La première édition de la classification des céphalées de l'IHS date de 1988. Son utilisation s'est généralisée à travers le monde et elle a donné pendant longtemps toute satisfaction. Toutefois, face au dynamisme de la recherche, des modifications sont peu à peu apparues nécessaires. Aussi un groupe d'experts travaille depuis 1999 à une nouvelle version de cette classification qui est maintenant finalisée. Ses grandes lignes ont été présentées au dernier congrès de l'IHS.
Bien que les données de base soient globalement maintenues (les critères de la migraine sans aura ou des céphalées de tension sont inchangés), cette nouvelle version comporte des changements notoires avec l'apparition de nouvelles entités. Et, même dans les domaines où les bases ont été maintenues, des précisions ont été apportées.
Des descriptions plus précises
Ainsi, une sous-classification des migraines sans aura est proposée pour les femmes en activité génitale ; il s'agit de : la migraine strictement menstruelle, la migraine liée aux règles et la migraine indépendante des règles. Les migraines avec aura sont subdivisées en plusieurs sous-groupes : l'aura typique avec migraine, l'aura typique avec céphalée non migraineuse, l'aura typique sans céphalée, la migraine hémiplégique familiale, la migraine hémiplégique sporadique et la migraine basilaire ; chacune de ces entités faisant l'objet de description précise.
De même, concernant l'enfant, les syndromes périodiques précurseurs des crises de migraines sont maintenant clairement décrits : vomissements cycliques, migraine abdominale et vertiges paroxystiques bénins.
L'arrivée de la migraine chronique
La migraine chronique fait son entrée dans cette nouvelle classification. Elle est définie par une douleur migraineuse, existant plus de quinze jours par mois pendant trois mois, et ne pouvant être attribuée à une autre cause. Il est précisé que la cause la plus fréquente du passage à la chronicité d'une migraine est l'abus médicamenteux. La migraine chronique entre dans l'ancien chapitre des états migraineux qui est désormais composé de trois sous-chapitres : la migraine chronique, l'état migraineux et l'aura persistante sans ischémie.
Le chapitre des migraines ischémiques se répartit en « migraine ischémique » et « migraine triggered seizure ». Les céphalées de tension reste un chapitre très important de la classification. On y distingue : les céphalées de tension épisodiques rares, les céphalées de tension épisodiques fréquentes, les céphalées de tension chroniques, et les céphalées de tension probables. Dans chaque catégorie, il existe des sous-types comme la céphalée de tension épisodique rare avec hyperesthésie du cuir chevelu.
Un chapitre s'intéresse aux « Cluster Headache » et autres « Trigeminal Autonomic Cephalalgias ».
Plusieurs nouvelles entités
La céphalée hypnique est une nouvelle entité de la classification 2004. Il s'agit d'une céphalée sourde, se développant pendant le sommeil ou au réveil, apparaissant au moins quinze fois par mois, durant au moins quinze minutes après l'éveil et débutant après l'âge de 50 ans. Le tableau ne comprend pas plus d'un signe associé (nausée, photophobie...) et ne peut être attribué à une autre cause.
Autre entrant de la dernière classification, l'hémicrânie continue. Il s'agit d'une céphalée durant plus de trois mois et remplissant les critères suivants : unilatérale, continue sans intervalle indolore, d'intensité modérée avec des exacerbations (associées à un larmoiement, une congestion nasale, un ptosis ou un myosis) ; elle est (complètement) soulagée par l'indométacine.
« La céphalée persistante nouvellement quotidienne » (New Daily Persistent Headache) fait également son apparition. Il s'agit d'une céphalée quotidienne, sans rémission depuis trois mois, avec pas ou peu de signes associés (modérés) ; la douleur est bilatérale, non pulsatile, d'intensité légère ou modérée et non aggravée par les activités quotidiennes. Aucune autre cause n'est retrouvée.
Les céphalées secondaires
De même, de nouvelles règles séparent les céphalées primaires et secondaires. La distinction entre les deux groupes s'appuie sur les paramètres suivants : la possibilité ou non de faire un lien entre l'apparition ou l'aggravation de la céphalée et la survenue d'une pathologie compatible avec ce symptôme, le degré de cette aggravation, l'existence ou non d'une autre cause pouvant expliquer les maux de tête. Les critères diagnostiques des migraines secondaires sont plus clairement énoncés. Parmi les causes secondaires citées, on trouve : les maux de tête après « le coup du lapin », les céphalées secondaires à une tumeur cérébrale, les céphalées dues à une intoxication par le monoxyde de carbone, les céphalées secondaires à un abus médicamenteux (nouveau chapitre incluant de nombreuses précisions), les céphalées chroniques après une méningite bactérienne...
Les maux de tête dus à une rupture de l'homéostasie sont regroupés dans un même chapitre (hypoxie, hypercapnie, dialyse, HTA, hypothyroïdie, jeûne, céphalée cardiaque, etc.).
Enfin, la nouvelle classification prévoit un chapitre réservé aux céphalées liées aux troubles psychiatriques (dépression majeure, troubles panique, anxiété généralisée, troubles somatoformes, phobie sociale, stress post-traumatique).
Des changements d'appellation
A signaler que certains tableaux cliniques ont changé de nom, comme la douleur faciale idiopathique persistante qui devient « douleur faciale atypique », et certains autres n'entrant dans aucune catégorie sont regroupés en « céphalées inclassables » et « céphalées aspécifiques ».
Cette nouvelle classification va être largement diffusée : elle fera l'objet d'un numéro spécial de Cephalalgia en janvier 2004 ; elle sera également disponible sur CD-ROM et progressivement traduite dans toutes les langues. Enfin, il est prévu d'élaborer un kit pédagogique pour favoriser la formation des praticiens.
D'après la conférence de J. Olesen, département de neurologie, hôpital universitaire de Glostrup, Danemark
Quelques règles générales d'utilisation
Les experts qui ont élaboré cette nouvelle classification ont dicté quelques règles générales pour en faciliter l'utilisation. Ainsi, chez un patient remplissant des critères diagnostiques de deux types différents, il est recommandé d'utiliser toutes les autres informations disponibles pour décider quel est le diagnostic le plus probable ; cela inclut l'histoire de la maladie, l'histoire familiale, les effets pharmacologiques, le lien éventuel avec des cycles menstruels, l'âge, le sexe...
Chez une même personne présentant plusieurs tableaux cliniques, chaque type de céphalée, doit être diagnostiqué et codé séparément des autres : par exemple, il est possible de porter trois diagnostics chez un seul patient, à savoir une migraine sans aura, des épisodes de céphalée de tension et des maux de tête liés à un abus médicamenteux.
Dr D. C.
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