LA MALADIE coeliaque est une affection inflammatoire de l'intestin grêle, due à une intolérance à des protéines (gliadines) du gluten, que l'on trouve dans les céréales telles que le blé, l'orge et le seigle. Elle se caractérise histologiquement par une atrophie des villosités intestinales. Le régime sans gluten permet l'amélioration clinique et histologique. Il s'agit d'une maladie fréquente qui pourrait concerner une personne sur cent, mais elle est largement méconnue et sous-diagnostiquée en raison des formes pauci- ou asymptomatiques.
Dans sa forme classique, elle se manifeste par une diarrhée chronique et une malabsorption intestinale qui peut se compliquer de carences multiples, parfois à l'origine d'un retard de croissance chez l'enfant, et d'une anémie et d'une déminéralisation osseuse chez l'adulte. Non traitée, elle augmente le risque de développer certains cancers, en particulier le lymphome intestinal. La maladie multifactorielle survient chez des individus génétiquement prédisposés. La combinaison d'allèles de susceptibilité et leur interaction avec les facteurs environnementaux (le gluten) induisent le processus pathogène. La seule composante génétique de prédisposition clairement établie est, jusqu'à présent, la composante HLA. La majorité des individus affectés de maladie coeliaque possède l'HLA-DQ2 (et le reste principalement l'HLA-DQ8). Toutefois, HLA-DQ2 est fréquent chez les individus bien portants, ce qui démontre que sa contribution n'est pas suffisante pour le développement de la maladie. Afin d'identifier d'autres facteurs génétiques de prédisposition, un consortium européen de chercheurs, réuni autour du Pr David van Heel (Queen Mary University of London, Royaume-Uni), a entrepris une étude systématique du génome à la recherche de régions d'ADN associées à la maladie. Cette étude, financée par la fondation Charity UK et le Wellcome Trust, est publiée dans « Nature Genetics ». Dans cette étude génomique d'association (de cas-témoins), ils ont testé plus de 310 000 SNP chez 778 patients affectés de maladie coeliaque et 1 422 témoins, tous d'origine britannique.
Mis à part la région HLA, l'association la plus forte avec la maladie coeliaque concerne une région du chromosome 4q27 ; cette région ne contient que trois gènes codant pour des protéines connues – IL-2, IL-21 et TENR – et un gène de fonction inconnue. Cette association a été confirmée ensuite dans deux autres groupes de cas-témoins, venant d'Irlande et des Pays-Bas. Tandis que le gène TENR, spécifiquement exprimé dans les testicules, constitue un candidat très improbable, les gènes de l'IL-2 et de l'IL-21 sont de bons candidats pour des gènes de susceptibilité à la maladie coeliaque.
En effet, les deux cytokines interleukine 2 (IL-2) et interleukine 21 (IL-21) sont impliquées dans les mécanismes d'autres maladies inflam- matoires intestinales.
Toutefois, d'autres études sont nécessaires pour déterminer quel gène précis affecte la susceptibilité à la maladie dans cette région.
«Nous avons découvert une nouvelle cause génétique de la maladie coeliaque», déclare au « Quotidien » le Pr van Heel. «Des variants ADN résidant dans la région des gènes des cytokines IL-2/IL-21 prédisposent à la maladie coeliaque et ces gènes sont impliqués dans le contrôle de l'inflammation. Cela pourrait conduire à l'avenir à de nouveaux tests diagnostiques et à de nouvelles options thérapeutiques», indique-t-il.
Une aiguille dans une botte de foin.
Pour Sarah Sleet, directrice de la fondation Coeliac UK, «cette recherche annonce une avancée importante qui permettra de mieux comprendre qui est à risque d'avoir la maladie coeliaque. Environ une personne sur cent a la maladie, mais prédire qui est susceptible revient à chercher une aiguille dans une botte de foin. Actuellement, le test génétique est un instrument émoussé qui ne peut que restreindre la recherche à environ un tiers de la population générale». Les chercheurs pensent en outre découvrir d'autres facteurs de risque génétique en analysant plus finement les données génomiques.
« Nature Genetics », 11 juin 2007, DOI : 10.1038/ng2058.
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