) ont eu des relations à risque (vaginales ou anales) avec des femmes pendant la même période. « Au vu des taux élevés de rapports non protégés chez de tels hommes, le taux d'infection par le VIH va continuer de croître, à moins que des mesures de prévention ne soient mises en uvre », écrivent les auteurs. Constat d'autant plus sévère que 293 (64 %) des plus de 39 ans étaient mariés. Jouant donc le rôle de « pont sexuel » potentiel vis-à-vis de femmes à faible risque. Ce brassage sexuel pourrait favoriser la transmission sexuelle du VIH dans la population hétérosexuelle.
L'analyse multivariée montre le risque le plus élevé chez les plus de 39 ans ayant eu au moins 20 partenaires masculins. Au-delà de cet âge-seuil, la prévalence de l'infection est 4,5 fois plus élevée, quel que soit le nombre de partenaires.
Les auteurs, en conclusion, reconnaissent une faiblesse à leur étude : la sélection des participants. Les sites de recrutement ayant été choisis pour des raisons de commodité, des investigations plus rigoureuses et plus systématisées sont nécessaires pour obtenir des données plus valides. Il faut savoir que la surveillance, en Chine, ne porte que sur cinq populations à risque : les toxicomanes, les prostituées, les conducteurs de camion, les femmes enceintes et les patients atteints de MST.
« Lancet », vol. 361, 21 juin 2003, pp. 2125-2126.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature