« Les implications cliniques sont importantes. Vif est essentiel pour la survie et la réplication du VIH1. Des médicaments ciblant Vif pourraient potentiellement libérer le système de défense innée, de façon à ce que ce dernier puisse abaisser la charge virale et prolonger la survie des patients », explique au « Quotidien » le Dr David Kabat (Oregon Health and Sciences University, Portland), qui a dirigé l'une des études.
« Vif représente le plus puissant et le plus crucial de tous les facteurs accessoires encodés par le VIH. Il constituait l'énigme majeure du VIH1, à savoir la dernière protéine encodée par le VIH à élucider », souligne-t-il. « En empêchant l'action de Vif, on pourrait restaurer les propriétés antivirales de l'APOBEC3G et, ainsi, inhiber l'infection et la dissémination du VIH », déclare au « Quotidien » le Dr Michael Malin (King's College of London, Londres), qui a mené l'autre équipe.
Le facteur d'infectivité virale (Vif), encodé par le VIH1, neutralise une voie antivirale puissante trouvée dans les cellules dites non permissives, comme les lymphocytes T et les macrophages. Les cellules dites permissives n'ont pas cette voie de défense antivirale.
Il a été montré, il y a un an, que la protéine APOBEC3G confère ce mécanisme de résistance innée contre l'infection rétrovirale. L'expression de l'APOBEC3G, dans les cellules permissives, les transforme en cellules non permissives.
Cette protéine APOBEC3G (APOlipoprotein B mRNA-Editing Enzyme-Catalytic Polypeptide-like-3G), appelée aussi CEM15, est une enzyme qui édite l'acide nucléique cytidine désaminase. Incorporée dans les virions, APOBEC3G désamine la cytidine dans les ADNc du VIH1 durant la transcription reverse, et cette désamination est fatale pour la réplication virale.
Les deux équipes montrent que la protéine virale Vif se lie à l'APOBEC3G et induit sa dégradation rapide, entraînant sa quasi-élimination des cellules et empêchant ainsi son intégration dans les virions VIH1.
La protéine Vif contient deux domaines : un domaine de fixation à l'APOBEC3G et un domaine (un motif conservé) qui induit l'ubiquitination de l'APOBEC3G et sa dégradation consécutive par le protéasome. Cette découverte suggère de nouvelles approches thérapeutiques pour traiter l'infection par le VIH.
La piste de médicaments
Des médicaments qui inhibent la fixation du Vif à l'APOBEC3G pourraient être prometteurs. De même, des médicaments qui ciblent le motif conservé de la protéine Vif, à l'origine de la dégradation de l'APOBEC3G, pourraient être évalués.
« L'APOBEC3G attaque et détruit spécifiquement le génome du VIH1 et d'autres virus envahisseurs intracellulaires », résume le Dr Kabat. « Nos nouveaux résultats montrent comment le VIH1 contre-attaque et neutralise le système de défense innée qui survient dans les cellules humaines. »
« Nature Medicine », 6 octobre 2003, DOI : 10.1038/nm945, DOI: 10.1038/nm946
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