« Notre démonstration que l'UCP-3 est la molécule qui médie la réponse thermogénique à l'ecstasy suggère que des agents conçus pour viser les protéines de découplages pourraient ouvrir une nouvelle et importante voie thérapeutique. » Cette phrase, extraite de l'article publié par Edward M. Mills (Bethesda, Etats-Unis) et coll. dans la revue « Nature », conclut un travail mettant en évidence la place clé d'une protéine dans la survenue des hyperthermies lors des surdosages en ecstasy (ou MDMA).
Il y avait urgence à comprendre ce qui se passe chez les consommateurs d'amphétamine. De fait, entre 1995 et 2000, l'utilisation d'ecstasy a augmenté de 70 %, avec une élévation concomitante du nombre de décès. La majorité d'entre eux est due à une hyperthermie maligne conduisant à une rhabdomyolyse et à une défaillance multiviscérale.
Les muscles squelettiques, rappellent les chercheurs, jouent un rôle dans la thermogenèse adaptative en fabriquant de la chaleur, probablement par l'intermédiaire de protéines de découplage mitochondriales (UCP, pour uncoupling protein). Si la graisse brune est riche en UCP de type 1, important médiateur de la thermorégulation, Il existe deux autres protéines de découplage proches l'une de l'autre, UCP-2 et UCP-3. Elles ont 50 % de leur séquence en commun avec UCP-1.
C'est à ce point que la recherche américaine prend son importance. UCP-3 étant principalement exprimée dans le muscle squelettique et l'ecstasy majorant la température à ce niveau, les scientifiques ont suspecté un rôle de cette protéine dans l'effet secondaire fatal de la drogue.
Elévation thermique émoussée
L'équipe américaine a comparé des souris dites « sauvages » à des souris mutantes déficientes en UCP-3 (UCP-3-/-). Chez les deux lots de rongeurs, la température basale était similaire. Lors de l'administration de MDMA, les rongeurs sauvages ont présenté une élévation thermique dans la première heure, persistant pendant deux heures. Chez les animaux mutants, l'élévation thermique (musculaire et centrale) a été significativement émoussée. Le faible taux d'UCP-2, exprimé par les muscles des souris mutantes, peut expliquer cette élévation très modérée de température.
Puisque l'hyperthermie peut être mortelle, les Américains ont testé l'action d'une dose létale d'ecstasy sur les deux lots de souris. Seuls les rongeurs UCP-3-/- ont survécu.
« Nos résultats suggèrent que UCP-3 est nécessaire à l'élévation de la température musculaire et centrale associée à l'administration de MDMA », concluent les chercheurs. Cependant des recherches complémentaires seront nécessaires pour déterminer si l'ecstasy agit par stimulation directe de l'activité de découplage. La réponse thermique des sujets qui prennent des doses excessives de MDMA est variable. Cette variation pourrait être liée à l'activité de découplage de leurs muscles squelettiques. Enfin, UCP-2 et/ou UCP-3 pourraient participer à l'action toxique d'autres substances telles que l'éphédrine, la methamphétamine ou la cocaïne.
« Nature », vol. 426-, 27 novembre 2003, pp. 403-404.
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