Les cellules souches testiculaires à l'origine de la spermatogenèse sont les seules cellules de mammifères capables de s'autorenouveler et de transmettre des gènes aux générations futures. Modifier génétiquement ces cellules offre, par conséquent, non seulement un moyen de comprendre les mécanismes biologiques complexes de multiplication et de différenciation mais aussi de transmettre le gène à la descendance afin d'obtenir, entre autres, une grande variété d'animaux transgéniques. Ce panel d'utilisations potentielles a déjà tenté bon nombre de chercheurs mais, jusqu'à présent, les cellules souches germinales mâles postnatales ne se laissaient pas infecter par les vecteurs rétroviraux habituellement utilisés pour introduire des gènes dans des lignées cellulaires (transfection) ou bien l'expression du transgène était médiocre ou inexistante. En pratique, les cellules souches germinales mâles étaient réfractaires à la pénétration du rétrovirus ou bien le gène transfecté ne s'exprimait pas. On pensait alors qu'une sorte de barrière intrinsèque à la transduction de gène empêchait la pénétration dans les cellules souches et la transmission à la descendance. Du fait de cette impossibilité, tous les travaux réussis d'introduction de gènes par vecteurs rétroviraux ont été menés sur des lignées de cellules souches autres (embryonnaires, hématopoïétique) et principalement sur des cellules femelles (ovocytes, œufs fécondés, blastocystes). Mais une une équipe de Philadelphie (1) fait, cette semaine, tomber le dogme de l'impossibilité de modifier le génome des cellules souches testiculaires et de leur descendance.
Testicules de souriceaux
Ces biologistes, qui étaient déjà pratiquement arrivés au même résultat, ont modifié leurs conditions de culture et d'implantation des cellules souches transgéniques. En pratique, des cellules souches germinales de souris ont été cultivées in vivo pendant un temps relativement court afin de ne pas trop avoir de déperdition cellulaire et d'obtenir une intégration active du rétrovirus porteur du transgène. Deuxième astuce : les chercheurs ont choisi de réimplanter les cellules souches transgéniques dans des testicules azoospermiques de souriceaux afin d'avoir une plus grande capacité de renouvellement des cellules (l'essai précédant avait été fait chez des rats adultes). Outre une meilleure imprégnation en facteurs de croissance et en hormones, l'absence d'architecture « rigide » au sein du testicule (liée au réseau des cellules de Sertoli) facilite la colonisation du testicule par le greffon.
Ces conditions de culture et d'implantation ont permis d'obtenir une intégration stable du gène transfecté à la fois dans des cellules souches germinales d'animaux adultes et nouveau-nés, avec un pourcentage d'expression allant de 2 à 20 %.
4,5 % de la descendance
Après transplantation dans des testicules de souriceaux stériles, environ 4,5 % de la descendance était porteuse du caractère transgénique. Quelques individus des générations ultérieures étaient même toujours porteurs du transgène. Certes, la transmission du caractère n'était pas de 100 % mais les chercheurs ont tout de même prouvé que l'on peut modifier définitivement le patrimoine génétique des cellules souches testiculaires par une transfection réussie suivie d'une transplantation chez un mâle hautement fertile. Les auteurs - qui estiment que le niveau de technicité et le temps nécessaire à l'obtention d'une descendance transgénique sont identiques à ceux des travaux sur cellules femelles - ont déjà préparé une stratégie pour améliorer leurs résultats.
(1) Makoto et coll. « Proc Natl Acad Sci USA».
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