ILS SONT 170 pilotes en France, dans leur majorité d'anciens militaires, à faire tourner les 38 hélicoptères blancs du pays. Et ils sont en colère.
Depuis vingt ans que la flotte des hélicoptères SAMU est entièrement privatisée, il s'agit du premier mouvement social de ces pilotes. Les quatre grèves organisées depuis la mi-août ont été très suivies, sans conséquence toutefois sur les prises en charge médicales grâce aux réquisitions préfectorales.
Les revendications des pilotes tiennent en dix points. Au menu, hausse salariale, reprise d'ancienneté et réorganisation des conditions de travail.
Le dossier a atterri au ministère de la Santé, qui tente de désamorcer la crise en activant la publication d'un décret qui encadrerait avec précision le temps de travail des pilotes d'hélicoptères SAMU. Un point crucial pour les pilotes, qui font bon ménage avec les équipes médicales sur la plupart des sites. Mais, dans certains SAMU, des tensions existent. «Jusqu'à il y a peu, nous étions par endroits corvéables à merci, sous la pression des médecins qui nous imposaient des astreintes non rémunérées la nuit alors que notre contrat ne le prévoit pas, explique Thierry Coiffard, du Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL). Le ministère de la Santé a eu vent de ces pratiques et y a mis fin courant septembre en faisant un rappel aux agences régionales de l'hospitalisation.»
Des tarifs « au ras des pâquerettes ».
Le décret tant attendu serait dans les tuyaux. Vendredi, le ministère de la Santé n'était pas en mesure de se faire plus précis, mais pour les pilotes l'affaire est quasiment réglée. Reste la question des salaires, plus bas que dans le restant de l'Union européenne : les pilotes ont entamé un bras de fer avec les sociétés privées qui les emploient. Elles sont quatre à se partager le marché des SAMU ; toutes font la sourde oreille. L'une d'elles, Hélicoptères de France, s'explique : «Si on paye nos pilotes plus cher, on perdra des clients: les hôpitaux payent tous au ras des pâquerettes, au minimum de laconvention collective des pilotes, raconte Jean-Marc Genechesi, responsable des opérations SAMU . C'est donc la grille salariale des pilotes qu'il faudrait remonter.» Les négociations entre syndicats de salariés et d'employeurs, pour l'heure, semblent dans l'impasse, si bien que les pilotes n'excluent pas une cinquième grève prochainement. «Il est arrivé qu'on nous fasse voler la nuit pour faire gagner du temps aux équipes médicales pour des transports secondaires qui auraient pu soit être anticipés, soit attendre le lendemain, conteste le pilote Thierry Coiffard . Le fonctionnement de l'hôpital ne doit pas être réglé par l'hélicoptère: s'il y a un manque d'effectif médical, ce n'est pas notre problème.» «Nous ne voulons plus être la variable d'ajustement, en termes de moyens, dans la chaîne des secours», résume un autre pilote, Philippe Lefebvre, qui précise que sur son site, Toulouse, «tout va bien».
Pour certains médecins, ce mouvement de grogne entrave la bonne marche des SAMU. Le Dr Nicolas Letellier est de ceux-là : «Dans les SAMU qui ont un contrat de jour pour les transports héliportés, nous faisons peu de réquisitions la nuit, mais les pilotes trouvent que c'est trop», regrette le directeur du SAMU d'Eure-et-Loir, également président de l'AFHSH (l'association des médecins de SAMU utilisateurs d'hélicoptères).
Le Dr Letellier nie l'existence d'un glissement récent, et d'une intensification des sorties de nuit dans les SAMU. «Les pilotes volent une à deux heures par jour, une semaine d'affilée, et les vingt autres jours du mois, ils sont chez eux: il y a pire», dit-il. D'autres médecins urgentistes appellent à plus d'indulgence. «On n'est pas d'accord avec la position radicale du DrLetellier, qui est un peu seul dans son association. Les revendications des pilotes SAMU sont légitimes, nous les soutenons», dit un praticien.
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