Une instruction pénale avait été ouverte en décembre 2000 par la juge Bertella-Geffroy, à la suite des plaintes déposées par les parents d'Arnaud Eboli et de Laurence Duhamel, deux adolescents victimes de nvMCJ (nouveau variant de la maladie de Creutzfeldt-Jakob), la forme humaine de la maladie de la vache folle.
La lettre que ces mêmes familles viennent d'adresser au Premier ministre, Lionel Jospin, constitue une action nouvelle pour obtenir la reconnaissance des « défaillances des différents gouvernements français, entre 1988 et 1996, en matière de police sanitaire ».
Dans ce courrier, dont une copie a été adressée au président de la République, les familles évaluent le préjudice lié à la contamination à 3 millions de francs pour chacune d'elle, et Lionel Jospin dispose d'un délai de deux mois pour accepter ou refuser cette demande d'indemnisation.
Dans le cas où il refuserait, ou ne répondrait pas, précise l'avocat des plaignants, un recours serait déposé devant le Conseil d'Etat.
A la justice de faire la lumière
A l'appui de cette demande, un certain nombre de relevés ministériels saisis dans le cadre de l'instruction sont publiés par « le Figaro ». Parmi ceux-ci, un rapport daté du 4 mai 1996, à en-tête de la direction juridique du ministère des Affaires étrangères, relève que « la responsabilité de l'Etat pourrait être engagée en fonction des pouvoirs de police sanitaire dont disposent les services vétérinaires au sein de la direction générale de l'Alimentation (DGAL), la direction générale de la Santé (DGS) et la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes (DGCCRF) et dont ils n'useraient pas ».
« Il faut se garder cependant de relire aujourd'hui les événements de l'époque à la lumière des connaissances actuelles », déclare au « Quotidien » François Sauvadet, qui présida la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur l'ESB (encéphalopathie spongiforme bovine). Le député UDF, qui avait conclu dans son rapport à « l'erreur d'appréciation collective des diverses instances professionnelles, administratives, gouvernementales et même législatives » (« le Quotidien » du 22 juin), estime que « c'est aujourd'hui au parquet et à l'instruction de faire toute la lumière sur les responsabilités. On peut naturellement comprendre la volonté des familles de relancer le débat, mais, affirme-t-il, il ne revient pas en l'espèce au Premier ministre de décider de les indemniser en se substituant à la machine judiciaire ».
Au demeurant, les bleus ministériels, ces documents d'archives qui étaient destinés à rester confidentiels et qu'a saisis le magistrat instructeur, n'apportent « pas d'éléments véritablement nouveaux au dossier », considère Jean Bizet, qui fut rapporteur de la commission d'enquête du Sénat sur les conditions d'utilisation des farines animales. « Nous avions à l'époque subi les foudres du ministre de l'Agriculture Jean Glavany, rappelle le sénateur RPR. Cette requête des familles confirme aujourd'hui que nous avions raison de déplorer que les impératifs de santé publique aient été souvent muselés dans la gestion de cette crise et que les gouvernements aient tardé à prendre la décision inéluctable d'interdire les farines animales dans l'alimentation des animaux d'élevage. »
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