En effet, après trois ans d’exercice, les nuages s’amoncellent au-dessus de la ministre. Les résultats économiques sont médiocres dans le secteur dont elle a la charge. L’opposition tente au Sénat de « détricoter » sa loi de santé. Et les professionnels de santé ne désarment toujours pas. Affaiblis, ils se replient dans une opposition acerbe. La période électorale actuelle les entraîne dans une agitation désordonnée et « dé-constructive ». Dans un pays plus autoritaire que le nôtre, le ministre pourrait affronter ces écueils avec dédain. Dans une démocratie, même imparfaite comme elle l’est en France, les responsables politiques se voient acculés à l’inaction. Son absence dans le congrès de rentrée du principal syndicat de médecins n’a pas d’explication rationnelle. Le contexte électoral évoqué pour excuser cette absence n’est pas un argument que les congressistes pouvaient comprendre. La ministre se prive d’une tribune. Les liens entre le pouvoir politique et la représentation professionnelle sont dommageables pour le Président et le Premier ministre qui cherchent une réélection. Les fonctionnaires et responsables d’institutions s’en trouvent de fait amoindris. Les leviers du pouvoir politique se délitent. L’encéphalogramme devient plat. Le débat n’a plus de prise et de ressort. Les responsables politiques de gauche présents passent leur temps à s’excuser. Ceux de droite font de la récupération. L’université d’été de la CSMF était l’occasion de revigorer les arguments politiques. Or, faute d’interlocuteurs, les libéraux ne peuvent que réclamer des revalorisations d’actes sans pouvoir formuler des engagements plus constructifs. Revalorisations qui ne leur seront pas accordées avant 2016 au mieux et à hauteur de quelques euros. En fait, la multiplication d’actes bâclés qui leur est reprochée notamment par la Cour des comptes, leur est en fait imposée. Les pistes de travail sur la forfaitisation sont évacuées. De ce point de vue, Jean-Paul Ortiz, le président de la CSMF, n’a pas tort de parler d’un système de santé français à bout de souffle. Toujours aussi fâchés par le tiers payant généralisé, les médecins tentent de reprendre la main dans les régions, face aux ARS, au travers des élections régionales (URPS). En fait, dans nos sociétés blasées, où seuls 17 % des jeunes croient en leur avenir – au même niveau que les Irakiens – comme le rappelle le philosophe Luc Ferry, la responsabilité d’un pouvoir politique est de ne pas rompre le fil avec la société. Si, comme le croit l’économiste de la santé Jean de Kervasdoué intervenant en atelier avec le jeune président des chefs de clinique Julien Lenglet, l’évolution ne vient que pas accident, le manque de confiance est à l’origine des échecs politiques. Or, la confiance se mérite. La fermeté témoignée par Marisol Touraine sur ses principes et sa ligne politique ne devrait pas être fondée sur l’évitement de l’adversaire. Qui en l’occurrence, dans un système conventionnel, devrait être un partenaire. Par bonheur, la nouvelle génération de médecins ne refuse pas des évolutions fortes telles sa « recertification », les délégations de tâches, les nouvelles technologies de l‘information… Les médecins tentent donc de reprendre leur avenir en main et de donner corps à une « révolution ambulatoire » que le pouvoir ne se donne pas les moyens de réussir.
Université médicale de la CSMF : Le Mépris
Publié le 17/09/2015
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Si l’usure du pouvoir est un fait naturel dans toutes les sociétés politiques, la ministre de la Santé ne parvient toujours pas à vaincre l’hostilité des professionnels. Au risque de faire échouer sa politique. Retour sur l’Université d’été de la Confédération des syndicats médicaux Français (CSMF)*

Crédit photo : GARO/PHANIE
D’après l’Université CSMF, Giens, 11-12-13 Septembre 2015.
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Source : lequotidiendumedecin.fr
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