O N considère que la séroconversion VIH chez les toxicomanes I.V. est principalement associée aux injections. D'où une prévention axée sur les échanges de seringues et les produits de substitution.
Pourtant, deux études ont suggéré une association entre séroconversion et facteurs de risque sexuels. Il était nécessaire d'en savoir plus sur le sujet. Ce qui a conduit une équipe américaine (Alex Kral et coll.) a étudier la part des injections et du comportement sexuel dans la séroconversion VIH chez des toxicomanes I.V. recrutés dans les rues de San Francisco entre 1986 et 1998.
C'est ainsi qu'ils ont pu comparer 58 sujets qui ont fait leur séroconversion entre deux visites et 1 134 sujets contrôles qui sont restés séronégatifs.
Homosexuels masculins et prostituées
Les résultats sont nets : le principal facteur de risque chez les toxicomanes I.V. est lié au comportement sexuel. Chez les homosexuels masculins, le risque de séroconversion était 8,8 fois plus élevé que celui des hommes hétérosexuels. Pour ce qui est des femmes, le risque était 5,1 fois plus élevé chez les prostituées que chez les autres. En outre, les femmes de moins de 40 ans avaient un risque 2,8 fois plus élevé que les plus de 40 ans. Enfin, les femmes ayant un partenaire sexuel stable, lui-même toxicomane, avaient un risque moindre (0,32) que les autres.
Il faut noter un résultat particulier, différent de ceux retrouvés dans toutes les études antérieurs : les injections à risque n'étaient pas associées à un risque accru de séroconversion. Cela peut signifier que les mesures de prévention pour toxicomanes ont porté leurs fruits, indiquent les auteurs et, donc, en aucun cas, suggérer que ces mesures doivent être ignorées.
Il existe des programmes d'information et de prévention sexuelle pour les homosexuels masculins. Le risque de séroconversion VIH observé dans cette étude chez les homosexuels masculins toxicomanes incite à la mise en place, à leur intention, de ces programmes.
Cette étude confirme le risque élevé de séroconversion chez les prostituées : elles peuvent se contaminer en ayant des rapports non protégés avec un grand nombre de partenaires, même si la plupart d'entre eux ne sont pas infectés. Là encore, il existe déjà des programmes de prévention pour les prostituées. Il faudrait permettre à ces femmes de pratiquer un « safe sex », ce qui inclut l'éducation de leurs clients.
Les programmes d'échanges de seringues ont fait l'objet de nombreuses études. Ils ont pour objet de diminuer les risques liés aux injections. Une mesure efficace, qui explique que, dans la présente étude, on n'ait pas observé de lien entre les injections et la séroconversion.
Des stratégies innovantes
« La séroconversion VIH des toxicomanes I.V. recrutés dans les rues de San Francisco est fortement associée au comportement sexuel. Le risque VIH devrait être réduit en incorporant dans les programmes de prévention des stratégies innovantes de réduction du risque sexuel », concluent les auteurs.
Ils recommandent une prévention sexuelle à tous les niveaux d'action : la rue, les programmes d'échanges de seringues, les programmes thérapeutiques, les prisons et les hôpitaux. « Les travailleurs qui, dans ces programmes, aident les toxicomanes à réduire les risques liés aux injections devraient prolonger leurs efforts par une prévention sexuelle. »
« Lancet », 5 mai 2001, pp. 1397-1401.
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