LA LECTURE des grands essais de morbi-mortalité portant sur la prise en charge du diabète de type 2 est riche d’enseignements pour la pratique, comme l’a montré le Pr Anne Vambergue lors de ce « Rendez-vous du Quotidien ».
STENO 2 a inclus 160 diabétiques de type 2 ayant une microalbuminurie dans l’objectif de comparer une stratégie dite conventionnelle ne visant que l’HbA1c, à une stratégie intensive s’attaquant à tous les facteurs de risque. La prise en charge globale a été nettement plus bénéfique que le seul traitement de l’hyperglycémie : elle a entraîné une diminution de 50 % les complications macro et microvasculaires au terme d’un suivi de 13 ans, avec une différence en faveur du traitement intensif qui s’est accrue avec le temps.
L’étude UKPDS, qui porte sur des patients à un stade précoce de la maladie, a elle aussi montré le bénéfice d’une prise en charge intensive et globale. Elle a en effet montré que la diminution de l’HbA1C de 7,9 à 7 % s’est accompagnée d’une baisse de la mortalité de 12 %, du risque de complications microvasculaires de 25 % et de celui d’infarctus du myocarde (IDM) de 16 %, ce dernier pourcentage n’atteignant pas le seuil de significativité statistique. Comme dans STENO 2, le suivi de cette cohorte de patients pendant douze ans après la fin de l’étude a montré que le bénéfice du contrôle glycémique s’accentue au fil du temps. Alors que la différence du taux d’HbA1c entre le groupe « traitement conventionnel » et le groupe « traitement intensif » s’est progressivement estompée après l’arrêt de la phase active de l’étude, la morbi-mortalité a continué de diminuer dans ce deuxième groupe. La baisse de la mortalité globale a atteint 13 %, celle des infarctus du myocarde fatals et non fatals 15 % et celle des complications microvasculaires 24 %. Par exemple, le risque relatif de rétinopathie du groupe « intensif » comparativement au groupe « conventionnel », est passé de 1,03 à 3 ans, à 0,83 à 6 ans et à 0,79 à 12 ans (p = 0,015). L’écart s’est même creusé davantage pour la néphropathie avec un risque relatif de 0,83 à 3 ans, 0, 88 à 6 ans, 0,76 à 9 ans et 0,67 à 12 ans (p= 0,000054).
Aujourd’hui, il apparaît primordial d’intervenir tôt dans l’histoire naturelle du diabète et intensivement alors qu’il n’y a pas encore de complications. En effet, l’objectif est de préserver le capital insulinique et ceci de façon durable. La cellule bêta perd de sa fonctionnalité progressivement et l’insulinorésistance est très précoce bien avant le diagnostic de diabète. Des études dans la littérature ont montré qu’au cours de l’intolérance au glucose, les patients ont déjà perdu environ 80 % de leur masse de cellules bêta avec une part d’insulinorésistance importante. Il faut donc intervenir tôt dans l’histoire du diabète, et cibler les mécanismes en cause dans l’insuffisance de production d’insuline par ces cellules. Cette approche devra s’inscrire dans une prise en charge globale : maintenir durablement la glycémie à une valeur acceptable, préserver la cellule bêta le plus longtemps possible, contrôler le poids et tous les autres facteurs de risque, protéger le système cardiovasculaire et les autres organes, éviter les hypoglycémies
Ces données montrent bien que le traitement doit être adapté de façon individuelle. La stratégie et les objectifs seront différents suivant l’âge du malade, l’ancienneté du diabète et les comorbidités. Le diabète est un bon exemple de la médecine personnalisée. Il n’en reste pas moins qu’il faut tout faire pour obtenir un excellent contrôle glycémique, mais aussi des autres facteurs de risque, surtout chez un sujet jeune. Une situation de plus en plus fréquente, puisque non seulement le diabète progresse, mais les patients sont de plus en plus jeunes.
*Service de diabétologie et de pathologies hypothalamo-hypophysaires, CHRU de Lille
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