« Les Côtelettes », de Bertrand Blier

Vieux et verts

Publié le 27/05/2003
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Cinéma

On ne peut pas plaire à tout le monde. On peut même déplaire à beaucoup. C'est le cas de Bertrand Blier, dont le dernier film a suscité, lors de la projection de presse au festival de Cannes, des huées.

« Il faut être subversif, sinon ce n'est pas la peine de faire des films ! », dit l'auteur des « Valseuses » et de « Tenue de soirée ». La subversion, dans « les Côtelettes », n'est pourtant pas bien grande. Bon, les deux vieux messieurs à l'apparence respectable qu'incarnent avec délectation Philippe Noiret et Michel Bouquet, parlent de sexe avec un langage cru et joignent parfois le geste à la parole. Est-ce parce qu'ils sont vieux que cela doit choquer ? Blier s'emploie à démontrer le contraire. Il y a aussi un « Arabe » sur lequel s'abattent tous les clichés en cours, mais seul un politiquement correct imbécile (pléonasme ?) conduirait à s'en offusquer.
« Les Côtelettes », c'est la première pièce de théâtre écrite par Bertrand Blier qui, très vite, a eu envie de l'adapter au cinéma. Ce qui a pu se faire grâce à René Cleitman (Hachette Première), déjà producteur de « Tenue de soirée », et Luc Besson (Europa), qui ne produit pas que des « Taxi » et autres films pour ados plus ou moins incultes.
Loin du théâtre filmé, même si ses répliques restent sculptées avec précision, Blier a effectué une sorte de mise en abyme des situations, à la fois décrites par les dialogues et montrées avec un léger décalage. De l'appartement de Noiret, on saute dans une campagne sans aspérité ou à la boucherie où Bouquet achète les fameuses côtelettes.
Des vieux, donc. Plus que troublés par leur commune femme de ménage maghrébine (Farida Rahouadj). Et qui parviendraient presqu'à être heureux en sa compagnie, après quelques péripéties, si la mort ne s'en mêlait. La mort, c'est Catherine Samie, et on ne s'ennuie pas avec elle (elle n'a pas l'air de s'ennuyer non plus dans ce rôle).
Faire rire avec la vieillesse et la mort, ce n'est pas donné à tout le monde. Woody Allen, Bertrand Blier, armes bien différentes (y compris le mauvais goût), même combat. On regrettera que le cinéaste se soit laissé emporter par son sujet et son décor (encore une piscine du Lubéron) pour une scène finale bien lourde, à l'image de ses moins bons films. Mais ces « deux hommes qui courent après les femmes avec la mort aux trousses » sont les égaux des personnages de ses meilleurs films. Alors, bon appétit !

Sortie aujourd'hui.

R. C.

Source : lequotidiendumedecin.fr: 7343