L'INSTITUT de veille sanitaire a réalisé, en collaboration avec la Caisse nationale de l'assurance-maladie des travailleurs salariés (Cnamts), les centres d'examens de santé et le Centre technique d'appui et de formation des centres d'examens de santé (Cetaf), une enquête de prévalence des marqueurs sériques des infections dues aux virus des hépatites B (VHB) et C (VHC). Son objectif principal est de fournir les données nécessaires à l'évaluation des actions de lutte définies dans le cadre du programme national de lutte contre l'hépatite C puis du plan national hépatites C et B (2002-2005).
Les estimations disponibles jusqu'ici pour le VHC remontaient à l'enquête de 1994, avec une prévalence de 1,05 %. L'estimation de la prévalence des formes chroniques (portage de l'antigène HBs) dans la population générale résultait, quant à elle, de données anciennes et peu représentatives : entre 0,2 et 0,5 %, ce qui correspond à 100 000 à 150 000 personnes affectées.
Conduite entre avril 2003 et avril 2004, à partir d'une population cible constituée des assurés sociaux du régime général invités à se rendre à leur centre d'examens de santé (CES), l'étude a inclus 14 416 personnes âgées de 18 à 80 ans.
Les résultats, présentés au comité stratégique du plan national de lutte contre les hépatites B et C, le 17 décembre dernier, ont alarmé les associations qui ont demandé le renforcement de la vaccination de l'hépatite B (« le Quotidien du 31 janvier 2005). Les conclusions du rapport de l'InVS, rendues publiques hier, sont plus mesurées.
« Des analyses complémentaires sont nécessaires et vont être mises en œuvre dans les semaines et les mois qui viennent », y est-il précisé. Elles porteront notamment sur l'évaluation des critères de dépistage des hépatites chroniques B et C et leur performance, la description de la couverture vaccinale et les facteurs qui y sont associés.
Les caractéristiques de la population étudiée sont les suivantes : 4,8 % sont bénéficiaires de la CMUc (couverture médicale universelle complémentaire), la proportion de personnes qui disent avoir été vaccinées contre le VHB est de 41,3 % ; 1,75 % se disent homosexuels ou bisexuels ; 0,38 % déclarent avoir pris au moins une fois dans leur vie de la drogue en intraveineuse (Udiv) ; 1,25 % déclarent avoir été incarcérés. Par rapport à la population générale, les personnes âgées de plus 60 ans sont un peu moins représentées. Pour la CMUc, le manque de données nationales ne permet pas de comparer.
Une prévalence du VHC diminuée chez les plus jeunes.
La prévalence des anticorps anti-VHC chez les assurés sociaux est estimée à 0,9 % et « est globalement du même ordre que celle observée en 1994 ». Malgré les mesures prises, « l'affection demeure un problème de santé publique », précise le rapport. Toutefois, une évolution du profil de prévalence a été mise en évidence. Si le taux reste plus élevé chez les femmes, particulièrement chez les 40-49 ans et les 60-69 ans, l'enquête montre que dans les deux sexes, la classe d'âge de 18 à 29 ans a moins rencontré le VHC (taux plus faible avant 40 ans et après 50 ans). Cela « suggère que l'incidence de l'infection par le VHC a pu diminuer lors des dernières années pour les cohortes les plus jeunes ».
La précarité est un facteur de risque important de l'infection à VHC : la prévalence est 3,5 fois plus élevée chez les bénéficiaires de la CMUc que chez les non-bénéficiaires. Elle est aussi plus importante chez les personnes nées au Moyen-Orient (région à forte prévalence). Les autres facteurs de risque connus sont bien retrouvés : utilisateurs de drogues, transfusés avant 1992, personnes incarcérées au moins une fois. En cas de tatouage ou de piercing en dehors des oreilles, le taux semble plus élevé également, mais l'analyse multivariée doit encore le préciser.
Quoique bénéfique, l'incitation au dépistage mis en place depuis 1999 a un impact moindre que celui qui était attendu. La proportion des personnes séropositives qui connaissent déjà leur statut a doublé en dix ans (56 % contre 24 %), mais elle reste en deçà de l'objectif de 75 % prévu.
300 000 porteurs chroniques.
L'infection chronique par le VHB est analysée à partir des données sur le portage de l'antigène HBs. La présence chronique du virus expose à un risque de transmission et d'évolution vers les cirrhoses ou l'hépatocarcinome. La prévalence de l'AgHBs est de 0,68 % chez les assurés sociaux. Ce taux, deux fois plus élevé que celui jusqu'ici proposé, est compatible avec un nombre de porteurs chroniques de l'AgHBs de 300 000. Nettement plus élevé chez les hommes que chez les femmes (1,19 contre 0,16 %), il est maximal dans les classes d'âge 18-29 ans et 50-59 ans pour les premiers et chez les 50-59 ans chez les secondes. Comme pour le VHC, l'influence de la précarité est forte : la prévalence est trois fois plus élevée chez ceux qui bénéficient de la CMUc que chez ceux qui n'en bénéficient pas. Les personnes originaires d'Afrique subsaharienne (région à forte prévalence) sont les plus touchées. La connaissance du statut pour l'AgHBs est de 49 %. En dépit d'une incitation moindre au dépistage, « cette proportion est relativement proche de celle observée pour la séropositivité anti-VHC ».
Le taux de prévalence des anticorps anti-HBc, témoins d'un contact passé avec le VHB, est aussi supérieur à ce qui était proposé (8 % au lieu de 5 %).
L'ensemble des données est en faveur d'une promotion du dépistage et de la prise en charge des hépatites B et C, en particulier de l'infection chronique par le VHB. Enfin, « les résultats concernant le VHB sont en faveur de la stratégie actuelle de vaccination contre le VHB en France », conclut le rapport.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature