LA TOUR, avec ses 59 étages, est la plus haute d'Europe, 5 000 personnes y travaillent et 600 000 touristes la visitent chaque année. Or cette tour symbole est infestée d'amiante, comme l'a annoncé « le Journal du dimanche ».
Ce n'est ni une surprise, ni une révélation, ni un cas particulier. Le Pr Claude Got, auteur du rapport de 1998 qui a inspiré la législation actuelle, rappelle que, « au XXe siècle, on a importé en France l'équivalent de 80 kg d'amiante par habitant ».
Jusque dans les années 1990 (il a été interdit à partir du 1er janvier 1997), l'amiante, très bon isolant et résistant au feu, a été très utilisé dans la construction et de nombreux secteurs de l'industrie. Les cristaux de ce minéral étaient tissés en fibres, incorporés dans des matériaux comme le ciment ; lorsque ces matériaux se délitent, les cristaux risquent d'être inhalés. L'exemple le plus connu est celui du campus de Jussieu (universités Paris-VI, Paris-VII et Institut de physique du globe) : la présence d'amiante y a été décelée en 1994 à la suite de maladies respiratoires dont souffraient des membres du personnel et, en 1996, la décision de lancer le désamiantage a été prise ; les travaux, qui devaient initialement durer trois ans, ne devraient pas être terminé avant 2012, pour un coût total de 800 millions d'euros. Les hôpitaux ne sont pas à l'abri. A Saint-Louis, douze agents de maintenance présentent des plaques pleurales, maladie liée à l'amiante ; les syndicats ont demandé il y a quelques jours un recensement des salariés et anciens salariés susceptibles d'avoir été exposés ainsi qu'un recensement des locaux contenant de l'amiante, que l'AP-HP pourrait étendre à tous ses établissements qui ne l'ont pas encore fait.
Diagnostics en ligne.
Pour la tour Montparnasse, le diagnostic prévu par la réglementation au 31 décembre 2003 a pris du retard. Alain Carrey, l'expert représentant les copropriétaires, met en cause le cabinet qui a conduit les expertises, ARS (Agence des risques sur la santé), lequel renvoie la responsabilité au gestionnaire de la tour. Quoi qu'il en soit, comme le souligne Michel Parigot, vice-président de l'Association des victimes de l'amiante (Andeva), « il y a un retard flagrant, qui pose le problème du contrôle de la réglementation et de l'absence de sanctions ». Dans son rapport, Claude Got proposait de mettre en ligne sur Internet tous les diagnostics des bâtiments. « Ce n'est rien à faire techniquement, explique-t-il aujourd'hui. Seulement, il faut la volonté politique de le faire, et les gouvernements ne l'ont pas eue parce qu'ils ont eu peur qu'il y ait un effet d'épouvantail, que plus personne ne veuille fréquenter ces bâtiments-là, que les employés refusent même d'y travailler. »
Il n'y a « actuellement pas de danger pour les occupants de la tour », affirme Alain Carrey. Il ajoute : « Il y a un danger, qui est sous contrôle, pour les intervenants pour maintenance. » Les quatre étages techniques de la tour, ceux qui abritent les traitements d'air, la production d'électricité, d'eau chaude et d'eau froide, ne sont pas occupés mais font l'objet régulièrement d'intervention technique pour maintenance. Ils présentent des concentrations d'amiante importantes. Selon « le Journal du dimanche », il y a deux possibilités pour le désamiantage : une réhabilitation du site occupé pendant dix ans ou une intervention sur la tour vidée de ses occupants pendant trois ans, pour un coût évalué à 4 millions par étage.
On recense actuellement quelque trois mille victimes de maladies liées à l'amiante chaque année, principalement des personnes ayant travaillé dans les chantiers navals, la marine, le bâtiment, la mécanique automobile...
Le désamiantage
Le processus de désamiantage d'une zone telle que le campus de Jussieu exige des mesures de sécurité comparables à celles mises en place pour les installations nucléaires.
Il faut d'abord déménager et dépoussiérer les matériels présents dans les locaux, retirer portes et cloisons et confiner la zone. Il faut ensuite déposer les faux plafonds ou les placards techniques pour accéder à l'amiante. Le métal est enlevé à la main après avoir été humidifié pour éviter les émissions de poussières. Les opérateurs portent une combinaison spéciale et un masque et respirent de l'air artificiel traité et contrôlé régulièrement. Dernière opération : évacuer non seulement l'amiante, mais aussi les déchets qui ont été en contact avec lui, seront lavés et, dans certains cas, retraités.
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