DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA DÉGÉNÉRESCENCE maculaire liée à l’âge (Dmla) est la première cause de malvoyance après 55 ans ; une forme sévère affecte près de 10 % des personnes de plus de 75 ans.
Cliniquement, la maladie se manifeste par l’accumulation de dépôts lipidoprotéiques extracellulaires, appelés drusen, dans la région centrale de la rétine (la macula) ; ce qui entraîne des complications, à savoir une atrophie de l’épithélium (forme sèche) et parfois une néovascularisation avec exsudats (forme humide). Le déclin progressif de la vision centrale (la vision périphérique restant intacte) entraîne d’abord une gêne à la lecture et à la conduite, puis peut évoluer vers une grave déficience visuelle.
Les facteurs de risque, encore mal connus, sont à la fois environnementaux et génétiques.
Le facteur H du complément.
En 2005, on a découvert un premier gène de susceptibilité majeure pour la Dmla : un variant (polymorphisme Y402H) du gène codant pour le facteur H du complément (CFH) est associé à un risque de Dmla multiplié par 2,5 à 5,5. Notons que le gène CFH est situé sur le chromosome 1q23.
L’activation du complément, un ensemble de protéines qui interviennent dans l’inflammation et la première ligne de défense de l’organisme, est étroitement contrôlée, et le facteur H représente un des inhibiteurs majeurs de son activation.
De précédentes études avaient déjà impliqué l’activation du complément dans la formation des drusen. Cette découverte était suivie la même année de l’identification d’un autre gène de susceptibilité majeure – LOC387715 ou PLEKHA1 – sur le chromosome 10q26, dont la fonction reste inconnue.
L’équipe dirigée par le Dr Anne Hughes (Queen’s University, Belfast) a analysé, sur le chromosome 1q23, le gène CFH et les cinq gènes voisins étroitement apparentés, appelés CFHR (1 à 5), qui régulent tous l’activité du complément. Deux groupes d’individus ont été étudiés : un groupe de 173 patients affectés de Dmla néovasculaire sévère, et un groupe témoin de 170 sujets âgés exempts de Dmla.
L’analyse a permis d’identifier un haplotype commun (haplotype 5) qui est associé à un risque diminué de Dmla. Il est trouvé sur 20 % des chromosomes des sujets témoins, par rapport à 8 % des chromosomes des patients atteints de Dmla.
La piste de cibles thérapeutiques.
Les chercheurs ont découvert que cet haplotype est caractérisé par la délétion des gènes CFHR1 et CFHR3. Ainsi, les porteurs homozygotes de cet haplotype 5 ont une déficience plasmatique complète des protéines codées par CFHR1 et CFHR3.
Il convient de noter que l’effet protecteur de cet haplotype de délétion a été confirmé dans une seconde étude cas-témoins.
Au vu de ces résultats, les chercheurs proposent l’hypothèse attrayante suivante : le CFH produit par l’ARNm de longueur complète pourrait être bénéfique, et les autres protéines apparentées au CFH pourraient interférer avec la régulation de l’activité du complément (en entrant en compétition avec le CFH).
«Des travaux supplémentaires s’imposent pour découvrir la complexité des protéines produites par ce groupe de gènes hautement dupliqués», notent les chercheurs.
Les futures recherches élucidant les rôles complexes que jouent les gènes apparentés au CFH dans la prédisposition à la Dmla pourraient désigner des cibles thérapeutiques utiles pour l’inactivation génétique (« gene silencing »), précisent les chercheurs.
Hughes et coll. « Nature Genetics », 24 septembre 2006, DOI : 10.1038/ng1890.
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