DEPUIS PLUS DE quatre ans, la prise en charge thérapeutique des personnes exposées au VIH fait l'objet d'une évaluation nationale coordonnée par l'Institut de veille sanitaire (InVS). D'abord limitée aux professionnels de santé, elle a été étendue en 1998 aux expositions liées, d'une part, à un rapport sexuel ou au partage de matériel d'injection chez les usagers de drogues et, d'autre part, aux situations regroupées sous l'intitulé « autres expositions » : piqûres par seringue abandonnée, contacts cutanés sanguins ou morsures lors de bagarre.
Les données disponibles en 2003 ont permis de réactualiser les indications du traitement antirétroviral postexposition. Selon la circulaire datée du 2 avril 2003, le traitement « doit être réservé aux situations à risque identifiable de transmission du VIH. Pour les autres situations, la balance entre le bénéfice escompté et le risque iatrogène n'est pas en faveur de la mise en route d'un traitement postexposition ». Plutôt qu'une association de trois antirétroviraux (trithérapie), il est recommandé de prescrire une quadrithérapie comprenant deux inhibiteurs nucléosidiques (IN) et du nelfinavir ou ritonavir-lopinavir pendant quatre semaines.
Fréquence des expositions sexuelles.
Les résultats publiés dans le « BEH » n° 48/2004 couvrent la période de janvier 2000 à décembre 2003. En quatre ans, 14 273 personnes ont été exposées à une source de statut VIH positif ou inconnu (les sources identifiées comme VIH négative ne sont pas déclarées). La majorité des expositions (64 %) survient après des rapports hétérosexuels, 36 % après des rapports homosexuels. Le risque de transmission est dans la plupart des cas élevé ou intermédiaire (12 % sont d'importance minime). Dans 77 % des cas, le statut VIH du partenaire est inconnu.
Les personnels de santé représentent un peu moins de 31 % des personnes exposées, avec un statut sérologique de la source positif dans 29 % des cas et un risque le plus souvent minime - seulement 13 % des cas ont été classées à risque élevé. La moitié des expositions classées « autres » (13,8 % de l'ensemble) est déclarée en milieu professionnel (policiers, femmes de ménage, des éboueurs etc.) et est liée à une source de statut inconnu avec un risque minime. Une très faible portion concerne les usagers de drogues partageant le même matériel d'injection (1,4 %), mais donne souvent lieu à l'instauration d'une prophylaxie (77 % des 61 cas déclarés). Elle est prescrite dans 64 % des cas d'exposition, plus souvent après un rapport sexuel (85 % des personnes qui ont consulté pour ce type d'exposition) et un peu moins fréquemment pour les expositions classées « autres » (44 %) ou celles qui impliquent le personnel de santé (35 %). Le type d'association choisi a varié au cours du temps : les bithérapies ont été de moins en moins prescrites (15 % en 2000 ; 3 % sur les huit derniers de l'année 2003), tandis que les quadrithérapies associant le ritonavir comme booster d'un autre inhibiteur de protéase (IP) ont augmenté au cours du temps, notamment à la fin de 2003. Cependant, les trithérapies avec nelfinavir restent les plus prescrites sur toute la période des quatre ans, les autres (avec indinavir ou un inhibiteur non nucléosidique [INN] ou 3 IN) sont devenues exceptionnelles.
Interruption prématurée.
Les effets secondaires, disponibles pour 3 863 personnes, ont entraîné l'arrêt des activités quotidiennes pour 10 % des patients ou des anomalies biologiques chez 6 % d'entre eux. Ils sont plus fréquents avec les quadrithérapies associant ritonavir-IP, association pourtant recommandée et sont à l'origine d'interruption prématurée du traitement. « Ce choix mériterait d'être reconsidéré dans cette indication », estiment les auteurs. L'objectif d'une limitation des prescriptions en cas de statut sérologique inconnu a moyennement été réalisé, sauf chez les personnels de santé, où les prescriptions ont diminué. « Malgré les recommandations, le taux de prescription après exposition sexuelle continue d'augmenter, notent les auteurs, alors que le statut VIH du partenaire reste le plus souvent inconnu. Les recommandations n'ont sans doute pas été suffisamment restrictives dans cette indication pour aider les cliniciens dans la décision de ne pas prescrire. » Dans le cas d'exposition « autre », les prescriptions ont aussi diminué, mais 30 % d'entre elles concernent encore des expositions à faible risque de transmission.
Compte tenu de ces observations, les auteurs estiment que l'évaluation nationale a atteint ses objectifs. La prophylaxie choisie depuis a fait la preuve de son efficacité, mesurée par le suivi sérologique réalisé à 3-6 mois. Cinq séroconversions ont été observées chez des patients traitées après des rapports sexuels, dont seulement deux pourraient correspondre à un échec de la prophylaxie. Le dispositif sera désormais recentré sur le suivi des données de tolérance dans le cadre du système de pharmacovigilance de l'Afssaps (Agence de sécurité sanitaire des produits de santé).
Baromètre gay 2002
Le « BEH » rend publics les résultats du baromètre gay mis en place à Paris par l'InVS et le Syndicat national des entreprises gaies (Sneg). Il a été réalisé entre le 15 juillet et le 31 décembre 2002 sur les lieux de rencontre gay (saunas, backroom, lieux extérieurs de drague, bars) afin d'évaluer les comportements à risque dans un contexte de résurgence de la syphilis chez les homosexuels masculins observée depuis 2000.
Dans la population interrogée, les comportements à risque sont fréquents. Plus du tiers a pratiqué une pénétration anale non protégée avec des partenaires occasionnels au cours des douze derniers mois, et la moitié des fellations avec exposition au sperme. Par rapport au baromètre gay 2000, la proportion des répondants franciliens ayant des rapports non protégés avec des partenaires occasionnels est plus élevée (36 % contre 25 %). Les résultats mettent en évidence un relâchement de la prévention et la persistance de comportements à risque et incitent au redéploiement des campagnes identitaires sur le VIH et les IST, notamment chez les jeunes et les séropositifs.
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