UNE VASTE étude de cohorte norvégienne vient confirmer et préciser l'existence d'une susceptibilité génétique à la prééclampsie. Cette étude démontre que le risque de prééclampsie peut être augmenté non seulement par le patrimoine génétique de la femme enceinte, mais aussi par des gènes portés par son foetus. Les gènes foetaux impliqués dans la prééclampsie peuvent visiblement être d'origine maternelle et/ou paternelle.
Plusieurs études conduites dans les années 1980 ont montré que le risque de prééclampsie se transmet de mère en fille. Ces études, en effet, ont clairement établi que les femmes nées d'une grossesse compliquée par une prééclampsie ont un risque majoré de déclarer elles-mêmes une prééclampsie au cours de leurs grossesses. Ce risque héréditaire peut avoir au moins deux origines : il peut dépendre de gènes maternels que la femme enceinte a reçu de sa mère et/ou de gènes foetaux que la femme enceinte a reçu de sa mère, puis a transmis à son foetus.
Des études plus récentes ont montré qu'une augmentation du risque de prééclampsie peut également être transmise par le père. Une de ces études montre que les hommes à l'origine d'une grossesse compliquée par une prééclampsie ont un risque accru d'être à l'origine d'autres grossesses prééclamptiques, même s'ils changent de partenaire. Une autre étude indique que les hommes issus d'une grossesse au cours de laquelle leur mère a déclaré une prééclampsie ont un risque majoré d'être à l'origine de grossesses prééclamptiques. Dans ces deux cas, la transmission du risque de complication de la grossesse passe nécessairement par les gènes foetaux d'origine paternelle.
Plusieurs centaines de milliers de couples.
Afin d'en apprendre davantage sur les voies de transmissions maternelles et paternelles du risque de prééclampsie, Skjaerven et coll. ont décidé de mener une vaste étude de cohorte se fondant sur les données des registres médicaux norvégiens. Les données concernant plusieurs centaines de milliers de couples mère-enfant et père-enfant ont été prises en compte par les auteurs de ce travail aujourd'hui publié par le « BMJ ».
Skjaerven et coll. ont ainsi pu établir que les femmes nées à l'issue d'une grossesse prééclamptique ont un risque de prééclampsie plus de deux fois supérieur à celui des femmes issues de grossesse sans complication (risque multiplié par 2,2). Un phénomène similaire est observé chez les hommes : ceux qui sont nés d'une grossesse compliquée par une prééclampsie multiplient par 1,5 le risque de prééclampsie chez leur partenaire.
Les soeurs des sujets issus d'une grossesse prééclamptique ont également un risque accru de déclarer une prééclampsie. Ce risque est deux fois supérieur à celui d'une femme dont l'histoire familiale est vierge de grossesse à complication. En revanche, les frères des sujets issus d'une grossesse prééclamptique ont un risque d'être à l'origine d'une grossesse prééclamptique qui est identique à celui de la population générale. Cela indique que les femmes peuvent recevoir de leur mère des gènes qui augmentent la susceptibilité maternelle à la prééclampsie. Les hommes ne peuvent recevoir et transmettre qu'une susceptibilité d'origine foetale.
L'ensemble de ces données confirme donc qu'hommes et femmes peuvent transmettre des risques de prééclampsie qu'ils ont hérité de leurs propres parents. Le risque de transmission de mère en fille est le plus important, probablement parce qu'il implique deux types de gènes : les gènes de susceptibilité maternelle et les gènes de susceptibilité transmis au foetus. Le risque transmis par les pères ne dépend, lui, que des gènes de la seconde catégorie, ceux qu'ils ont transmis à leur futur enfant.
« BMJ », édition en ligne avancée.
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