Pourtant, pour le moment, il n’y a aucune raison de s’en prendre au pouvoir, qui a conduit de main de maître cette terrible séquence, ni à l’opposition qui a refusé l’occasion d’un débat d’autant plus déchirant qu’il porte sur un danger sérieux pesant sur les fondements de la démocratie française. On s’est très vite créé des épouvantails. D’aucuns ont cru bon de récuser à l’avance le « Patriot Act » américain parce qu’il nuit à la liberté des citoyens des États-Unis. Comme chacun sait, l’Amérique est devenue, à cause de cette loi, un bouge dictatorial. Personne dit que, depuis les attentats du 11 septembre, qui semblaient annoncer une vague d’attentats répétitifs aux États-Unis, le seul acte grave de terrorisme a été celui du marathon de Boston. N’est-ce pas la preuve que, en dépit de ses graves défauts, le « Patriot Act » a permis de prévenir de nombreux attentats ? Il y a loin de la scholastique misérable de nos commentateurs à la nécessité d’établir les priorités, et la première priorité consiste à faire en sorte que la France empêche les attentats de se produire. Sur une chaîne de télévision, j’ai entendu un imam dire le ledemain de la tuerie à « Charlie Hebdo » : « Nous sommes les premières victimes ». Mais non, Monsieur, les premières victimes sont les dix-set personnes assassinés.
Bien sûr, il faut se garder de tout amalgame et ne pas assimiler l’immense majorité des musulmans de France à une infime minorité vouée à la violence. Mais dans tous les cas historiques de montée du fascisme, c’est une minorité agissante, face à une majorité amorphe, qui a fait basculer des sociétés entières dans la dictature, dans la violence d’État, dans la destruction d’êtres humains. Le gouvernement le sait parfaitement, qui a pris des mesures draconiennes en envoyant l’armée protéger les sites menacés, notamment les écoles juives et les synagogues, qui a témoigné d’une solidarité sans failles aux juifs de France et aux familles des victimes, qui soutiendra la parution de « Charlie Hebdo » par tous les moyens, financiers compris. Mais François Hollande, Manuels Valls et Bernard Cazeneuve, que, pour ma part, j’ai trouvés admirables pendant tous ces jours douloureux, ont compris depuis le 7 janvier qu’il faut tuer le terrorisme dans l’œuf et que ce ne sera sûrement pas une partie de plaisir. Ils ont compris que la guerre contre le djihadisme se fait en Afrique, au Proche-Orient et en France aussi ; et ils prennent donc des dispositions d’ordre militaire. Ce n’est pas gai pour les civils, nous avons tous sûrement le sentiment que la peur limite nos libertés, mais le plus important, c’est de vivre, de ne pas tomber sous les balles d’assassins inexcusables.
Nous sommes tous des cibles potentielles.
Ce peuple formidable qui est descendu dans toutes les rues de France dimanche dernier mérite d’abord d’être protégé. La perte de liberté liée à la menace des attentats ne date pas d’aujourd’hui dans notre pays. Il suffit de savoir comment les voyageurs sont traités dans les aéroports. Les terroristes ont réussi à nous transformer tous en cibles potentielles, en personnes craintives, soumises à des contrôles qui ne devraient pas avoir lieu d’être à l’heure de l’Europe et de Schengen. Justement, il faut une politique européenne de sécurité. Il faut mieux contrôler les flux migratoires. Il faudra non seulement protéger les sites sensibles, mais lancer un vaste programme d’éducation en direction de ces enfants ou adolescents qui n’ont pas voulu respecter la minute de silence. Il faut non pas vitupérer l’immigration, comme ne cesse de le faire Marine Le Pen, mais multiplier les efforts d’intégration. Le gouvernement que nous avons est capable de lancer ces diverses entreprises malgré les tâches qui l’accablent. Et il est également capable de passer des accords avec l’opposition sur la politique à suivre.
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