LA PLUPART des méningiomes sont sporadiques. Une petite proportion est attribuée à des gènes de grande pénétrance, qui produisent des agrégations familiales, mais elles sont rares et généralement associées à une neurofibromatose de type 2.
Toutefois, des agrégations familiales de méningiome ont été trouvées en dehors de toute présence d'une neurofibromatose. D'où l'hypothèse de gènes supplémentaires.
On sait peu de choses sur l'étiologie des méningiomes, si ce n'est que l'exposition aux rayons ionisants est un facteur environnemental dont l'effet est démontré. L'origine de cette démonstration provient d'une étude israélienne portant sur des immigrants traités dans les années 1950 par irradiation du cuir chevelu pour un tinea capitis, une dermatose mycosique qui atteignait des proportions épidémiques chez les ressortissants venus d'Afrique du Nord. A cette époque, les immigrants en Israël (comme dans d'autres pays) recevaient une dose curative de rayons X qui provoquait une alopécie temporaire.
Un risque relatif de 9,5.
Une cohorte de 10 842 immigrants irradiés pour tinea capitis et un nombre égal de témoins sont suivis depuis cinquante ans, la Tinea capitis Cohort (plus de 500 familles). Dans cette cohorte, on a constaté une augmentation significative des méningiomes, avec un risque relatif de 9,5.
Toutefois, moins de 1 % des personnes irradiées ont une tumeur, ce qui indique l'intervention d'autres facteurs après le début du processus tumoral dû aux radiations.
Le groupe qui suit la Tinea capitis Cohort a testé l'hypothèse d'une susceptibilité génétique présidant à l'acquisition de la tumeur chez les personnes irradiées. Il conclut à l'existence d'une telle prédisposition et à la nécessité de poursuivre les investigations si l'on veut identifier les gènes spécifiques.
Les études futures pourraient tenter de trouver des composants génétiques qui modifient les aptitudes individuelles à tolérer les dommages de l'ADN ou bien à les réparer avec succès. «Des gènes qui contrôlent la réparation de l'ADN et le contrôle du cycle cellulaire, comme le gène de l'ataxie télangiectasie, pourraient représenter de bons candidats.»
Cette susceptibilité génétique pourrait expliquer les agrégations de méningiomes dans des familles, où plusieurs membres ont été exposés à des agents carcinogènes. Les dermatoses mycosiques du cuir chevelu étant contagieuses, des fratries entières ont été traitées par irradiation. Elles ont pu être comparées à d'autres familles non exposées aux radiations.
Dans l'étude cas-témoins présentée par Pazit Flint-Richter et coll. (Tel-Aviv), 525 familles ont été incluses. On les a divisées selon le statut du cas index de chaque famille : 160 avaient un méningiome associé à une irradiation antérieure (groupe RAM) ; 145 avaient été traités, mais n'avaient pas eu de méningiome ; 85 avaient un méningiome sans antécédents d'irradiation ; 135 n'avaient ni irradiation ni méningiome.
Une exposition à des rayons ionisants.
Les données ont été traitées à partir de questionnaires restituant l'histoire familiale et des enregistrements de cas de méningiomes dans l'Israeli Cancer Registry. Le travail a permis d'identifier 17 (11 %) familles dans le groupe RAM avec deux apparentés du premier degré qui ont eu un méningiome après une exposition à des rayons ionisants pendant l'enfance. Ce qui n'est le cas que d'une famille (1 %) dans les autres groupes (p < 0,0001). Tous les méningiomes du groupe RAM sont survenus chez des participants irradiés.
En complément, on observe une proportion accrue de cancers dans les régions irradiées – tête, cou et thorax – dans les fratries du groupe RAM, en comparaison avec les fratries du groupe irradié, mais qui n'a pas eu de méningiomes. C'est le cas pour 22 familles (10 %) du groupe RAM, par rapport à 9 (5 %) des témoins irradiés. Cet élément supplémentaire plaide en faveur d'une prédisposition génétique qui s'ajoute à l'effet promoteur des rayons ionisants.
«Cette étude fascinante offre des indices épidémiologiques solides montrant que, tout au moins dans cette population de Juifs nord-africains, les cancers associés aux rayons ionisants sont agrégés dans certaines familles plutôt que distribués au hasard dans la population irradiée», commente Eric Hall dans un éditorial.
Il en irait donc pour les méningiomes comme pour la majorité des cancers, où l'on soupçonne fortement la tumorogegèse de se développer après exposition à des carcinogènes de l'environnement, chez des individus présentant des traits génétiques qui les ont rendus plus sensibles à l'effet du carcinogène.
Pazit Flint-Ritcher et coll. « The Lancet Oncology », vol. 8, mai 2007, pp. 403-410, et commentaire, pp. 369-370.
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