CE SONT des petits meurtres d’amour-propre dans un délicieux jardin irréel. C’est une comédie d’aujourd’hui qui reprend d’anciennes recettes et les recycle joliment. Ils ont 50 ans. Ils sont amis d’enfance. Elle a 30 ans. Elle quitte l’un des deux pour l’autre. Enfin c’est ce qu’elle croit…
Au théâtre Édouard-VII, Bernard Murat ne met en scène que des pièces faites pour plaire, divertir, enchanter. L’an dernier, Arditi faisait des vrilles en séducteur et menteur à la Sacha Guitry. Cette année, il s’amuse à jouer les scénaristes à succès. Brillant, égoïste, très demandé dans son métier, ayant oublié qu’il a un grand garçon d’un premier mariage, il vit au fond comme un éternel célibataire très heureux d’avoir dans sa vie, depuis dix ans, une fille charmante qui a vingt ans de moins que lui. Et, depuis toujours, ce copain complètement admiratif et acquis à sa cause, en quelque sorte.
Et puis voilà qu’Hélène annonce à Marc qu’elle le quitte pour Félix. L’éditeur du texte cite La Bruyère : « Le temps, qui fortifie l’amitié, affaiblit l’amour. » Ne nous inquiétons pas, la comédie, composée sur le mode de la rupture, avec des scènes en parallèle, des faux dialogues, des pensées à haute voix, est aussi agréable que lisse. Ici, l’écriture est un prétexte. On n’est pas dans un monde torturé. Personne ne veut de mal à personne. Les duels sont à fleurets mouchetés, les répliques s’échangent comme des balles légères. Rien de grave. C’est la vie. Dans ce monde d’adultes bien élevés et à l’aise dans la société, on ne va pas faire un drame !
Le plaisir, ici, c’est le jeu. Cette petite musique de l’amour que Bernard Murat met en scène dans un très harmonieux décor de Nicolas Sire – un vrai décor, théâtral, qui nous dit aussi que la vie n’est pas toujours aussi belle –, cette petite musique si finement distillée par les trois interprètes. François Berléand dans la tonalité du doute éternel, Sylvie Testud dans celui de la primesautière enjôleuse, Pierre Arditi dans un large registre, complexe, profond, ultra-nuancé et sensible. Un très grand acteur, décidément, l’acteur tant aimé par Alain Resnais.
Théâtre Édouard-VII (tél. (01.47.42.59.92), à 21 heures du mardi au samedi, en matinée le samedi et le dimanche. Texte-programme publié par « l’Avant-scène théâtre » (12 euros).
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