La greffe de moelle qui oblige à placer le receveur en état d'immunodépression représente un terrain favorable à la réactivation du virus varicelle-zona (VZV). Chez les greffés, le risque de zona est lié à la baisse de l'immunité cellulaire contre le VZV et non pas à un taux insuffisant d'anticorps anti-VZV. Les lymphocytes T retrouvent leur capacité de défense contre le virus lentement après la greffe de cellules hématopoïétiques et souvent après la survenue d'un zona.
Le vaccin à virus vivant atténué ainsi que le vaccin inactivé de la varicelle ont été développés à la fois pour prévenir l'infection et pour renforcer l'immunité des personnes en bonne santé. Leur utilisation pour réactiver l'immunité des sujets immunocompromis a déjà été envisagée. Mais un premier essai dans un groupe hétérogène de transplantés (cellules hématopoïétiques allogéniques ou autogéniques) avait échoué. Après trois injections de vaccin inactivé dans les suites de la transplantation, les patients avaient une immunité cellulaire renforcée, mais le nombre de zonas était toujours aussi important.
Patients lymphomateux
Immunologistes et transplanteurs n'ont pourtant pas baissé les bras. Une équipe de Stanford (Californie) a recommencé l'expérience de vaccination en changeant deux paramètres. Le premier est la population cible : seuls des patients lymphomateux destinés à recevoir une autogreffe de cellules hématopoïétiques ont été recrutés. Le second est qu'une quatrième injection, dans les 30 jours précédant la greffe, a été pratiquée.
Cent onze patients, âgés de 18 à 60 ans, destinés à recevoir des cellules hématopoïétiques autologues ont été inclus. Tous avaient un lymphome hodgkinien ou non hodgkinien ayant résisté au traitement standard ou bien à haut risque de récurrence précoce. La survenue d'un zona dans les 12 mois précédant l'étude, une vaccination contre la varicelle dans les quatre semaines ou tout autre vaccin dans les quatre mois ainsi qu'une sensibilité à la néomycine étaient des critères d'exclusion. Les patients étaient préparés à la greffe par irradiation corporelle totale et chimiothérapie ou chimiothérapie myélosuppressive seule en cas de Hodgkin.
Après randomisation, 59 patients sont entrés dans le protocole de vaccination, les 60 autres constituaient le groupe témoin. Certains sujets avaient une prophylaxie par acyclovir contre le virus Herpes simplex avant la greffe (3 du groupe « vacciné », 2 du groupe « témoin ») et durant les 120 jours de suivi (29 vaccinés/28 témoins). Les doses d'acyclovir et les durées de traitement étaient superposables dans les deux groupes. Tous les « vaccinés » ont reçu une première dose en moyenne 13 jours avant transplantation, 43 ont complété le protocole (4 doses), alors que 45 n'ont eu que deux injections après transplantation (évolution clinique défavorable, réaction au site d'injection, autre signe d'intolérance).
Sept zonas chez les vaccinés
Dans les 12 mois qui ont succédé la greffe, 7 patients dans le groupe vaccination contre 13 dans le groupe témoin ont développé un zona (différence significative). L'intervalle entre la transplantation et le zona était de 92 jours chez les vaccinés, contre 130 chez les non-vaccinés. Tous les patients ont reçu le même traitement antiviral. La sévérité du zona était identique dans les deux groupes. Au plan immunologique, la prolifération des lymphocytes CD4 dirigés contre le VZV a été détectée plus précocement chez les sujets reéxposés à l'antigène par la vaccination avant transplantation. « On peut donc penser, expliquent les chercheurs californiens, qu'il persiste une immunité cellulaire spécifique malgré le traitement immunosuppresseur. Les tests in vitro de prolifération des CD4 spécifiques chez les vaccinés ont obtenu des résultats proches de ceux des non-immunodéprimés. Cette vaccination pourrait servir à améliorer l'immunité contre d'autres virus herpes, comme le cytomégalovirus.»
Atsuko Hata et coll. «N Engl J Med», vol. 347, n° 1, 4 juillet 2002.
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