Une semaine pour le dépistage

Publié le 22/06/2008
Article réservé aux abonnés

LA DÉNUTRITION de la personne âgée est fréquente et mal prise en compte. Les apports énergétiques nécessaires sont en effet de 30 à 40 kcal/kg/jour, soit de 2 100 à 2 800 kcal/jour pour une personne de 70 kg, du même ordre que ceux d'un adulte jeune, voire supérieurs. Pour les protéines, 100 g par jour permettent l'équilibre. Or, souvent, ces objectifs ne sont pas atteints. C'est pourquoi la Haute Autorité de santé (HAS) préconise un dépistage annuel systématique de la dénutrition par le médecin de ville, et mensuel dans les institutions. Pour les patients atteints d'Alzheimer, les besoins fondamentaux sont identiques, mais la surveillance doit être plus rapprochée, adaptée à l'évolution de la maladie.

La dénutrition est confirmée, lorsque la perte de poids est supérieure à 5 % en un mois, à 10 % en six mois, ou que l'IMC (indice de masse corporelle) est inférieur à 21. Elle s'aggrave surtout lors des situations à risque, qui sont d'ordre environnemental (hospitalisation), médical (infection intercurrente, traumatisme), organique (trouble de la déglutition), psychiatrique (syndrome dépressif). La dénutrition évolue en quatre phases, de la simple aversion alimentaire au stade ultime où le patient refuse toute nourriture. Souvent présente dès le début de la maladie, elle constitue un signal d'alerte au même titre que les autres symptômes. Elle est liée aux troubles mnésiques, à la désorientation temporospatiale, et aggravée par la perte d'appétit consécutive aux traitements médicamenteux.

Les conséquences de la perte de poids sont multiples. Elle augmente les risques de comorbidité car les défenses immunitaires diminuent. Ainsi, le risque infectieux devient de trois à six fois supérieur. Les chutes sont plus fréquentes en raison de la fonte musculaire rapide. Les capacités cognitives s'altèrent plus vite. L'asthénie et l'anorexie s'installent et le pronostic s'assombrit.

Précocement traitée, la dénutrition est réversible, c'est pourquoi la prise en charge s'impose dès le diagnostic posé. Selon les recommandations officielles de la HAS, tout patient Alzheimer doit recevoir des conseils diététiques appropriés : équilibrer les repas, varier les goûts, adapter l'environnement aux possibilités des patients (utilisation de couverts simples pour manger seul, ou aide extérieure si impossible), adapter la prise de nourriture aux éventuels troubles praxiques et aux troubles de la déglutition, fractionner les repas, enrichir les plats en protéines par l'adjonction de poudre de lait ou d'oeufs.

Lorsque ces conseils ne suffisent plus, les compléments nutritionnels oraux prennent le relais. Ils se présentent sous différentes formes, généralement bien appréciées : crèmes, yaourts à boire, boissons sucrées ou poudre de protéines. Pour stimuler l'appétit, les parfums et les présentations doivent varier. Prescrits par le médecin, ils ne remplacent pas tout ou partie du repas et sont pris à part, généralement à 10 heures ou à 16 heures. Très utiles, ils apportent l'énergie et les protéines, des antioxydants et contribuent à la ration hydrique souvent déficitaire. Ils facilitent l'augmentation de la masse musculaire et de l'IMC. Les infections sont moins nombreuses et l'autonomie augmente.

La nutrition entérale par sonde nasogastrique est parfois nécessaire pour passer un cap difficile avant le retour à la nutrition orale.

Ainsi, la cachexie terminale des patients atteints d'Alzheimer est évitée et leur vie s'allonge, autant que possible, dans la dignité.

Pour la semaine nationale jusqu'au 28 juin, les médecins généralistes et les pharmaciens d'officine disposent de posters et de brochures afin de sensibiliser les patients. Un guide de conseils pratiques à destination du personnel soignant et des proches est disponible en institution et en pharmacie, ainsi que dans les centres et les consultations mémoire.

* www.depistage-denutrition.com.

> Dr JACQUELINE-MARIE BIGNON

Source : lequotidiendumedecin.fr: 8397