Sur un modèle canin de la maladie de Duchenne

Une thérapie par méso-angioblastes

Publié le 15/11/2006
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LA DYSTROPHIE MUSCULAIRE de Duchenne (DMD) est l’une des maladies génétiques paralysantes graves parmi les plus fréquentes. Elle est caractérisée sur le plan moléculaire par des anomalies de la protéine « dystrophine » codée par un gène porté sur le chromosome X. Il existe un modèle animal, le chien golden retriever (chien Grmd), qui reproduit les altérations du gène de la dystrophine et le spectre de la pathologie humaine. Les animaux atteints présentent une mutation unique (intron 6) entraînant une absence totale de la protéine dystrophine et une dégénérescence musculaire sévère avec, pour finir, une perte quasi totale de la mobilité. Le chien meurt d’insuffisance respiratoire vers l’âge de 1 an.

Chez les humains comme chez les animaux, c’est la fibre du muscle squelettique qui est le siège de la dégénérescence.

Maurilio Sampaolesi, Giulio Cossu et coll. (Milan, Italie) se sont intéressés aux technologies par les cellules souches, qui se révèlent capables de former des types cellulaires et des tissus bien différenciés (l’une des stratégies à l’étude dans la DMD). Ils rapportent, dans « Nature », avoir transplanté chez le chien Grmd des cellules souches de deux provenances : allogreffe ou cellules souches autologues, mais après correction du défaut génétique (insertion de copies du gène manquant).

Ils ont obtenu une amélioration très importante de la fonction musculaire des chiens ainsi traités. Les animaux retrouvent de manière extensive l’expression de la dystrophine, accompagnée d’une récupération de la morphologie et de la fonction musculaire normales.

L’une des clefs de cette réussite tient à la nature des cellules utilisées. Dans leur laboratoire, Cossu et Sampaolesi ont identifié un nouveau type de cellules souches, les méso-angioblastes, cellules souches associées aux vaisseaux et que l’on peut recueillir à partir des petits vaisseaux sanguins. Ces cellules se divisent, bien sûr, mais ont aussi la particularité d’être préprogrammées pour se différencier en cellules musculaires.

Il existe toute une variété de cellules souches qui peuvent devenir des cellules musculaires lorsqu’on les injecte dans le courant sanguin ou même directement dans le muscle. Mais les méso-angioblastes ont des avantages particuliers. «Ils sont relativement faciles à isoler et elles peuvent se multiplier facilement en milieu de culture cellulaire sans perdre leur capacité à former du muscle.»

Ils traversent la paroi artérielle.

Quand les méso-angioblastes sont perfusés dans les artères, ils en traversent la paroi pour se greffer là où on les attend (dans le muscle) et réparer le dommage des cellules musculaires «avec une surprenante efficacité». Ce qui est idéal quand on veut traiter une maladie musculaire diffuse.

Dans leur étude, les chercheurs ont perfusé les cellules dans les artères des membres postérieurs des chiens malades. Ils ont inséré dans les méso-angioblastes des copies de gènes de dystrophine tronquée associés à des gènes qui gouvernent l’introduction de la protéine dans le muscle. Cette dystrophine raccourcie a été choisie car elle corrige la plupart des anomalies des modèles de souris. De fait, on a constaté une nouvelle expression de la protéine dystrophine dans plusieurs groupes musculaires des chiens à des endroits éloignés du territoire de l’artère perfusée.

En général, les résultats ont été meilleurs chez des chiens qui ont reçu les méso-angioblastes de donneur. Mais, en application humaine, l’utilisation de cellules souches autologues serait plus facile pour surmonter les problèmes de tolérance (donneurs compatibles ou traitement immunosuppresseur).

La meilleure dissémination des méso-angioblastes a été obtenue lors de perfusions par voie aortique : l’animal a récupéré la marche en cinq mois.

Maurilio Sampaolesi et coll. et commentaires par Jeffrey Chamberlain. « Nature » Publication en ligne le 15 novembre 2006.

> Dr BÉATRICE VUAILLE

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8052