Constat. « En France, quelques centaines de médecins généralistes seulement ont suivi une formation et obtenu un diplôme en sexologie, et même dans ce cas, la sexologie ne constitue qu’une très faible partie de leur exercice professionnel », rappelle le sociologue Alain Giami. Ce dernier a conduit entre 2002 et 2004 une enquête de terrain auprès de trente-cinq médecins généralistes exerçant dans trois régions différentes. Fondée sur la base d’entretiens semi-directifs, cette étude lui a permis de dresser quatre postures différentes « qui donnent une esquisse du processus de spécialisation informelle des médecins généralistes en ce qui concerne l’abord de la sexualité ».
En premier lieu, « l’évitement » de la question, qui revêt, alors, une dimension d’exclusion sélective où les praticiens ne font pas rentrer les plaintes liées à la sexualité dans le champ de leur activité médicale. Une posture qu’ils justifient de manière récurrente par le fait que « leurs patients n’abordent pas la question et n’expriment pas de demande à ce sujet ».
En deuxième lieu intervient la posture de « l’évitement relatif », dans laquelle le généraliste traite « les problèmes liés à la sexualité selon le modèle de l’appropriation médicale ». Double avantage, le médecin se retrouve sur un terrain balisé et familier où face à des symptômes ou à des conduites à risque il pourra proposer des réponses médicalisées, et dans le même temps, il pourra plus aisément rencontrer les attentes de patients qui « n’apprécieraient pas qu’on explore leur vie sexuelle plus en détail ».
Vient ensuite l’abord de la sexualité en termes d’ « approche globale », qui prend en compte tant les dimensions physiologiques et fonctionnelles de la question que ses composantes psychologiques et relationnelles. Bref, une approche « qui associe examen somatique et écoute soutenue des patients », et pour laquelle le généraliste éprouve une satisfaction « associée à sa pratique professionnelle », qui tranche avec l’embarras exprimé par ses confrères chez qui l’évitement domine. Enfin, le dernier groupe est constitué par celles et ceux qui, souvent fortement intéressés par la psychologie, placent « la sexualité en centre de leur pratique en médecine générale et qui considèrent qu’elle constitue une dimension du bien-être ». Ce qui les conduit ainsi à suivre cette fois, une spécialisation formelle via des formations ad hoc en sexologie.
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