EN FRANCE, 70 % des nouvelles contaminations par hépatite C seraient liées à la toxicomanie, soit environ dix par jour. Soixante pour cent des 150 000 à 180 000 usagers de drogues (opiacés et/ou cocaïne) par voie veineuse ont une sérologie VHC positive, 20 % d'entre eux vont guérir spontanément, 80 % développeront une hépatite C chronique*.
Or, la prise en charge des usagers de drogues par voie intraveineuse (UDIV) est notoirement insuffisante (moins de 10 % sont pris en charge et traités) malgré les deux plans de lutte contre l'hépatite C (programme 1999-2002 et plan gouvernemental 2002-2005), dont les objectifs étaient d'améliorer la prévention, le dépistage et l'accès aux soins de ces patients et alors que tout existe pour une prise en charge effective (médecins traitants, unités de soins, médicaments, remboursements...).
Ce déficit d'accès aux soins est un problème majeur, car ces patients, qui pourraient être guéris par le traitement de référence (interféron pégylé + ribavirine), sont les principaux réservoirs infectants pour le VHC.
D'où vient la faille ? les soignants et les patients ont chacun leur part de responsabilité. Nombreux sont encore les médecins qui hésitent à prendre en charge des patients étiquetés « difficiles » (anciens toxicomanes et/ou traités par des médicaments de substitution, souvent instables psychiquement) qui sont pourtant « bons répondeurs » et observants quand ils sont bien encadrés et bien préparés. Certains en sont encore aux prescriptions limitatives et dépassées des conférences de consensus antérieures : exigence de l'abstinence d'alcool et de drogues, sous-utilisation des alternatives à la biopsie hépatique redoutée par les patients, recours au seul dosage des transaminases et non à la PCR qualitative et à la détermination du génotype viral avant l'institution du traitement.
Comme beaucoup d'autres malades chroniques, les toxicomanes refusent d'admettre la gravité de leur maladie, ils repoussent l'échéance de la biopsie et des prélèvements, qu'ils redoutent, et une hospitalisation qu'ils appréhendent. Ils craignent les effets secondaires du traitement et doutent de son efficacité.
Or ces dernières années ont été marquées, d'une part, par la possibilité de prescrire en ville des traitements de substitution aux usagers de drogues et, d'autre part, par des avancées thérapeutiques majeures et la mise au point de nouvelles méthodes d'évaluation de l'état du foie (Fibrotest/fibroscan) qui permettent d'éviter le recours systématique à la biopsie hépatique.
Les conséquences de la diffusion des traitements de substitution et de leur prescription en ville sont une entrée et un maintien dans le système de soins de bon nombre d'usagers de drogues. De ce fait un certain nombre de médecins généralistes dépistent les hépatites C et B et participent à leur prise en charge.
Pour tenter d'apporter des solutions aux problèmes posés par la prise en charge des usagers de drogues infectés par le VHC, Schering-Plough a organisé une Journée nationale de réflexion « Toxicomanie et Hépatite C » qui a réuni des généralistes, addictologues, hépato-gastro-entérologues et associations de patients.
Travail en réseau.
La prise en charge de l'hépatite C chronique des patients usagers de drogues ou des ex-toxicomanes substitués et stabilisés implique un travail en réseau entre professionnels de santé de disciplines différentes (généralistes, hépatologues, psychiatres, addictologues...) avec les centres de soins spécialisés aux toxicomanes (Csst), les hôpitaux.
Le couple médecin généraliste-hépatologue est le pivot de cette prise en charge, souligne le Dr Laurent Cattan (généraliste à Paris, fondateur et président d'honneur de l'Association nationale des généralistes pour la réflexion et l'étude de l'hépatite C).
C'est au médecin généraliste de préparer le premier rendez-vous avec le spécialiste pour gagner un temps précieux. Son premier bilan devra être exhaustif pour éviter les examens biologiques chez des patients difficiles à prélever (étant donné leur état veineux) et pour donner tous les éléments indispensables à l'hépatologue (bilan clinique complet, bilan paraclinique minimal, bilan des addictions, du statut socio-professionnel, de la motivation du patient...).
Le début du traitement est fait « en douceur » au Csst après l'adhésion de toute l'équipe au projet de traitement des patients substitués, explique le Dr Joseph Moussali (hépatologue, Pitié-Salpêtrière, Paris). Les patients sont traités sur place mais le médecin généraliste reste au centre de la prise en charge de l'hépatite C pendant toute sa durée et en aval. Le médecin hépatologue est le référent technique qui participe, sur place, au staff à intervalle régulier, suit les dossiers et les traitements.
Afin d'optimiser cette prise en charge et faciliter les contacts entre tous les intervenants une fiche de liaison « Hépatites » est en cours d'élaboration.
Toxicomanie et hépatite C, conférence de presse organisée par le Laboratoire Schering-Plough.
* Ofdt (Observatoire français des drogues et des toxicomanies), Indicateurs et tendances 2002.
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