Le climat est à l’inquiétude quand aux résistances aux antibiotiques. Assiste-t- on réellement à une aggravation du phénomène des résistances ?
Dr Bruno Coignard. On a la fois des bonnes nouvelles et des moins bonnes. Pour le staphylocoque doré résistant à la méticilline (SARM), principale bactérie multirésistance à l’hôpital, on a enregistré des progrès notoires. Les hôpitaux ont mis en place depuis la fin des années 1990 des mesures de contrôles de la résistance des staphylocoques à la méticilline qui ont fait preuve d’une bonne efficacité puisque tous les marqueurs sont à la baisse depuis plusieurs années. Ainsi la fréquence de ce type de résistance est passée à 24,5 % en 2007 contre plus de plus de 30 % il y a 10 ans. En revanche, pour les entérobactéries productrices de bêta-lactamase à spectre étendu (EBLSE), les marqueurs sont plutôt à la hausse. À l’hôpital, on a notamment une tendance à l’augmentation de la proportion de souche d’E. coli résistante aux céphalosporines de 3e génération qui atteint environ 4 % contre environ 1 % en 2002. On a donc une augmentation régulière d’autant plus inquiétante qu’E. coli est un germe assez répandu responsable de nombreuses infections y compris en communauté.
Justement, qu’en est-il en ville ?
Dr B.G. Ces chiffres reflètent ce qui se passe l’hôpital mais aussi, en partie, ce qui peut se passer en ville. Malheureusement, en termes de surveillance de la résistance aux antibiotiques en ville, on a beaucoup moins de données, faute de réseaux de surveillance. Une des priorités de l’Inves et de nos partenaires est donc de renforcer nos systèmes de surveillance en ville. Ce qui est sûr, c’est que les tendances sont à l’augmentation des résistances aux céphalosporines de 3e génération, pour la plupart des entérobactéries, en particulier E.Coli. Or, quand on devient résistants à des molécules comme les céphalosporines, on va vers des molécules de réserve comme les carbapénèmes et l’on augmente potentiellement la pression de sélection liée à l’usage de ces antibiotiques plus forts, avec un risque d’émergence de résistance aux carbapénèmes comme cela a été le cas pour NDM-1.
NDM-1 constitue-il une réelle menace en France ?
Dr B.G. Il faut rester vigilant, même si en France l’on n’est pas du tout parvenu au point de voir une émergence du NDM-1 en communauté. Il faut relativiser. L’article du Lancet concernait l’Inde et le Pakistan où l’usage des antibiotiques n’est pas du tout aussi contrôlé qu’ici avec, notamment, une part importante d’automédication et un accès aux antibiotiques beaucoup plus libre, voire non maîtrisé.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature