La chirurgie valvulaire a révolutionné le traitement des valvulopathies. Cependant, l'intervention n'est pas toujours possible, à cause de la gravité de l'état clinique des patients. Dans ces cas, une dilatation au ballon par voie percutanée peut être tentée.
Cette technique, mise au point vers 1985 par l'équipe de cardiologie du CHU de Rouen, ne permet chez l'adulte qu'une amélioration temporaire. Un remplacement valvulaire par voie transcutanée a déjà été réalisé chez l'enfant, en particulier à l'hôpital Necker (Paris) pour une atrésie pulmonaire (« le Quotidien » du 23 octobre 2000).
Le 16 avril, le traitement a été tenté avec succès à l'hôpital Charles-Nicolle de Rouen chez un adulte de 57 ans atteint d'un rétrécissement aortique. L'équipe de cardiologie du Pr Alain Cribier, qui travaille depuis les années quatre-vingt-dix à la conception d'une valve artificielle pouvant être implantée par cathétérisme cardiaque, a réalisé cette première.
La bioprothèse constituée de péricarde d'origine bovine est fixée à un stent (grillage cylindrique en acier). L'ensemble, de très petite taille, est comprimé et peut être déployé grâce à un ballonnet gonflable. Une fois placé à l'endroit souhaité, le stent assure, grâce à sa force radiale, l'immobilité du système, et la valve peut fonctionner comme une valve normale. Après des résultats encourageants chez l'animal, l'équipe prévoyait une implantation chez l'homme vers la fin de mai 2002.
L'histoire du patient de 57 ans a précipité le cours des événements. Arrivé au stade terminal de sa maladie et dans un état clinique grave (en choc cardiogénique), il a été transféré du CHU de Lille dans le service du Pr Cribier, pour une tentative de dilatation aortique traditionnelle. Le remplacement valvulaire par voie chirurgicale était, dans son cas, impossible à cause de l'état de choc cardiogénique. La dilatation a pu être réalisée le 10 avril. Les conditions difficiles (patient en état de mort imminente) n'ont pas permis une amélioration suffisante. Le pronostic à court terme restant désastreux, « une solution de dernière chance a alors été proposée au patient et à sa famille, qui ont accepté ».
Six jours après la tentative de dilatation, le Pr Cribier et son équipe ont donc effectué le remplacement de la valve. « La voie envisagée pour cette technique devait être l'artère fémorale, mais le patient avait une artérite sévère. Nous avons donc dû passer par la veine fémorale et atteindre l'aorte par voie trans-septale », explique le cardiologue. « La technique a été réalisée sans aucune difficulté, sans anesthésie générale et sous simple sédation. Elle a duré environ deux heures. La valve artificielle a pu être placée en regard de la valve malade. Les résultats ont été immédiatement évalués par angiographie et échographie transthoracique et transoesophagienne. Ils ont confirmé l'excellente fonction valvulaire obtenue. »
Tous les paramètres hémodynamiques montrent le rétablissement inespéré de la circulation sanguine : la pression artérielle, qui était effondrée, s'est normalisée dès la fin de l'intervention (PAS = 2 après 5 minutes) et les chiffres sont demeurés stables.
L'amélioration obtenue est « spectaculaire », note le Pr Cribier ; « deux heures après, le patient pouvait boire un verre de champagne et, le lendemain, rester assis pendant cinq heures ». Toutefois, il précise : « Le pronostic ne pourra être établi que dans quelques jours. Nous surveillons sa contractilité cardiaque par échographie. Sa fraction d'éjection qui était de 8 % est aujourd'hui de 25 %. Si elle atteint 35 à 40 %, nous pourrons le confier aux chirurgiens qui procéderont au remplacement valvulaire classique. »
Ce type de traitement pourrait constituer un espoir pour tous les patients chez qui la chirurgie est contre-indiquée ou à haut risque, ansi que chez les malades des pays en développement, qui n'ont pas accès à la chirurgie à coeur ouvert. L'autre évolution attendue est le remplacement de la prothèse par un péricarde de cheval plus résistant.
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